Après huit années durant lesquelles le premier ministre, Guy Verhofstadt, sera parvenu à calmer les tensions entre Flamands et francophones, les forces de la désunion sont à nouveau à l'oeuvre en Belgique. Yves Leterme, leader des Chrétiens démocrates et ancien président de la région flamande, conforté par sa popularité, qu'il attribue à son radicalisme dans le domaine institutionnel, espérait convaincre les deux partis francophones avec lesquels il négociait de la nécessité d'un nouvel approfondissement du fédéralisme. Oubliant que le formateur d'un gouvernement belge doit, avant tout, être un arbitre, M. Leterme a tenté d'imposer un programme destiné à accroître l'autonomie des régions. Ce catalogue comprenait aussi bien la "régionalisation" du code de la route que celle d'une partie de la sécurité sociale et de la politique de l'emploi, voire de la justice. La Flandre entend aussi statuer seule sur l'acquisition de la nationalité.
Trop entêté, M. Leterme a échoué. Pour les partis francophones, le programme flamand augure, au mieux, de la naissance d'une confédération, au pire, d'une séparation de la Flandre et de la Wallonie. Les francophones, qui ne formulaient, pour une fois, aucune revendication financière, ont jusqu'au bout refusé le débat institutionnel.
Après deux mois et demi de crise, voici donc le royaume sans autre perspective que l'hypothétique reprise d'une négociation ou un coup de force des partis flamands. Travaillés par l'extrême droite, qui depuis quinze ans pèse sur l'évolution de leur région, certains hommes politiques n'hésitent plus à envisager la proclamation de l'autonomie de la Flandre.
Pour l'heure, il semble encore possible d'en revenir aux traditions belges de la négociation et du compromis. Les responsables des grandes formations savent que la séparation n'est pas désirée par une majorité de la population, même en Flandre. Enfin, les difficultés pratiques qu'occasionnerait une telle évolution sont nombreuses et feront réfléchir les partisans d'un divorce à la tchécoslovaque. Au coeur de la discussion, il y aurait, notamment, le sort de Bruxelles, capitale fédérale, européenne... et flamande, puisque, contrairement aux francophones, la Flandre en a fait son centre et sa vitrine.
Riche et déjà dotée de pouvoirs étendus, la Flandre laissera-t-elle oeuvrer jusqu'à leur victoire ultime les forces qui la travaillent depuis plusieurs générations ? L'absence, dans la jeune génération politique belge, de leaders susceptibles de convaincre les deux communautés incite à répondre oui. L'histoire récente et le talent des Belges à trouver, in fine, des solutions originales conduisent à formuler un jugement opposé. Mais, en tout état de cause, le royaume d'Albert II aborde une épreuve décisive.
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