La crise, l’Irlande et l’indépendance

Ce n'est pas parce que l'indépendance est insuffisante qu'elle n'est pas nécessaire - Pratte enfonce des portes ouvertes, et avec quelle naïveté encore...


Des chômeurs à Limerick, Irlande. Photo AFP

Le miracle économique irlandais a souvent été cité par les leaders indépendantistes québécois pour démontrer qu’un petit pays indépendant est mieux à même de se développer qu’une province.
L’ancien haut fonctionnaire Louis Bernard, alors qu’il était candidat à la chefferie du Parti québécois, a écrit: «Nous serons pleinement responsables de ce qui nous arrive, de nos succès comme de nos échecs. Ce changement aura des répercussions psychologiques considérables : il faut voir l’importance qu’a, dans tous les pays, la fierté nationale. Ceux qui pourraient en douter n’ont qu’à se référer au cas de l’Irlande, pays de quatre millions d’habitants, qui, en quelques années, est passé de la position de queue à la position de tête des pays d’Europe.»
Dans son échange de correspondance avec moi (Qui a raison?, Boréal, 2008), l’ancien ministre péquiste Joseph Facal a tenu des propos similaires. Bernard Landry de même.
La thèse des avantages économiques de l’indépendance a été reprise il y a quelques semaines par Pauline Marois, selon qui un Québec indépendant aurait été mieux à même de résister à la récession actuelle. Le président du PQ, Jonathan Valois, a renchéri en disant qu’un Québec devenu pays “serait mieux outillé” pour affronter la crise parce qu’il aurait “vraiment deux mains sur le volant, et non pas une autre paire de mains qui vient d’Ottawa”.
Voyons donc ce qui se passe en Irlande ces temps-ci. Il est vrai que le pays a connu au cours des années 1990 une croissance foudroyante. Cela lui a valu le titre de «tigre celtique». Il est un peu étrange qu’on ait vu là l’effet de l’indépendance politique, l’Irlande étant un pays indépendant non pas depuis 1980 ou 1990, mais depuis 1921.
Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, l’Irlande est plongée dans la pire récession de tout l’Occident. Le taux de chômage, qui avait diminué jusqu’à 4,6% en 2007, a explosé à 11,9%. Selon une firme locale, l’Economic and Social Research Institute, le chômage devrait atteindre 16,1% l’an prochain. En l’espace d’à peine deux ans, le tigre est devenu tortue.
Les économistes avancent toutes sortes d’explications pour la gravité de la récession irlandaise, je ne m’étendrai pas là-dessus. Ce qui arrive en Irlande démontre, en tout cas, que l’indépendance politique ne mène pas à la prospérité économique, contrairement à ce que prétendent ou laissent entendre les souverainistes.
Pendant que l’Irlande s’enfonce, la province de Québec est parmi les régions du monde qui s’en tirent le mieux. Ce n’est évidemment pas grâce au fédéralisme. Le fédéralisme ne garantit pas la prospérité plus que l’indépendance (voir les États-Unis!). Mais il y a quelque chose dans la recette canadienne qui, de façon générale, assure aux Canadiens une prospérité enviable. Cette recette est faite de ressources naturelles abondantes et diverses, d’un système bancaire conservateur et donc solide, d’un généreux système de péréquation, etc.
À cela, les indépendantistes répondront qu’un Québec souverain serait capable de faire encore mieux. Mais ils ne peuvent d’aucune façon le démontrer, encore moins le garantir. Et avec l’effondrement de l’économie irlandaise s’écroule un des fragiles fondements de leur argumentaire économique.
Mise à jour 9h AM
Deux remarques suscitées par les commentaires des participants à ce blogue:
1) J’aimerais quand même signaler à ceux qui me reprochent de prendre l’exemple irlandais que ce n’est pas moi qui l’ai fait, mais les Louis Bernard, Joseph Facal et Bernard Landry. Je ne fais que montrer que l’exemple qu’EUX ont choisi ne démontre en rien l’utilité de l’indépendance en matière économique.
2) On me reproche d’être obsédé par la souveraineté. Je promets que si le Parti québécois et le Bloc québécois cessent de parler d’indépendance, j’arrêterai à mon tour.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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