La détresse des infirmières

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Barrette subit les conséquences de sa réforme

Le nombre d’agents de bord dans un avion n’est pas tiré au sort ou fixé par un chef de service. La loi sur les transports impose des ratios agents-passagers. Un agent de moins que le minimum requis, et l’avion reste cloué au sol.


Ce n’est pas pour vous servir votre gin tonic plus rapidement, mais pour sauver un maximum de vies en cas d’accident. Loin d’être des « waitress glorifiées », ces personnes-là sont formées pour sortir des humains d’un avion en feu.


Puissiez-vous ne jamais en faire l’expérience.


Pourrait-on alors m’expliquer pourquoi la même rigueur n’est pas appliquée pour déterminer le nombre d’infirmières requis dans chaque établissement de santé en tout temps ?


Après tout, c’est aussi une question de vie ou de mort.


On ne va pas fermer l’hôpital ou le CHSLD si le compte d’infirmières n’y est pas — d’où l’usage intempestif du temps supplémentaire obligatoire —, mais à l’ère des ordinateurs, des algorithmes et autres bidules censés tout simplifier, comment se fait-il qu’une infirmière se retrouve seule avec 70 patients la nuit, sans que tous les voyants passent au rouge ? Et qu’elle soit obligée de se vider le cœur sur Facebook pour que quelqu’un allume à Québec ?


Mystère.


Gouvernement dépassé ?


Et pas seulement pour moi : le premier ministre lui-même a demandé aux infirmières de lui dire ce que le gouvernement pourrait faire de plus. C’est bien une des rares fois où un docteur descend de son Olympe pour demander conseil aux infirmières.


Par contre, le ministre Barrette, fidèle à lui-même, ne s’est pas gêné pour les accuser de ternir l’image du réseau en portant leurs revendications sur la place publique. Ce serait leur faute si leurs consœurs et confrères tournent le dos aux postes à temps plein.


Euh... et si c’était plutôt parce que son réseau hypercentralisé ne fonctionnait pas comme il l’a imaginé dans sa tête d’autocrate brillant — ça, il l’est —, mais qui semble incapable d’admettre qu’il n’a pas raison en tout ?


Comme le jour succède à la nuit, en gestion, les périodes de centralisation succèdent aux périodes de décentralisation, ad infinitum. Les deux ont leurs vertus. Mais si la centralisation favorise, en théorie, un meilleur contrôle des opérations et des coûts, elle complexifie tout sur son passage. Elle déshumanise. Dix hôpitaux à gérer, ce sera toujours plus compliqué qu’un seul.


Réunionite aiguë


J’entendais une infirmière cette semaine dire : « Avant, les responsables des horaires étaient dans l’hôpital. On les voyait sur les étages. Ils savaient tout ce qui se passait et pouvaient réagir rapidement. Maintenant, on ne les voit plus, ils sont en réunion perpétuelle au CIUSSS. »


De la cacophonie que fut la semaine, cela m’a semblé l’analyse la plus sensée. Plus c’est gros, plus c’est lourd. Et plus c’est lourd, plus c’est difficile à bouger.


Mais « spagrave », les infirmières, les auxiliaires et les préposés vont vous tenir tout cela à bout de bras, même quand elles sont à bout de souffle, et à coût nul.


Même pas besoin de leur verser une prime-écœurantite !