Oslo

La Norvège en deuil

Actualité internationale - Oslo attaquée



Un carnage invraisemblable! Un homme de 32 ans est sous arrêt, Norvégien «de souche», précise la police, chrétien et conservateur, ce qui ne suffit évidemment pas à expliquer des attentats aussi horribles. La folie non plus ne peut tout expliquer. Alors quoi, sinon l'extrémisme, le fondamentalisme politique ou religieux, ce rapport parfait entre conviction et détermination qui, détaché de cette autre merveilleuse faculté humaine, le jugement, peut transformer un homme en monstre.
Le bilan policier en est à 93 morts, une centaine de blessés et plusieurs disparus. C'est le pire attentat terroriste commis en Europe depuis celui qui a fait 191 morts à Madrid, en 2004. La plupart des victimes étaient de jeunes sympathisants travaillistes réunis pour une session de formation estivale sur la petite île d'Utoeya, à quelques dizaines de kilomètres du premier attentat survenu quelques heures plus tôt à Oslo.
Tout porte donc à croire que l'appartenance politique de ces jeunes explique qu'ils ont été choisis pour cible par un tireur pas aussi fou qu'on voudrait le croire. Car dogmatisme n'est pas folie, même si elle en a souvent toutes les apparences.
L'homme de 32 ans identifié comme étant Anders Behring Breivik avait planifié son geste depuis longtemps, s'étant procuré d'importantes quantités de nitrate d'ammonium, engrais souvent utilisé comme agent explosif dans la confection de puissantes bombes artisanales.
Quelques heures après l'explosion qui a tué sept personnes à Oslo, le même individu s'est présenté sur l'île d'Utoeya en se faisant passer pour un policier pour y tuer des dizaines de jeunes sympathisants travaillistes à l'aide d'un fusil automatique. Du pur délire, certes, mais ô combien prémédité, ô combien réfléchi!
La police associe le terroriste appréhendé à l'extrême droite, sans affirmer qu'il faisait partie d'un groupe formellement constitué.
Sur le compte Twitter de Breivik, on a retrouvé cette citation de l'économiste libéral anglais John Stuart Mill: «Une personne avec une conviction est aussi forte que 100 000 qui n'ont que des intérêts.» Le message est clair. Pourtant, si Breivik a pu trouver une motivation dans cette phrase, John Stuart Mill n'y est pour rien, lui qui, au XIXe siècle, a défendu par ses écrits le rôle de l'État redistributeur de richesse et qui a développé la théorie selon laquelle les individus agissent généralement dans le but de maximiser leur bonheur...
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Contrairement aux appréhensions initiales, les deux attentats de Norvège n'avaient donc rien à voir avec al-Qaïda. Rien à voir... sinon qu'ils sont l'oeuvre d'un homme qui voulait s'attaquer aux politiques jugées trop «libérales» d'un gouvernement «humaniste» soucieux de l'égalité des droits entre citoyens de toutes origines.
Rien à voir, sinon que tous les extrémismes se croisent un jour ou l'autre sur la route de l'horreur.
La Norvège est sous le choc et avec elle tous les pays qui ont choisi de vivre et de défendre la démocratie. Aujourd'hui comme au lendemain du 11 septembre 2001 et du 11 mars 2004, nous sommes tous Norvégiens!
Une catastrophe comme celle qui vient de s'abattre sur le peuple norvégien pourrait fort bien se produire ici, au Québec ou au Canada. Rien de précis ne prédisposait ce petit pays riche, calme et pour le moins homogène d'à peine 4,9 millions d'habitants à devenir le théâtre d'un tel drame. La Norvège n'est pas divisée par la guerre civile, les conflits religieux ou raciaux. Sans en être absents, le fondamentalisme islamique et la droite extrémiste n'y recrutent pas des disciples en nombre suffisant pour semer la crainte. Sauf qu'en cette matière, ce n'est visiblement pas le nombre qui compte le plus.
Cette sanglante tragédie invite une fois de plus à condamner sans réserve les idéologies et les croyances «en boucle», imperméables à la critique, qui incitent les adeptes à abandonner leur capacité de jugement au profit d'une cause. Qu'on parle de fondamentalisme musulman ou hindou, chrétien ou juif, qu'on l'associe à la droite ou à la gauche, qu'elle participe du racisme ou du sexisme, toute doctrine exacerbée par l'obsession d'en finir avec l'autre, l'ennemi de classe ou l'impie, en vient un jour à produire son lot de combattants prêts à tuer au nom de cette cause dont ils se croient les ultimes défenseurs devant Dieu ou devant l'Histoire.


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