PROJET DE LOI 20

La soeur de Julie Miville-Dechêne a conseillé le ministre Barrette

Certains membres du CA du Conseil du statut de la femme dénoncent une «apparence de conflit d’intérêts»

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Dire que cette information est «troublante» est pour le moins un euphémisme

La soeur de la présidente de Conseil du statut de la Femme Julie Miville-Dechêne a travaillé avec l’équipe du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, pour établir les quotas imposés aux médecins dans le projet de loi 20, a appris Le Devoir. Des membres du conseil d’administration dénoncent cette « apparence de conflit d’intérêts », ce que réfute vigoureusement la présidente.

« Ce que j’apprends est très troublant, lance d’emblée Julie Latour, qui vient de claquer la porte du conseil d’administration du Conseil du statut de la femme (CSF). Peut-être que ça explique un peu l’opacité du processus décisionnel. On peut se questionner à savoir si la situation de lien privilégié explique l’unilatéralisme de la présidente dans ce dossier. »

La présentation de Julie Miville-Dechêne en commission parlementaire sur le projet de loi 20, le 26 février dernier, a créé bien des remous. Tiraillée entre l’appel des femmes médecins, qui seraient les premières pénalisées par les quotas, et les patientes, qui attendent un médecin de famille, elle affirmait que le Conseil du statut de la femme avait choisi de défendre « les patientes vulnérables plutôt qu’un petit groupe de femmes qui disposent d’un revenu élevé ». Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, était on ne peut plus heureux, parlant d’une « position courageuse » et d’un mémoire d’une « extraordinaire pureté ».

Les femmes médecins se sont braquées et Julie Miville-Dechêne a dû défendre sa position à maintes reprises dans les médias. Cette position a également généré une crise interne au Conseil du statut de la femme. Affirmant que les membres du conseil d’administration n’avaient jamais été consultés sur cette question et se disant incapable de défendre une position qui ramène les femmes 40 ans en arrière, l’avocate Julie Latour a quitté le conseil d’administration.

Tête à tête avec le ministre

Sur les ondes de TVA, mercredi, la Dre Geneviève Dechêne, spécialiste des soins palliatifs, se réjouissait des ratios imposés par le ministre pour les cas lourds. Bien que la Fédération des médecins omnipraticiens soit contre ces quotas, la Dre Dechêne affirmait que le gouvernement avait entendu toutes ses recommandations. « On avait travaillé avec les gens du gouvernement ces derniers mois et les équivalences suggérées ont été retenues telles quelles. » Selon des documents obtenus par Le Devoir, la Dre Dechêne a eu au moins une rencontre d’une heure et demie avec le ministre pour discuter des quotas. Ce dernier a également visité le CLSC de Verdun, où la Dre Dechêne travaille, et a cité en exemple cet établissement lors de l’échange avec Julie Miville-Dechêne en commission parlementaire.

Or, la Dre Dechêne est la soeur de Julie Miville-Dechêne, et certains y voient une influence directe. « Dans le milieu, plusieurs ont vu de très grandes similitudes entre le mémoire du CSF et les propos tenus depuis longtemps par la Dre Dechêne », affirme une médecin qui désire garder l’anonymat.

Questionnée à cet effet, Julie Miville-Dechêne affirme qu’il n’y a aucun lien à faire. « Je ne suis pas au courant de tout le travail de ma soeur, particulièrement sur cet enjeu-là. Ce que je peux vous dire, c’est que ma soeur est présente dans l’actualité médicale depuis des années sur ces questions-là. » Elle refuse de dire si elle a parlé avec sa soeur avant d’écrire son mémoire, disant qu’on lui faisait un procès. « Je suis certaine que je ne suis pas en conflit d’intérêts », a-t-elle affirmé d’un ton cassant.

Pour Julie Latour, il aurait fallu, à tout le moins, que la présidente du Conseil du statut de la femme fasse part de cette situation aux membres du conseil d’administration. Catherine Des Rivières, qui siège toujours au conseil d’administration, abonde dans le même sens, précisant que la situation aurait pu être évitée si les membres du CA avaient été consultés avant la publication du controversé mémoire. « Il aurait été vraiment préférable que les membres du conseil soient consultés, comme ils doivent l’être pour tous les mémoires du Conseil du statut de la femme. Ça aurait évité cette apparence de conflit d’intérêts par rapport à sa soeur. »


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