ALBERTA

La fuite de l’oléoduc relance le débat sur leur sécurité

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Plus on se renseigne sur la sécurité des pipelines, moins elle apparaît assurée

L’importante fuite d’un oléoduc au coeur de la forêt boréale canadienne a relancé le débat vendredi sur la sécurité de ces infrastructures alors que les groupes pétroliers veulent en étendre le maillage en Amérique du Nord.

Quelque cinq millions de litres de liquide bitumineux (mélange lourd d’eau usée, de sable et de pétrole) se sont déversés entre mercredi et jeudi en raison d’une brèche inexpliquée dans l’oléoduc, souillant une zone de 1,6 hectare.

Cela représente l’équivalent de 31 500 barils de pétrole et constitue la deuxième marée noire en importance en Alberta, coeur de l’industrie pétrolière canadienne. C’est l’un des pires accidents du genre en Amérique du Nord, selon les médias locaux.

L’accident n’a pas été signalé par les outils automatiques prévus sur cet oléoduc en service depuis début 2014 : la fuite a plutôt été constatée de visu par un employé passant dans les parages, a indiqué vendredi le producteur d’hydrocarbures Nexen, filiale du groupe public chinois CNOOC qui l’a acquis en 2013 pour 15 milliards de dollars.

« Nous nous excusons sincèrement pour les impacts causés » par cet accident, a déclaré vendredi en conférence de presse Ron Bailey, directeur général de Nexen.

L’incident s’est produit à 100 mètres d’un lac, qui n’a pas été contaminé selon les autorités, et à 36 km au sud de Fort McMurray, épicentre de l’exploitation des sables bitumineux albertains.

Aucun homme ou animal n’a été officiellement touché par la fuite de cet oléoduc, a souligné M. Bailey en notant avoir aussitôt alerté la réserve amérindienne la plus proche, soit à 15 km seulement de la zone polluée. Il n’a pas fait état à ce stade d’une éventuelle contamination de la nappe phréatique.

La zone étant isolée, des équipes de Nexen sont en train d’ouvrir un chemin à travers la forêt pour acheminer le matériel de nettoyage, a précisé M. Bailey, soulignant que la fuite était colmatée.

L’autorité albertaine de l’énergie (AER) a déployé sur place des agents qui ont entamé leur enquête vendredi sur les causes de l’incident.

« La fuite ne s’est pas répandue jusqu’à un cours d’eau », a assuré l’AER dans un communiqué, ajoutant qu’« aucune conséquence sur le public ou la faune n’a été constatée ».

Cet incident a lieu alors que les Canadiens sont toujours plus divisés par d’ambitieux projets d’oléoducs devant acheminer le pétrole albertain vers les ports de l’Atlantique, du Pacifique et du golfe du Mexique.

Cinquième producteur mondial d’or noir, le Canada souffre cruellement du manque d’infrastructures pour exporter sa production.

L’industrie pétrolière albertaine mise donc sur trois projets majeurs d’oléoducs : Keystone XL, qui doit rejoindre le sud des États-Unis mais est bloqué par Washington, Énergie Est, qui doit relier l’Alberta aux raffineries du littoral oriental mais fait face à une forte opposition populaire en Ontario et au Québec, et Northern Gateway, qui doit connecter les sables bitumineux aux côtes du nord de la Colombie-Britannique et vigoureusement combattu par des communautés amérindiennes. En tout, ces projets représentent des investissements de près de 28 milliards de dollars canadiens.

Pour l’association environnementaliste Greenpeace, cette fuite « est un bon rappel du long chemin que doit encore accomplir l’Alberta pour résoudre ses problèmes d’oléoducs ».

La construction de nouveaux oléoducs, comme le souhaite l’industrie, « va faciliter l’expansion des sables bitumineux — la source d’émission de carbone qui connaît la croissance la plus rapide au Canada — et accélérer encore plus le réchauffement climatique », a estimé Greenpeace dans un communiqué.

Alors que les premiers ministres des provinces canadiennes étaient réunis jusqu’à vendredi à Saint-Jean de Terre-Neuve, la fondation écologiste David Suzuki les a exhortés à « faire preuve de leadership en faisant la transition vers les énergies propres et renouvelables ».

« Les fuites d’oléoducs comme celle-ci nous rappellent qu’on ne peut pas s’attaquer au réchauffement climatique et permettre en même temps la croissance des énergies fossiles », a estimé la Fondation Suzuki.


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