La souveraineté économique

La plupart de nos piliers économiques ne sont plus à nous

Tribune libre

Ce qui se passe en Grèce, au Portugal, en Espagne...

Ce qui se passe en Afrique... [1]

Ce qui se passait en Amérique latine avant que la population de plusieurs pays décide de se prendre en main en élisant des dirigeants à leur service et non au service de l'église économique néolibérale...

Il y a bien des leçons à tirer du monde entier qui peuvent nous servir ici, au Québec.
La perte de souveraineté économique est un désastreux péril. C'est ce que vivent présentement la Grèce et quelques autres pays européens. C'est ce que vit la quasi-totalité de l'Afrique (je devrais dire la totalité), c'est ce que vivait la totalité des pays d'Amérique latine avant cet éveil socialiste.
Sans qu'on ne s'en rende compte, on nous vole notre économie. Parfois littéralement quand on pense aux mines et aux forêts. Parfois par des règles, des lois, des ententes comme celles sur le libre-échange ou encore la privatisation qui fait disparaître peu à peu le pouvoir de l'État (de nous) ou comme ces ventes, toujours en douce qui nous sont présentés comme une fatalité bénéfique (sic) et incontournable.
Saviez-vous que la plupart de nos piliers économiques ne sont plus à nous ?
Il y a bien sûr ces vautours qui travaillent à privatiser Hydro-Québec, mais on oublie que depuis 1985, 12 100 firmes "canadiennes" (répertoriées en 2008) ont été vendues [2], en douce, à des "intérêts" étranges, dont 600 depuis le règne du bienfaisant (sic) Stephen Harper (élu en janvier 2006. 600 en seulement deux ans, efficace ce Stephen! Et Charest ?) La plupart de ces ventes (prises de contrôle) ont été "approuvées" «sans examen» par Ottawa ou par Québec. Quelques-unes ont été "examinées", mais AUCUNE ne fut rejetée.
Le Québec a ainsi perdu le contrôle de pans complets de son économie, plus particulièrement dans les secteurs minier et sidérurgique.
Perte de contrôle de géants comme: Falconbridge [3], Inco, LionOre, Cambior, Dofasco, Algoma Steel et Ipsco. Et c'est sans oublier les autres gros morceaux comme Agricor United, North American Oil Sands, Standard Aereo, Abitibi Consolidated, Alcan et BCE.
La liste des entreprises québécoises vendues à des intérêts étranges est renversante:
Sico, Molson, Labatt, Van Houtte, Domtar, Provigo, Bauer, Biochem Pharma, Limocar, Bombardier capital, Bombardier produits récréatifs, La Senza, Softimage, Dollarama, Delisle, Vachon, Multi-Marques, Gadoua, Le Groupe Commerce, La Laurentienne, Assurances générales, Meloche Monnex, Aliments Carrière (mon Map-o-spread), DMR, Groupe Hamelin, Sidbec, Réno-Dépôt, Urgel Bourgie, La Place Dupuis, Nova Bus, Lépine-Cloutier, Bélair Direct, Ivaco, Unibroue, Sports Experts, Prévost Car, Cinar, Sodisco, Culinar, Microcell, Télésystème Mobile, Jean-Marc Brunet (le Naturiste), Technilab, Les Canadiens de Montréal (vendu pour 275 millions à Gillet et racheté pour plus de 500 millions, par Molson et Cie), Corby, Seagram, Donohue, Stadacona, Forex, Foresbec, Avenor, Repap, Cartons St-Laurent, Consolidated Bathurst et en fouillant, on peut en trouver d'autres.
Les chantres néolibéraux pour le libre-échange, devant cette liste, vont rétorquer que les Quebécor, Jean-Coutu et Couche-tard, achètent, elles aussi, un grand nombre de sociétés étrangères, mais cela n'est rien pour compenser la perte d'autant de secteurs vitaux pour notre propre économie et pour les pertes d'emplois ou la dégradation des conditions de travail de milliers de travailleurs-euses Québécois-es.
On parle beaucoup de Souveraineté, il est grand temps que nous devenions Indépendant et il est grand temps que nous protégions «jalousement» nos richesses naturelles et nos secteurs économiques. La privatisation qui se fait toujours en douce, peu à peu sans que cela ne paraisse trop, est dramatique.
La médecine à deux vitesses s'installe en accéléré, la privatisation du secteur de la santé va bon train depuis quelques années. Le secteur universitaire glisse lui aussi lentement vers les tentacules des prédateurs du privé.
Tous les accords concernant la déréglementation de tous les services publics tels que les soins de santé, l'éducation, la culture, les transports publics, l'électricité et même l'eau, ne sont pas mis à la Une des médias, sauf lorsqu'il s'agit de nous faire avaler la pilule en nous endormant profondément.
Le péril de l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) n'est jamais dénoncé par nos brillants journalistes économiques au service des prédateurs économiques.
Parmi tous les accords poussés par l'OMC (ce bataillon économique néolibéral faisant partie du trio dévastateur FMI, BM et OMC), l'AGCS est le plus menaçant. Il s'infiltre dans le dernier retranchement de notre pouvoir politique. Cet accord met littéralement en péril la démocratie. Déjà plusieurs règles et lois économiques paralysent nos gouvernements, on vise maintenant à paralyser les États dans des secteurs vitaux pour la survie des cultures et des peuples.
C'est la «globalisation» totale, le formatage humain au service de l'économie de marché capitaliste néolibérale.
Rappelez-vous les campagnes médiatiques de dénigrement du protectionnisme. On nous présente le protectionnisme comme étant une sorte de maladie "xénophobe" empêchant le sain développement de l'économie. Le protectionnisme est au contraire un moyen de légitime défense. Sans protectionnisme, nous nous faisons bouffer tout cru.
Il serait temps d'envisager des nationalisations dans plusieurs secteurs (Alcan fut une perte immense). Il serait temps d'être trrrrès sensible aux privatisations, même partielle (ou masquée) des PPP.
Si le privé est intéressé par un secteur, dites-vous bien que ce n'est pas pour les beaux yeux de la population, mais parce qu'il y a du profit à faire et des gens (nous) à exploiter. Le privé, ce n'est pas du missionnariat et si le privé peut faire du profit, un État le peut aussi. La science de la saine gestion est trop souvent présentée comme l'apanage du secteur privé. Les aiguilleurs d'opinion nous présentent constamment la lourdeur des gestionnaires de l'État, mais il ne faut jamais oublier que l'État c'est nous, ce sont nos intérêts et NOS «élus» sont en postes pour défendre (en théorie) NOS intérêts.
Il faut être vigilant et exigeant concernant la transparence de nos élus. Il faut voir à nos affaires sinon les prédateurs vont nous rendre esclaves de leurs profits et nous enlever tout pouvoir économique et politique.
Le néolibéralisme nous pousse dans la merde, il est grand temps de nous réveiller collectivement.
Serge Charbonneau
Québec
[1] À lire la lettre de l'économiste camerounais, M. Babissakana à M. Rodrigo de Rato y Figaredo, 9e Directeur Général du Fonds Monétaire International de mai 2004 à octobre 2007.
«Nous avons la conviction que les "objectifs du millénaire pour le développement" ne constituent qu’un gadget fabriqué comme à l’habitude par les bureaucrates rentiers du business de l’aide et dont la portée opérationnelle n’est qu’illusoire.
Le FMI que vous dirigez clame dans sa stratégie à moyen terme, de s’engager pour la création de valeur (progrès économique et social) en faveur de ses "membres à faibles revenus" comme la quasi-totalité des pays africains. Mais les faits ne cessent de vous trahir.
1 - Preuve de la toxicité et de la nocivité de vos conseils en Afrique
Depuis le 19 septembre 1988, date de la signature du 1er accord de crédit stand-by jusqu’à ce jour (18 ans), le gouvernement du Cameroun a conclu avec le FMI un total de sept (7) accords de crédit d’un montant global de 530,57 millions de DTS destinés à l’appui ou au financement des programmes économiques du pays. En exceptant le maigre accord de financement en cours (24 octobre 2005 – 23 octobre 2008), des six (6) accords de financement signés pendant la période, un (1) seul a été exécuté avec succès (20 août 1997 – 20 décembre 2000) avec un montant total effectivement débloqué de 343,745 millions de DTS, soit un taux d’échec de 83%. Comme vous devez le savoir, l’échec d’un programme n’a pas seulement pour origine les défaillances du pays emprunteur.
Le FMI a sa part de responsabilité dans ces échecs qui découlent de ses propres faiblesses notamment idéologiques, méthodologiques et procédurales se traduisant par le design inapproprié des programmes supports de vos prêts. Au regard de "l’intégrisme idéologique" dont fait souvent preuve votre institution, de son manque d’humilité technique et de la présomption de compétence élevée que vous attribuent nos dirigeants corrompus, vos demi-vérités temporaires pourraient justifier au moins la moitié de ce taux d’échec.

http://saoti.over-blog.com/article-5205359.html
Le FMI s’engage à aider l’Afrique à surmonter la crise mondiale

Bulletin du FMI en ligne

Le 10 mars 2009
Le FMI et l'Afrique

publié le 10 mars 2010, France ATTAC
«Le FMI publie, en français, un papier qui paraît davantage écrit pour vanter les mérites de Dominique Strauss-Khan que pour annoncer de bonnes nouvelles pour le continent africain.»
En dehors de l’affirmation lancinante de la croissance comme mère de toutes les vertus, rien sur les termes de l’échange, rien sur la dette écologique ni la dette tout court, rien sur des taxes globales qui viendraient pallier l’exploitation éhontée de ce continent qui ne "pèse" guère plus de 1 % du produit mondial, rein sur l’espérance de vie à la naissance, rien de la malnutrition, rien sur le sort réel d’un milliard d’êtres humains...
Du scandale Segura aux relations Afrique-Fmi
Face au tollé et à l'indignation que suscite au Sénégal le scandale Segura et face à la volonté du Fonds monétaire international (Fmi) d'étouffer l'affaire, le journaliste et consultant sénégalais Adama Gaye revient ici sur ce ... bûlant dossier. Selon son analyse, l'affaire dépasse de loin les seules relations entre un fonctionnaire du Fmi et le gouvernement sénégalais....
Le FMI contre l'Afrique ?

de l'Alliance Nationale de la Résistance du Tchad
[2] données recueillies dans l'excellent livre de Jacques B. Gélinas (page 36)
« Dictionnaire critique de la globalisation », Écosociété, 2008
3] Mercredi le 14 avril 2010, [M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD) déclarait à la chambre des communes:
Monsieur le Président, j'exprime les préoccupations de centaines de résidants de Timmins—Baie James, de Peawanuck et Moosonee jusqu'à Timmins, qui craignent que le gouvernement fédéral ait approuvé les yeux fermés, et sans aucune surveillance, la vente de Falconbridge et Inco, les principales sociétés de métaux communs au Canada, aux maraudeurs d'entreprises Xstrata et Vale.
Ce qui se produit actuellement à Sudbury est odieux: l'entreprise tente de transformer notre main-d'oeuvre en des travailleurs du tiers monde...


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5 commentaires

  • Frédéric Picard Répondre

    30 avril 2010

    Votre analyse est, encore une fois, défaillante à bien des égards.
    Lorsqu’une entreprise « québécoise » est vendue, la valeur de la société québécoise ne change pas. Au contraire, on transforme cette valeur, bien des fois en actions, mais encore plus souvent, en liquidités. Ces actions et ces liquidités sont injectés dans notre société. En effet, on a qu’à voir ce que fait la famille Chagnon depuis la vente de Vidéotron pour se rendre compte que l’argent de cette vente est réinjectée massivement dans notre économie.
    Lorsqu’une entreprise est vendue, on transforme le capital, la valeur théorique de l’entreprise en biens plus labiles. Un entrepreneur, qui par définition est un créateur, utilisera alors cet argent pour investir, donc créer. Il peut investir dans des fonds et la jouer pepère. Mais il faut connaitre ce qu’est un entrepreneur. Il y a dans les entrepreneurs une fibre créatrice, qui les empêchent de faire du sur place. Exemple : L’entreprise pour laquelle je travaille a été achetée par une compagnie américaine. Mon ancien patron a pris les sous et a agrandit l’usine de son autre compagnie, embauchant encore plus de personnes aujourd’hui. Il domine maintenant le secteur des litières pour chat.
    Dites-moi, monsieur Charbonneau, où est la perte de souveraineté ? Je travaille toujours au Québec, et mon ancien employeur embauche encore plus de personnes, donc combat encore plus la pauvreté …
    Avec l’effondrement des cours boursiers (donc de la valeur théorique des compagnies), heureux sont ces québécois qui ont su tirer profit de leur créativité passée à temps. Maintenant que les prix sont bas, que la main d’œuvre est bon marché, ils pourront créer de nouveau et multiplier leur pouvoir.
    “There is one rule for the industrialist and that is: Make the best quality of goods possible at the lowest cost possible, paying the highest wage possible.” Henri Ford
    Pour ce qui est de mon employeur actuel, ce dernier s’établira où les coûts de production (ce qui inclut la fiscalité corporative) seront les moins grands. C’est la seule loi qui prévale. Évidemment, il y a une inertie, un momentum. Une entreprise établie à un endroit y restera, afin d’utiliser le plus de leviers synergiques possibles. Toutefois, cette équation est rapidement cassée, si un contexte économique favorise plus l’investissement que le poids de ces leviers synergiques dans un autre endroit. Alcan n’a pas déménagée suite à l’achat par Rio Tinto, car le gouvernement continue de lui donner des nanannes (entre autres, le bail ridicule du Lac St-Jean). Idem aussi pour les papetières, où on donne le territoire du Québec, sans égard à son aménagement (via l’intervention étatique que l’on nomme CAF)
    Mais au fait, qu’est-ce que cette souveraineté ?
    La souveraineté s’exerce par le peuple, par les gens. À chaque fois que l’on consomme, on vote. Moi, je ne vote pas pour l’ail chinois. Je préfère en manquer que d’en acheter. C’est dégueulasse et ça pourrit en 1 semaine. Je vote pour l’ail Québécois ou le jus de pomme Lasonde ou Jodoin. Idem lorsque je me fais servir en anglais. Jamais un commerçant n’obtient mon argent s’il m’aborde en me disant « May I help You ? ». Je prends soin de choisir des aliments du Québec, pas forcément le moins cher. Ce sont donc les choix des québécois, dans leurs paniers d’achats, dans leurs habitudes, qui dictent cette souveraineté économique. Chaque achat que vous faites est un référendum.
    Une conception restreinte du pouvoir
    La notion de pouvoir (donc, de souveraineté), dans votre analyse, monsieur Charbonneau, ne semble s’exercer que via la boite de scrutin. C’est là une profonde erreur. Le pouvoir s’exerce dans chaque geste, chaque choix de nos vies.

    En effet, le fait qu’une entreprise soit possédée par l’état ne change pas les équations mathématiques du profit. Si une entreprise perd de l’argent, elle n’en gagnera pas avec une nationalisation. À l’inverse, une entreprise payante, continuera à faire de l’argent (Ex : PDVSA ou Hydro-Quebec).
    Toutefois, la nationalisation va avoir un impact dans les choix de l’entreprise, ce qui, en bout de ligne, va affecter l’équation. On a qu’à penser à l’aventure éolienne d’Hydro, où un choix étatique a été fait, pour revigorer une région malmenée. Ce choix entraine des pertes (10.5 cent le Kwh, contre un prix de vente beaucoup moins cher) pour Hydro, donc, pour tous les Québécois. Dans ce cas, les québécois perdent du pouvoir, tant que les prix de vente de cette énergie éolienne seront si bas.
    Le fait qu’un dirigeant d’entreprise soit Québécois ou Chinois ne change pas les décisions d’affaires qu’il fera sur notre territoire. Ces décisions sont toutes dictées par la même équation mathématique et froide.
    Ventes – Coût de production = Profit.
    C’est cette même équation qui régit TOUS les êtres vivants.
    Gains énergétiques - Pertes énergétiques = vie.

  • Archives de Vigile Répondre

    30 avril 2010

    Je me permets de référer les lecteurs et lectrices à un très bon article du Monde Diplomatique qui vient tout juste d'être mis en ligne...Il vient renforcer ce à quoi les interventions de M.Charbonneau essaient de nous sensibiliser de plus en plus.
    http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2010-04-30-Crise-financiere

  • Archives de Vigile Répondre

    29 avril 2010

    "Sico, Molson, Labatt, Van Houtte, Domtar, Provigo, Bauer, Biochem Pharma, Limocar, Bombardier capital, Bombardier produits récréatifs, La Senza, Softimage, Dollarama, Delisle, Vachon, Multi-Marques, Gadoua, Le Groupe Commerce, La Laurentienne, Assurances générales, Meloche Monnex, Aliments Carrière (mon Map-o-spread), DMR, Groupe Hamelin, Sidbec, Réno-Dépôt, Urgel Bourgie, La Place Dupuis, Nova Bus, Lépine-Cloutier, Bélair Direct, Ivaco, Unibroue, Sports Experts, Prévost Car, Cinar, Sodisco, Culinar, Microcell, Télésystème Mobile, Jean-Marc Brunet (le Naturiste), Technilab, Les Canadiens de Montréal (vendu pour 275 millions à Gillet et racheté pour plus de 500 millions, par Molson et Cie), Corby, Seagram, Donohue, Stadacona, Forex, Foresbec, Avenor, Repap, Cartons St-Laurent, Consolidated Bathurst et en fouillant, on peut en trouver d’autres."
    C'est exact, et ce ne sont pas des territoires mais des dénominations sociales que nous perdons. Des sociétés regroupées sous des raisons sociales qui influence l'État au sein de la société civile.
    La "Souveraineté du Québec" çest du vide. C'est la souveraineté du peuple québécois que nous voyons disparraître par la perte de ses institutions représentatives et créatives.
    La nation c'est le peuple. Ce sont des hommes et des femmes et ce qu'ils produisent. Pas des roches et des plantes.

  • Archives de Vigile Répondre

    29 avril 2010

    Merci beaucoup, M.Charbonneau,
    Votre texte est très instructif et nous replace véritablement dans la perspective.
    Continez!
    Lawrence Tremblay.

  • Archives de Vigile Répondre

    29 avril 2010

    Il faut voir un beau reportage de Greg Palast sur les vulture fund en afrique. Ce reporter est exceptionnel,tous ce qu'il fait est génial,un VRAI journaliste d'enquête. Quelques uns de ses reportages (Livres,DVD); Bush family fortune,Best democracy money can buy,Big easy to big empty,Armed madhouse.