La question nationale et les élections municipales à Montréal

Tribune libre

Dans une lettre d'opinion publiée par Le Devoir, j'affirmais que madame Harel avait pris une mauvaise décision en prenant la tête de Vision Montréal. Je notais que l'histoire des peuples et surtout des minorités ethniques nous démontrait que la question nationale et surtout la sauvegarde de leur statut dans un pays avait préséance sur toutes les autres questions. Au Québec, cela s'est traduit, lors des référendums, par un vote massif pour le fédéralisme canadien. Le départ de madame Noushig Eloyan du parti Vision Montréal et son choix de devenir candidate libérale aux prochaines élections fédérales, annoncé officiellement le 11 novembre confirme cette hypothèse. Madame Eloyan le dit elle-même dans le communiqué:" Dans ma vie, j'ai fait deux choix importants. J'ai choisi un pays et j'ai choisi une ville". Il semble bien, dans son cas, que le choix du pays soit plus déterminant que celui de la ville. C'est un dur coup pour madame Harel, mais, selon moi, prévisible surtout devant l'éventualité d'une élection fédérale en novembre.
Ce départ précipité de madame Eloyan indiquerait, pour ma part, le dilemme des minorités ethniques d'appuyer une souverainiste convaincue dans la conquête de la ville la plus importante du Québec. Certes des personnalités des minorités se présentent pour Vision Montréal, mais je ne suis pas convaincu que les "votes ethniques" suivront. Déjà, je remarque que sur les 103 postes électifs, à 50 jours du scrutin, 79 candidats ont été recrutés. La plupart des postes non-comblés se retrouvent surtout dans les arrondissements à minorités ethniques importantes de l'Ouest de l'île: Saint-Léonard, L'île Bizart et Sainte-Geneviève, Pierrefonds-Roxboro, Saint-Laurent... Depuis le départ de madame Eloyan, certains politiciens, organisateurs et journalistes parlent de malaise à Vision Montréal. Le "politically correctness" empêche de constater un fait indéniable: la question nationale joue encore et davantage chez les minorités ethniques.
Le pari de madame Harel consiste à réussir à faire le pont entre souverainistes et fédéralistes pour s'unir afin de battre Union Montréal et son maire Gérald Tremblay. En ignorant Projet Montréal, madame Harel a cru qu'un pacte avec les fédéralistes pouvait se faire sur un consensus concernant la gouvernance de Montréal. Certains fédéralistes francophones et anglophones ont répondu à l'appel mais l'appui électoral ne suit pas. Le dernier sondage publié dans La Presse confirme cette tendance: la majorité des francophones appuie Vision Montréal alors que la majorité des anglophones et minorités ethniques soutiennent Union Montréal. Ce premier sondage indique-t-il que glisser la question nationale sous le tapis n'a pas été une bonne stratégie?
Une entente préalable avec Projet Montréal basée sur un projet progressiste pour Montréal, avec à sa tête madame Harel, aurait pu amener une dynamique différente. Cette stratégie n'aurait pas été automatiquement gagnante mais le projet aurait eu plus de cohérence.
Jean Archambault

Montréal


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1 commentaire

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    16 septembre 2009

    Oui, bien sûr, la question nationale joue énormément, chez nos minorités, car ces gens sont venus ici, en croyant s'établir au Canada. Enfin, techniquement, c'est vrai, mais peut-être n'étaient-ils pas tous bien au courant de la différence québécoise (au-delà du fait que le Québec est une province majoritairement francophone)...
    Ils ont choisi le Canada; ils ne veulent pas changer de pays, ni voir les frontières de celui qu'ils avaient choisi, ou croyaient avoir choisi, être modifiées de façpn importante. Ils souhaitent une certaine stabilité.
    Mais de notre côté, la question de la gestion de la métropole québécoise, joue autant, sinon plus: nous ne pouvons penser construire un nouveau pays digne de ce nom, si Montréal devenait une ville majoritairement anglophone et allophone, et culturellement, une cité qui nous paraîtrait étrangère.
    Je crois qu'il est crucial que Louise Harel devienne la mairesse de Montréal. Il faut, pour ainsi dire, reprendre Montréal; en faire à nouveau une ville où l'on n'a pas de difficulté à se faire servir en français dans une boutique ou un restaurant!