La procédure d’impeachment dans notre système parlementaire ou comment destituer le gouvernement Couillard dans un contexte d’austérité

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Aux grands maux les grands remèdes !

L’impeachment (« mise en accusation » ou « procédure de mise en accusation » dans le langage juridique) est le nom de la procédure permettant au pouvoir législatif de destituer tout homme politique ou représentant de l’État. C’est donc une procédure criminelle contre un élu, un gouvernement ou un haut fonctionnaire d’un gouvernement. En Angleterre, d’où origine cette procédure d’accusation, la condamnation par la Chambre des Lords suite à des procédures judiciaires et pénales, pouvait mener à l’emprisonnement ou même à l’exécution. Cette procédure est proche de la motion de censure.


Elle est originaire d’Angleterre, mais est surtout connue pour son application aux États-Unis, avec la destitution en 1974, du Président Richard Nixon, suite aux révélations successives de son implication dans le scandale du Watergate.



(voir : Impeachment (États-Unis) (Impeachment (Royaume-Uni)).


Le Parlement britannique a connu sa première procédure d’accusation en 1376. Il s’agissait du Baron William Latimer très associé au roi Edward III, dont le gouvernement qu’il dirigeait, s’était avéré très impopulaire et inefficace. De 1621 à 1679, de nombreux officiels ou élus associés à la monarchie, furent destitués, comme le Duc de Buckingham (1626), le Comte de Strafford (1640), l’archevêque William Laud (1642), le Comte de Clarendon (1667), et Thomas Osborne, le Comte de Danby (1678). Dans ce dernier cas, même le Pardon du Roi, ne pu empêcher la procédure d’impeachment de destituer Thomas Osborne.


Le parlementarisme est un système de gouvernement qui s’est d’abord développé en Angleterre aux XVIIème et XVIIIème siècle. C’est ce modèle de parlementarisme qui a servi de modèle aux Pères de la Confédération canadienne, afin de définir nos institutions.


L’impeachement est le plus vieille arme constitutionnel, afin de traiter des crises de despotisme. Il doit être prouvé que ceux qui nous gouvernent, par leurs politiques, portent un tort irréparable au peuple. Un gouvernement n’a pas la légitimité de conduire ses politiques comme il l’entend, contrairement à la croyance populaire. D’autant plus, s’il a menti aux électeurs sur des sujets fondamentaux, au cours d’une élection. La notion de « bon gouvernement » est à la base de la création de la procédure d’impeachment.


Cette procédure criminelle, bien que pas appliquée depuis longtemps, fait toujours partie de notre arsenal constitutionnel, afin de condamner, toutes conduites illégales et despotiques des grands personnages de l’État. Notre Constitution de 1867 stipule, dans son préambule de la Loi constitutionnelle, que le Canada sera fondé « sur les mêmes principes que ceux du Royaume-Uni ».


Bien que tombé graduellement en désuétude, l’oubli ne constitue pas son abrogation. L’impeachment demeure toujours une procédure, selon notre dispositif constitutionnel, valable à des situations politiques inquiétantes et qui portent un tort irréparable à la population du Québec, puisque c’est le cas qui nous intéresse. Une décision irresponsable prise que dans le but de plaire et de séduire une petite partie de l’électorat, et qui porte ainsi un tort irréparable à la grande majorité de la population, pourrait être sanctionnée par une procédure d’impeachment, tant au Québec qu’au Canada.


La procédure d’impeachment possède deux avantages importants par rapport à une procédure criminelle. Premièrement, elle suspend les prérogatives de la Couronne d’intervenir, à tout moment de la procédure, afin de demander l’abandon des accusations. Deuxièmement, suite à un jugement de culpabilité, elle suspend aussi la possibilité de Sa Majesté, soit la Reine ou ceux qui en sont les représentants, soit le ou la Gouverneur(e) général(e) du Canada ou tout lieutenant-gouverneur, d’octroyer le Pardon aux personnes reconnues coupables. Au Canada, la condamnation pourrait aller jusqu’à une peine de 25 ans, sans possibilité de libération conditionnelle. Notre Constitution est donc dotée d’un puissant arsenal contre tout représentant de l’État tenté par le despotisme. Quand, on sait que dans notre système parlementaire de type britannique, particulièrement depuis que les chefs de partis ont abusé de la « ligne de parti », le Pouvoir est concentré dans les mains du Premier ministre, à l’insu de ses ministres qui forme son cabinet, et surtout des autres élus de l’Assemblée nationale, on peut affirmer que les risques de despotisme sont immenses. Le Premier ministre peut, en effet, facilement dominer la majorité de ses députés, qui sont ainsi disposés à s’écraser devant lui. Les révélations de la Commission Charbonneau, selon lesquels Marc Bibeau et Jean Charest, via son chef de cabinet, en menaient large pour imposer à leurs ministres, députés et candidats libéraux, notamment dans leurs directives de financement conduisant à la collusion et à la corruption, nous démontrent que nous avions affaire, clairement, à une forme de despotisme, favorisant une petite élite économique au détriment de l’ensemble des contribuables québécois.


Dans le cas du gouvernement Couillard, les exemples sont nombreux, comme les récentes interventions pour aider la famille Beaudoin avec le financement de près de 500 millions de notre argent à la cimenterie McInnis, à Port-Daniel-Gascons, au détriment des autres cimenteries et le récent un milliard de dollars accordé à Bombardier. Cette même société qui fait de l’évasion fiscale via sa succursale du Luxembourg et qui va délocaliser des emplois au Maroc et au Mexique. Dans un contexte où les hauts dirigeants  de Bombardier se sont partagés, rien de moins que 23 millions en salaire. Nous avons ici, aussi clairement, affaire à un cas de despotisme. Mais le cas le plus problématique, s’avère celui de l’approche dogmatique de ce gouvernement libéral avec la sacro-sainte austérité, et qui porte un tort irréparable aux Québécois. Vous trouverez sur le site de l’institut de recherche IRIS, une évaluation complète des conséquences de l’austérité du gouvernement libéral de Philippe Couillard sur la population du Québec.


Normalement, ce sont les élus de l’Assemblée nationale qui peuvent entamer cette procédure d’impeachment envers ce gouvernement. Mais, vivant dans un système non proportionnel, il serait légitime que la population remette en cause la représentativité de ce parlement, et surtout de ce gouvernement.


Deux moyens pourraient être utilisés afin de destituer le gouvernement. Le premier est le référendum. Dans le contexte actuel, il est fort peu probable que l’Assemblée nationale puisse en faire usage, vu la majorité libérale à l’Assemblée nationale. La deuxième est la pétition en ligne. Un député, de l’opposition, pourrait la parrainer sur le site web de l’Assemblée nationale. Cette pétition ferait une énorme pression sur le gouvernement afin de déclencher un référendum ou carrément une élection. Dans le cas de blocage, cette pétition pourrait être remise au représentant de la Reine, soit le Gouverneur général du Canada. La crise politique serait telle, vue la ligne délicate où se trouverait cet émissaire de la Monarchie britannique, que Gouverneur serait forcé de pencher en faveur de la population du Québec.


Nous pouvons donc conclure que nous disposons, nous les Québécois, d’un  moyen fort afin de refuser les mesures d’austérité actuelle. Il nous est fortement légitime d’utiliser cet arsenal constitutionnel qu’est l’impeachment. C’est à nous de choisir, si nous désirons utiliser ce pouvoir qui est entre nos mains, afin de dire haut et fort un véritable NON  à l’austérité.


Éric Lauzon

lauzon.eric@gmail.com


Éric Lauzon, Militant politique



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