HYDRO-QUÉBEC

La culture du confort

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Hydro-Québec : une nomination qui ne convainc pas

L’arrivée d’un nouveau p.-d.g. à la tête d’Hydro-Québec devrait susciter l’enthousiasme après des années de gestion en vase clos faite de secrets et de demi-vérités. Pourtant, cette nomination ne convainc pas, tant il y a à faire pour changer la culture du confort qui engourdit le dinosaure.
Dès ses premiers pas à la direction d’Hydro-Québec, le nouveau président, Éric Martel, percevra la différence entre une société privée continuellement secouée par les vents de la concurrence et un monopole d’État partagé entre les attentes du politique, la résistance syndicale et l’insatisfaction du public.

Dans le secteur privé, chez Bombardier par exemple, d’où nous arrive M. Martel, le rendement optimal impose la fabrication d’un produit parfait doublé d’un service à la clientèle irréprochable. Les coûts de production étant le nerf de la guerre, chaque négociation avec les fournisseurs et les syndicats devient cruciale.

À Hydro-Québec, c’est différent : pour un monopole, les coûts importent moins que les revenus obtenus du régisseur public à coups de savantes démonstrations. Cela explique que décrocher un contrat de construction ou un emploi chez Hydro-Québec soit toujours synonyme de gagner à la loterie, et en contrepartie, que les tarifs soient toujours à la hausse, avec ou sans équilibre en l’offre et la demande pour le produit.

Sous la direction du précédent p.-d.g., Thierry Vandal, le patron allait jusqu’à offrir lui-même des augmentations salariales avantageuses à ses syndiqués une année avant la fin du contrat de travail. Au journaliste curieux de comprendre comment des offres qu’on disait similaires à celles de la fonction publique avaient pu être acceptées si facilement, on cachait l’existence des généreuses « primes du président », qui doublaient la valeur du règlement. Acheter la paix et refiler les coûts aux consommateurs via la Régie de l’énergie, telle était l’approche d’Hydro-Québec.

En conséquence, du simple réceptionniste au p.-d.g. en passant par les techniciens et les ingénieurs, tous les employés d’Hydro-Québec sont aujourd’hui mieux payés que leurs homologues et, surtout, tous peuvent partir pour la retraite à un âge où un individu normal arrive au faîte de ses compétences professionnelles… y compris son p.-d.g. Ce faisant, l’entreprise se prive d’une bonne douzaine d’années de travail productif d’une main-d’oeuvre qualifiée qu’elle a formée à fort prix. L’inverse de la tendance devenue la norme.

Comment imaginer que les choses puissent changer quand les syndiqués, les cadres et les hauts dirigeants sont solidairement convaincus de la légitimité de leurs privilèges ?


En acceptant le poste de p.-d.g., Éric Martel a promis des gains de productivité, nous verrons ce qu’il peut faire. Il a aussi promis plus de transparence et des améliorations au service à la clientèle, des engagements à retenir, puisqu’Hydro-Québec est reconnue pour son opacité, même aux yeux du vérificateur général.

Quant au service à la clientèle, malgré des moyens considérables, il laisse encore à désirer dans un monde où les autres services publics ont fait beaucoup de progrès grâce à la concurrence. À titre d’exemple, si vous avez un problème de facturation, Hydro vous invite à lui écrire par l’intermédiaire de son site Web au lieu de téléphoner. Expérience faite, il a fallu attendre deux jours pour obtenir par courriel une réponse vague de la part d’un préposé anonyme, alors qu’un simple coup de fil subséquent a permis de corriger une erreur commise lors du relevé d’un compteur pourtant très intelligent.

Il y a tellement à faire pour redorer le blason terni par des erreurs stratégiques aussi importantes que la construction d’une usine thermique jamais utilisée et le retour des minicentrales.

Le nouveau président veut trouver le moyen d’exporter davantage ? Pourquoi pas, pourvu qu’on ne brade pas cette électricité pour le plaisir de brasser des affaires avant d’en refiler la facture aux consommateurs, comme c’est le cas pour l’éolien ?

Certes, plusieurs de ces décisions relèvent du gouvernement et non du président. Celui-ci devra donc apprendre à mieux gérer l’entreprise tout en composant avec les caprices d’un actionnaire interventionniste dont les priorités fluctuent au gré de l’opinion publique, des intérêts privés et des échéances électorales.

Le gouvernement publiera bientôt la dernière mouture de sa politique énergétique. Au chapitre de l’électricité, il faut s’attendre à ce qu’il poursuive sur la voie discutable qu’il a lui-même tracée. Nouveau président ou pas, c’est donc sur le plan des décisions politiques que se pose le vrai défi des prochaines années.


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