La CAQ, comme une odeur de pouvoir !

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Houda-Pepin appelle Legault à être encore plus soumis au fédéralisme canadien

Les astres s’alignent pour la prochaine campagne électorale avec la tenue, la fin de semaine dernière, du congrès de la CAQ, à Lévis, et du Conseil national du PQ, à Drummondville. Le Parti libéral tiendra son conseil général, samedi prochain, 2 juin, à Montréal. Autant d’occasions pour mobiliser les troupes pour la dernière ligne droite.


Au congrès de la CAQ, il y avait comme une odeur de pouvoir. Les militants étaient enthousiastes, les organisateurs confiants et le chef, François Legault, a fait une entrée triomphale, avant de livrer un discours galvanisant.


Mais c’est en parlant aux militants de la base qu’on réalise que la CAQ est une coalition circonstancielle. Un amalgame de souverainistes, de fédéralistes et d’orphelins politiques, déçus du cul-de-sac dans lequel se trouve le Québec, mais qui veulent passer à autre chose.


C’est comme si les clivages traditionnels souverainistes-fédéralistes qui se sont affrontés, depuis quatre décennies, au sein de deux partis adverses – le PQ et le PLQ – ont finalement décidé de loger, de façon pragmatique, à la même enseigne.


Il se dégage de ces militants dépareillés une sorte de sérénité qui tranche avec le défaitisme ambiant. Tous ne sont pas au même diapason pour ce qui est des idées véhiculées par la CAQ, mais on sent chez eux une exaspération quasi allergique à l’égard de la classe politique, en général, et du PLQ, en particulier.


La CAQ et le défi de cohésion


Ils ne sont pas les seuls. La donnée n’est pas nouvelle, mais elle a été confirmée par le dernier sondage Ipsos qui indique que le niveau de confiance des Québécois à l’égard des politiciens est dramatiquement bas (18 %). Les partis politiques n’en mènent pas large non plus. Les citoyens souhaitent à 81 % leur administrer une transformation radicale. (La Presse, 27 mai 2018)


À ma grande surprise, j’ai été accueillie sur le plancher du congrès, à Lévis, par plusieurs militants libéraux, dont des Québécois issus de l’immigration qui ont viré caquistes.


Pour les souverainistes que j’y ai rencontrés, ils aspirent, de leur côté, à ce que le Québec retrouve son leadership au sein du Canada si la CAQ forme le gouvernement et qu’il parvienne à obtenir plus d’autonomie et plus de pouvoirs.


Mais au-delà de l’arrogance du tandem Couillard-Barrette qui les rebute tous, ces militants aux antécédents politiques divers sont soudés par une réelle volonté de changement et pensent que la CAQ est ce véhicule par lequel il adviendra.


Par contre, au sommet de la pyramide, les cercles d’influence qui gravitent autour de M. Legault, notamment les personnes clés de son entourage et les membres de son comité de transition, ceux et celles qui s’activent à définir les contours d’un éventuel gouvernement caquiste, sont issus essentiellement du sérail souverainiste et donc moins représentatifs des tendances de leur base.


Ce déséquilibre commence déjà à produire ses effets. Des libéraux influents qui avaient applaudi, au début, la volonté de changement commencent à se refroidir.


M. Legault qui sait que la politique est aussi une affaire de perception doit corriger le tir en intégrant dans ses équipes décisionnelles, dès à présent, des éléments compétents, à des postes de responsabilité, sans égard à leur couleur politique.


Un parti qui se définit comme une coalition doit, à compétence égale, refléter ses différentes sensibilités politiques dans l’ensemble de ses structures, y compris au sommet de l’État s’il forme le gouvernement.


Autrement, l’image de cryptoséparatiste que les adversaires de M. Legault cherchent à lui coller va se renforcer et il subsistera toujours un doute sur sa sincérité à vouloir vraiment bâtir un Québec fort dans un Canada uni.


Cet équilibre est d’autant plus névralgique que si la CAQ remporte l’élection, une fois passée l’euphorie du changement, elle sera confrontée à la réalité de l’exercice du pouvoir et devra impérativement cimenter les différents courants qui la traversent. Il en va de sa crédibilité, de sa cohésion et de sa pérennité.