Plusieurs millions de dollars seraient nécessaires pour déplacer des douaniers au Québec afin d’affronter une vague record de migrants à la frontière, selon des experts.
Une liste de douaniers d’ailleurs au pays prêts à passer quatre ou huit semaines au Québec est en train d’être élaborée par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), dans son effort de procéder au traitement des demandes d’asile à la frontière.
Le Journal a consulté une lettre invitant les agents expérimentés de la région de Toronto à troquer leurs vacances estivales pour un travail à Saint-Bernard-de-Lacolle, en Montérégie, ou à Montréal, entre le 28 mai et le 16 septembre.
Selon le Syndicat des douanes et de l’immigration, des agents d’un peu partout ont reçu cette offre, qui précise que les frais de voyage et heures supplémentaires seront payés.
Aucune estimation des coûts n’existe auprès de Sécurité publique Canada, mais deux experts en sécurité ont estimé au Journal qu’entre 10 000 et 15 000 $ par mois seront nécessaires pour déménager un agent dans ces conditions, principalement en frais de déplacement, de logement et en allocations de repas.
Douaniers empruntés
En cas d’achalandage record à la frontière, alors que 400 migrants pourraient s’y présenter quotidiennement selon le gouvernement du Québec, au moins 200 douaniers devront être « empruntés » à leur lieu de travail régulier pour être dépêchés à Saint-Bernard-de-Lacolle, évalue le syndicat.
« La frontière de Lacolle est déjà très chère en heures supplémentaires l’été, qui est la période de pointe. Avec l’arrivée des migrants, ça risque d’augmenter encore plus et de créer des délais dans d’autres points d’entrée. On manque de personnel », affirme le président syndical Jean-Pierre Fortin.
Tout additionné, le scénario catastrophe pourrait coûter au moins 8 M$ pour les quatre mois estivaux, sans compter les heures supplémentaires promises.
« Ça pourrait coûter cher. Grosso modo, quand les agents sont dépêchés loin de la maison, on leur paie tout. En même temps, ils sont là pour assurer notre sécurité », analyse un ancien agent du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) Michel Juneau-Katsuya.
« On peut rajouter le lavage des uniformes, la gestion des armes... Il n’y a pas juste le prix des agents, mais toute la logistique qui vient aussi avec », renchérit le policier de la Sûreté du Québec à la retraite Paul Laurier.
Pas d’embauches
Le bureau du ministre de la Sécurité publique confirme qu’aucun nouvel agent n’est embauché pour faire face à l’afflux de demandeurs d’asile et que 800 douaniers ont déjà été « prêtés » à la frontière québécoise entre juillet 2017 et mars 2018.
Il souligne toutefois que le déplacement de ses agents ne causera pas de délais supplémentaires pour la population générale aux autres points d’entrée réguliers, comme les aéroports de Toronto et Montréal.