Le Parti québécois revient de loin en matière d’immigration. Longtemps défini par ses adversaires comme un parti xénophobe, la Charte des valeurs n’a rien fait pour le débarrasser de cette étiquette, encore aujourd’hui, chez plusieurs communautés culturelles du Québec et du Canada.
L’homme du rapprochement
Il faut reconnaître, cependant, que depuis son arrivée à la tête du PQ Jean-François Lisée a pris le virage du rapprochement. Ses efforts sont tangibles tant dans le discours que dans les gestes concrets qu’il pose, notamment celui de tendre la main aux Québécois issus de l’immigration et aux Anglo-Québécois.
Le 22 mai dernier, il a rendu public ce qu’il a appelé la « réflexion la plus complète jamais proposée en matière d’immigration et d’intégration ».
Elle s’inscrit dans cette nouvelle dynamique qu’il essaie d’instaurer entre le PQ et les Québécois non francophones. C’est une très bonne chose. Tous les partis doivent manifester de l’ouverture face au pluralisme de notre société, même si cette approche ne se traduit pas en termes de votes, à brève ou moyenne échéance.
Globalement, le cadre de référence dans lequel s’inscrivent les plateformes des partis politiques du Québec a été défini, il y a une trentaine d’années, par le gouvernement de Robert Bourassa, dans l’énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration.
L’immigration devait alors permettre au Québec de relever quatre défis : 1. Le redressement démographique, 2. La prospérité économique, 3. La pérennité du fait français et 4. L’ouverture sur le monde.
Ainsi, la CAQ comme le PQ expriment les mêmes préoccupations quant à la francisation des immigrants, leur adhésion aux valeurs québécoises, leur intégration au marché et le souci de les envoyer en régions, mais avec des variantes plus ou moins significatives quant à leurs modalités d’application. Une des propositions du PQ a retenu mon attention.
La régionalisation, tout un défi
L’une des idées ambitieuses de M. Lisée porte sur la régionalisation de l’immigration, dont il fixe l’objectif à 25 % sur quatre ans. Comment est-il arrivé à ce chiffre ? Aucune évaluation ni étude ne le soutiennent pour le moment.
Par contre, l’expérience terrain nous indique que c’est tout un défi. Il s’agit d’une question majeure qui n’a jamais été sérieusement étudiée dans ses dimensions économiques, culturelles et sociales.
Par exemple, outre pour l’emploi, pourquoi les immigrants au Québec, au Canada et dans le monde occidental se concentrent-ils dans les grands centres urbains ?
Au Québec, nous n’avons pas beaucoup de centres urbains qui offrent toute l’infrastructure nécessaire pouvant attirer et retenir les nouveaux arrivants, et les régions éloignées ne sont pas équipées pour répondre à leurs besoins, à long terme.
Selon les données de 2016, le Québec ne comptait que cinq Régions métropolitaines de recensement (RMR) pouvant attirer les immigrants, celle de Montréal, avec 4 millions d’habitants, celle de Québec-Lévis (plus de 800 000) ainsi que trois RMR de moins de 200 000 habitants : Sherbrooke-Magog (200 000), Saguenay (161 000) et Trois-Rivières (151 000).
L’Ontario, avec ses 17 RMR de 100 000 habitants et plus, dont Toronto (6 millions) est de loin mieux outillée pour disperser ses immigrants sur différents sites métropolitains en leur offrant une structure industrielle diversifiée et des infrastructures de santé et d’éducation capables de répondre à leurs besoins.
Il y a quatre jours, Fred Pellerin lançait un cri d’alarme au sujet de la dévitalisation des régions éloignées du Québec qui ont vu leur population diminuer de 7 % ces dernières années (Journal, 23 mai 2018).
Quel est le parti politique qui va s’engager dans une véritable réflexion d’avenir où la régionalisation de l’immigration serait l’une des avenues de solution ?