La pire guerre commerciale depuis le second conflit mondial

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Quid de l'ALÉNA ?

 Le gouvernement Trudeau a annoncé jeudi qu’il se fera justice pour «l’affront» de l’imposition de surtaxes sur l’aluminium et l’acier canadien par l’administration Trump. Il réplique en imposant les pires représailles commerciales du Canada depuis les années 1940.


Le niveau d’intensité a atteint jeudi celui d’une guerre commerciale en bonne et due forme entre le Canada et les États-Unis.


Cela inquiète les spécialistes du commerce international, qui y voient un dangereux précédent qui risque de faire mal aux entreprises et à l’économie mondiale.


Grande dépression des années 1930


«La dernière fois qu’on a vu des mesures de protectionnisme de ce genre-là, ç’a mené à la grande dépression, un des facteurs de la Seconde Guerre mondiale», analyse Krzysztof Pelc, politologue à l’Université McGill.


L’argument de la «sécurité nationale» des États-Unis a été invoqué jeudi par l’administration Trump pour justifier l’imposition à partir de vendredi d’une taxe de 25 % sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium canadien.


« C’est inconcevable d’être considéré comme une menace pour la sécurité nationale des États-Unis », a répliqué le premier ministre Trudeau, rappelant l’alliance militaire liant les deux pays.


Jusqu’ici, il était contraire à la norme internationale d’évoquer la sécurité de sa nation pour imposer de nouvelles barrières pour les biens produits dans les autres pays, selon le professeur Pelc.


Riposte


Cela a provoqué une riposte presque immédiate du Canada, mais aussi du Mexique et de l’Union européenne, eux aussi surtaxés, qui ont annoncé des représailles commerciales contre les États-Unis.


À moins qu’un accord soit conclu d’ici au 1er juillet, Trudeau annonce que l’acier et l’aluminium américains seront frappés d’une taxe de 25 % en entrant au Canada. D’autres produits des États-Unis seront surtaxés de 10 %.


Ce sont les représailles les plus sévères prises par le Canada depuis la Seconde Guerre mondiale, a précisé la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland. Elles visent à pénaliser les États-Unis à la hauteur de 16,6 milliards $, soit un montant équivalent aux exportations canadiennes de ces deux métaux.


Illégal


La spécialiste du commerce international Geneviève Dufour précise que les hostilités de part et d’autre sont illégales selon le droit commercial, et vont heurter les entreprises du pays.


«On assiste à une escalade de mesures protectionnistes. Les règles sont claires : on n’a pas le droit de faire ça», indique la professeure à l’Université de Sherbrooke.


Même si le Canada entend contester la taxe américaine devant les tribunaux de l’ALENA et de l’Organisation mondiale du commerce, le pays s’expose aussi à des poursuites, selon elle.



CE QU’ILS ONT DIT


«La décision aujourd’hui appartient entièrement à l’administration américaine. Ça a été leur choix d’imposer ces mesures inacceptables. [...] Nous espérons que le sens commun prévaudra. Mais nous ne voyons aucun signe que ce sera le cas avec l’annonce d’aujourd’hui» -Justin Trudeau, premier ministre


«Justin Trudeau a dit aux travailleurs qu’il avait réglé le problème. La nouvelle d’aujourd’hui prouve hors de tout doute que le premier ministre a échoué» -Andrew Scheer, chef de l’opposition


«Le gouvernement Trudeau a échoué dans les négociations, a échoué dans son plan. Notre principale préoccupation est ce qui va arriver aux travailleurs et travailleuses» -Karine Trudel, députée du NPD


«C’est une mauvaise décision pour les Américains. Ils viennent d’augmenter le coût de toute leur industrie manufacturière et de leur industrie de la défense. C’est totalement illogique» -Philippe Couillard, premier ministre du Québec


«Ces tarifs américains unilatéraux sont injustifiés et contraires aux règles de l’Organisation mondiale du commerce, c’est un protectionnisme pur et simple» -Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne