L'israélisation de la question nationale et les retours d'ascenseur

Vigile

Vigile a dû - et devra encore- se défendre contre des attaques l'ayant qualifié de site antisémite. Et constatant la gravité des dommages, et à juste titre, certains se sont interrogés sur la pertinence et sur la justesse d'une prise de position du mouvement souverainiste par rapport à la question israélo-palestinienne. Autrement dit, la question israélo-palestinienne divise, polarise. En s'y intéressant, les souverainistes ne peuvent qu'y perdre des plumes, n'est-ce pas? C'est pour répondre à une telle question que je vous livre quelques extraits d'un éditorial de Ha'Aretz (ou Haaretz), mais d'abord, il faut définir ce journal et surtout expliquer quelques notions historiques :
« Haaretz (en hébreu : הארץ, Le Pays) est l'un des quatre plus grands quotidiens nationaux en Israël. [...] Haaretz est le flambeau de la gauche israélienne. Ce positionnement politique très clair [fait] qu'il est souvent comparé à tort ou à raison à des journaux comme le quotidien français Le Monde, ou le International Herald Tribune. Mais il est surtout le journal de la bourgeoisie libérale, représentatif des élites postsionistes israéliennes. Haaretz s'est également porté à la pointe des combats en faveur du retrait des Territoires occupés, ainsi que de la défense des droits des Palestiniens. Il a été l'un des plus fervents supporters des accords d'Oslo.
Fortement anticlérical, il n'hésite pas à poser les problèmes religieux en termes de problèmes sociétaux, contribuant au clivage religieux / non-religieux.
» (Wikipédia)
Le Postsionisme
Postsioniste? Postsionisme, c'est quoi ça? Il s'agit d'une doctrine, d'une vision ou d'une critique qu'ont élaborée ceux que l'on a appelés «les nouveaux historiens israéliens», ces historiens interprètent l'histoire en montrant que lors de sa fondation : « l’État juif nouveau-né mena une bataille désespérée, héroïque et finalement victorieuse contre des forces d’une supériorité écrasante. Au cours de la guerre, des centaines de milliers de Palestiniens se réfugièrent dans les États arabes voisins, principalement sur ordre de leurs dirigeants et dans l’attente d’un retour triomphal. Après les hostilités, poursuit cette histoire, les dirigeants israéliens cherchèrent la paix de toutes leurs forces, mais ne trouvèrent aucun interlocuteur en face d’eux. »
Les nouveaux historiens, eux, soutiennent plutôt, à l'aide de recherches dans des archives déclassifiées « que l’expulsion des Arabes de Palestine en 1948-1949 a été conduite sciemment par les dirigeants sionistes, au premier rang desquels David Ben Gourion.
Celui-ci refuse de s’en tenir aux frontières prévues par le plan de partage voté par l’ONU en novembre 1947. Il juge que le futur État juif doit compter au moins 80 % de population juive. Il envisage comme une potentielle cinquième colonne toute population arabe qui resterait à l’intérieur de son territoire. Il veut faire place nette pour permettre une colonisation rapide par les centaines de milliers de juifs rescapés de la Shoah.
»
(source : http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2336213&rubId=786)
Sommairement, le postsionisme est une perspective historique qui montre que dès la fondation d'Israël, l'État hébreu était assez fort pour se défendre et que l'idéologie sioniste, selon laquelle une menace pèse sur Israël et que ce dernier doit mener une politique défensive « agressive » pour y faire face, est entretenue de manière à conserver le rôle de l'armée dans la maitrise de la politique et de manière à favoriser l'expansion d'Israël et de ses colonies.
Les militaires ont un grand intérêt à voir la population divisée et polarisée, car la radicalisation permet aux religieux d'avoir un poids politique suffisant pour faire avancer le plan du « Eretz Israel », du grand Israël, l'État de la Terre promise. Vous aurez compris que cette politique de colonisation dans les Territoires occupés alimente la hargne palestinienne et les injustices, lesquelles favorisent la violence le terrorisme et les agressions. Agression contre laquelle heureusement Tsahal (l'armée) se dresse fièrement, protégeant ainsi la population civile israélienne. Comme les conflits dans les territoires occupés sont visibles et constants, l'armée est légitimée et accroit son pouvoir politique et civil. C'est ainsi que se perpétue le cercle vicieux de la violence et de la peur, lesquelles nourrissent littéralement la division de la société israélienne, la radicalisation et la militarisation.
Et le Québec?
Ce sionisme, c'est-à-dire non pas la légitimation de l'État d'Israël, mais bien de l'accroissement de ce dernier aux dépens des Territoires occupés et des Palestiniens rencontre de la résistance et c'est normal : il s'agit à la fois d'une forme de colonisation (le mot même le dit), d'une forme de violence, mais aussi de la consolidation d'une situation qui fait bouillir certains citoyens israéliens, la théocratisation de la société. En effet, les ultrareligieux jouissent d'un poids politique important, et l'on ne sait pas même plus s'ils se font instrumentaliser par l'État ou si ce sont eux qui manipulent l'État. Le résultat est le même : le statut religieux « juif » a une valeur civique que n'ont pas les autres citoyens israéliens. Différentes lois, liées d'ailleurs aux guerres qu'a connues Israël rendent explicite cette différence entre les citoyens juifs et les autres. Par exemple, il faut avoir été réserviste pour jouir de certains droits , mais les Israéliens arabes ne peuvent aussi facilement que les Juifs être réservistes, alors que les ultrareligieux n'ont qu'à fréquenter des écoles talmudiques et faire un service militaire «théocratique».
Israël a besoin de l'appui de ses alliés et les Canadiens font partie du nombre. Par exemple, on apprenait que le Canada représentait Israël au Vénézuéla. Toutefois, la colonisation à travers la défense du projet sioniste et la théocratisation de la société contreviennent aux valeurs démocratiques de bien des citoyens en Occident. Ainsi, tant que nos gouvernements collaborent avec Israël en fermant les yeux sur ses excès, il est normal que nous soyons mécontents. Il s'agit de politique étrangère, mais la politique étrangère, si on n'est démocrate, devrait faire l'objet d'un certain consensus, sinon, cela devient un conflit de politique intérieure et c'est exactement ce à quoi nous faisons face dans le traitement de la question israélo-palestinienne dans le combat politique pour la souveraineté.
En somme, les militants et penseurs de Vigile agissent comme si le Québec était indépendant et qu'il fallait débattre de la politique étrangère. C'est là une question importante puisque si l'on veut devenir indépendant, c'est bien parce que l'on juge que notre voix mérite d'être entendue dans les forums internationaux et surtout, que nous devons agir par nous-mêmes, en découvrant les subtilités des relations internationales. L'important n'est peut-être pas la conclusion qui va fixer la politique étrangère, MAIS LES MODALITÉS DÉMOCRATIQUES DU DÉBAT. Nous, indépendantistes, sommes des démocrates, nous croyons que nous devons être maitres chez nous et que nous soyons de gauche ou de droite, nous croyons que les citoyens québécois sont assez matures pour se gouverner eux-mêmes, plutôt qu'être continuellement remplacés par Ottawa ou aliénés par les forces fédéralistes provinciales qui nous enfoncent dans la dépendance et la fange de la corruption qu'elles entretiennent pour se maintenir.
Comme je l'ai expliqué plus haut, les radicaux au pouvoir en Israël, radicaux regroupant le tandem religieux/armée, ont besoin du soutien de leurs alliés et ce soutien doit être le plus inconditionnel possible. Voilà pourquoi il existe des lobbys qui s'assurent d'influencer suffisamment les élus pour que sur le plan international, Israël ait les mains libres et les coudées franches. Le soutien du gouvernement Harper à l'opération «Plomb durci» est un bon exemple du type d'aide dont Israël a besoin. Est-ce être antisioniste ou même antisémite que de s'opposer non seulement à une telle opération, mais aux structures qui l'ont rendue possible?
Non, c'est simplement être «postsioniste». Ça ne veut pas dire que l'on est critique de «l'existence d'Israël», mais de certaines de ses politiques. Le peuple québécois est démocrate et l'influence des lobbys pro-israéliens ne permet pas une critique libre, un débat transparent ou encore l’exercice de la liberté d'expression sur le sujet. La moindre incartade servira d'excuse pour amalgamer et taxer tout débat vigoureux d'antisémite. Les lobbys ont donc de très bonnes raisons de craindre qu'un Québec indépendant ne soit pas acquis au sionisme, mais que notre position soit certainement POSTSIONISTE, c'est-à-dire que nous ne remettrions nullement en question la légitimité de l'État d'Israël, mais bien sa stratégie de colonisation et de victimisation. Nous avons beaucoup de Juifs sur notre territoire et nous n'aurions aucun mal à en trouver qui puissent exprimer une réserve polie à l'égard de la politique étrangère israélienne et considérer qu'Israël fait fausse route de considérer comme de la politique intérieure, ce qui d'après nous est une grave entrave à la paix : son comportement voyou.
La force démocratique du mouvement indépendantiste est perçue à juste titre comme une menace pour les lobbys pro-israéliens, car nous savons être critiques et surtout, les Québécois ayant été exclus du commerce et ayant su bâtir leurs propres réseaux, nos intérêts économiques sont également moins liés à ceux des lobbys; nous saurions donc être véritablement indépendants. En tapant sur les souverainistes, les lobbys pro-israéliens ne font pas que les discréditer, ils accroissent en même temps leur propre influence et montrent leur utilité aux fédéralistes, lesquels ont l'habitude de retourner l'ascenseur. Cela nuit d'ailleurs à l'indépendance du Canada et du Québec : les fédéralistes sont maintenant obligés de s'allier aux lobbys israéliens pour bénéficier de leur force dans la bataille contre les indépendantistes et c'est donc à juste titre que nous pouvons prétendre que la question israélo-palestinienne est une question de politique intérieure; si nous étions indépendants, nous aurions la possibilité de jouer un rôle, aussi ténu soit-il, alors que dans la situation actuelle, nous sommes victimes de la contingence. En effet, un problème au Proche-Orient peut radicaliser des acteurs politiques canadiens et par là, nous influencer.
Nous avons donc raison de débattre de cette question.
Maintenant, les citations tant attendues de Harretz :
« Les colonies sont comme la centrale nucléaire de Fukushima : un projet grandiose et ambitieux bâti au mauvais endroit et sur la base de considérations erronées. Les constructeurs de la centrale japonaise n'ont pas tenu compte que la terre pourrait trembler et enregistrer un séisme de magnitude 9 sur l'échelle de Richter. Et les bâtisseurs d'implantations n'en ont pas davantage tenu compte. Seulement, là-bas comme ici, la terre a tremblé. Le tsunami a déferlé. La centrale de Fukushima est devenue un pur cauchemar et notre projet colonial aussi.
Ce ne sont pas les colonies qui sont la cause du conflit israélo-palestinien, et ce n'est pas l'arrêt de la colonisation qui mettra fin au conflit. Néanmoins, les implantations alimentent l'escalade de ce conflit et la poursuite de la construction dans les implantations risque de mener Israël à sa perte. Alors la colonisation doit être arrêtée, pas seulement pour la paix, mais pour notre sécurité nationale. Pour garantir l'avenir d'Israël et sauver le sionisme.
[...] Si les colons ont gagné la bataille sur le terrain, ils ont perdu la bataille devant l'opinion mondiale. Pour cette raison, les implantations sont du mauvais côté de la légitimité internationale. Et elles sont en passe de placer Israël tout entier du côté de cette barrière de cette légitimité internationale. Le nuage radioactif d'illégitimité qui se dégage des implantations est en train de se diriger vers Israël et de menacer son existence.
Lorsque la centrale de Fukushima fut construite dans les années 1970, on pouvait encore espérer qu'elle résisterait à n'importe quel séisme et à n'importe quel raz de marée. De même, lorsque les implantations ont commencé dans les années 1970 et 1980, on pouvait croire qu'elles résisteraient à n'importe quelle tempête politique. Aujourd'hui, il est clair que ces deux espoirs se sont envolés. Les conceptions de Tepco [l'opérateur qui gère Fukushima] et celles de Goush Emounim [ " Bloc de la foi", mouvement nationaliste religieux et fer de lance de la colonisation en Cisjordanie] étaient faussées dès le début. Après ce qui vient de se passer, il est impensable que les Japonais puissent encore installer un septième voire un huitième réacteur sur leurs côtes. Tout comme il devrait être impensable qu'après les événements de ces vingt dernières années, les Israéliens puissent encore implanter de nouvelles colonies sur les collines [de Cisjordanie]. L'avenir nous regarde en face : un projet titanesque lancé il y a plus de quarante ans est en train de mettre en péril le pays qui l'a conçu. Les radiations qui en émanent sont mortelles. Trêve de communiqués, les gars! Il est plus que temps de refroidir nos implantations, de les éteindre et de chercher des sources d'énergie alternatives. Il est temps de rentrer chez nous.
»
(Source : SHAVIT, Ari. «Les colonies sont notre Fukushima», Ha'Aretz, traduction : Courrier international, #1064, p.12)
La grande majorité des contributeurs de Vigile ne dit pas autre chose qu'un éditorialiste du troisième plus grand quotidien israélien. Pourquoi les uns seraient-ils antisémites et pas l'autre? Qu'attendent les libéraux et les lobbys israéliens pour condamner sur l'heure Ari Shavit? Étant, comme les Palestiniens, les arabes et les Israéliens modérés, victimes du fanatisme des adhérents du « Goush Emounim » et du « Eretz Israel », les indépendantistes ont raison d'Israéliser la question nationale : les fanatiques israéliens du Canada ont instrumentalisé cette question avant nous. Est-ce notre faute s'ils ont choisi un camp qui milite d'une manière si contraire à notre pérennité? Ils reçoivent ici même les dommages collatéraux « radioactifs » de l'implantation dont parle Shavit? Puis-je leur rappeler notre devise sans que l'on me taxe d'antisémite, et ce, afin simplement de leur rappeler que nous participerons un jour aux relations internationales?
L'engagé


Laissez un commentaire



9 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    29 mars 2011

    Monsieur Drouin,
    Envers votre remarque : « Ce n’est pas moi qui mets des guillemets à réfugié, mais le nouvel historien Benny Morris ! » Je vous remercie de la précision. J'avais mal lu...
    André Meloche

  • Stéphane Russell Répondre

    27 mars 2011

    Prendre position dans la question israélienne, c'est ouvrir une boîte de pandorre. Notre mouvement indépendantiste aime bien les boîtes de pandorre. Elle a déjà choisie de s'allier à la gauche sur un continent de droite, parfois elle a même fricotté avec le communisme. Elle a maintenant choisie de s'allier à la cause palestino-arabe sur un continent sympatique à Israël. Déjà qu'on doit se battre pour la survie d'une terre francophone dans une Amérique anglophone. On est optimiste rare! Ou carrément fous à lier...
    Après, on se surprendra si l'indépendance du Québec n'arrive pas à prendre son envol.
    On est crue à l'endroit d'Israël, parfois avec raison. Mais on ferme facilement les yeux devant les tristes opérations de propagande anti-juifs qui ont court dans le monde arabe. Même que certains les justifient! Si on se donnait la peine de lire la charte du Hamas avant de prendre position, on verrait à qui on cherche à donner notre appui.
    C'est une guerre d'extrémisme religieux qui a cours là-bas, et à un second niveau, une lutte entre deux puissances, celles de l'occident contre celle du Moyen-Orient. On est pour qui au juste? Les oligarques de l'occident ou les intégristes musulmans??? Mais éclairez donc ma lanterne!
    Pour la Palestine? C'est prendre position contre des crimes désolants, certes. Mais aussi, c'est prendre position pour le nettoyage ethnique du Moyen-Orient de tout juif. Ensuite, ça sera le tour de tout ce qui n'est pas musulman, mais sur le globe entier. Aussi, il faut réaliser que si les palestiniens sont minoritaires en Israël, ils sont comme arabo-musulmans une majorité écransante au Moyen-Orient, où ils ont déjà absorbés (assimilés) plusieurs civilisations, certaines autrefois puissantes et d'autres avec des racines juives et chrétiennes très florissantes, avec des méthodes parfois qui en dégoûteraient plus d'un. Si les québécois redoutons l'assimilation, les juifs d'Israël sont bien placés pour nous comprendre. Après l'holocauste, ils ont bien besoin de ça[sic]!
    Pour Israël? J'aime bien Israël. Je parle évidemment du pays et non de son gouvernement. Mais à cause des méthodes des plus orthodoxes de ce pays, il n'est pas évident le supporter sans se faire accuser de tous les crimes. De l'autre main, certains israélites croient que tous les non-juifs sont destinés à être exterminés (ce qui m'inclus donc). Ça refroidi quand même, un petit gros tantinet. Malgré tout, Israël est bien d'une démocratie en terre intégriste C'est-à-dire que toutes les tendances y sont représentées et comme ici, un parti politique doit en tenir compte s'il veut se faire élire. Chose qui peut surprendre, il s'y trouve un grand nombre de "juifs" qui sont athés ou froid à la religion juive, d'autres sont des modérés, d'autres même pro-palestine. D'autres deviennent musulmans ou chrétiens. Plusieurs craignent de voir quelqu'un se faire sauter sur la place publique, peur que ne manque cetainement pas d'exploiter leur gouvernement. Plusieurs juifs d'Israël sont plus que des colons, ce sont des fugitifs ou des descendants de fugitifs. Les juifs sont peut-être le peuple qui a été le plus persécuté au monde.
    Ironiquement, la situation d'Israël dans une mer arabo-musulmane ressemble parfois plus à celle du Québec qu'à celle de l'Amérique anglo-saxonne qui la protège. Son passé religieux, évidemment beaucoup plus ancien. 7 ou 8 millions établis sur un espace qui lui est majoritairement hostile, avec une minorité arabe qui est la majorité sur le continent. Le sionisme (populaire) est officiellement du nationalisme juif, souvent à tendance socialiste, comme au Québec. Mais oui, ils y a des extrémistes israélites et des intégristes juifs: c'est le Moyen-Orient! Mais il y en a aussi d'autres qui se font un devoir de braver les autorités et israélites et palestiniennes pour traverser les murs, aller soigner des palestiniens et établir un contact avec eux. Mais qui s'intéresse à ceux-là?
    Ironiquement, le fédéral, dénonce le "nazisme" (national-socialisme) du Québec et d'une autre main est très à l'aise avec celui d'Israël. En politique comme en affaires, tout est affaire d'intérêts, le bien et le mal y sont des perspectives monéyables, apprenons-le.
    Dans le doute, abstient-toi.
    Alors pourquoi aller prendre le risque de mêler tout ça à notre cause nationale? Prendre position sur ces questions, c'est offrir notre cause en pâture à une vaste partie d'échec qui ne nous concerne pas. Comme pour la Suisse, je prône la neutralité de notre mouvement et de notre futur pays.
    Pour Vigile, je réitère ma suggestion d'il y a longtemps de publier aussi des article de sources israélites modérées et pas seulement seulement celles provenant d'Al Jaazira. Il y a là aussi de grand journaux.

  • L'engagé Répondre

    27 mars 2011

    À Luc Drouin,
    Mon but était de présenter la notion de «postsionisme»
    effectivement tous les nouveaux historiens ne parlent pas d'une tous d'une même voix.
    Simha Flapan dans sa préface de «Les arabes et le sionisme» écrit :
    «Pour dissiper tout malentendu, je veux qu'il soit bien clair que ma croyance en la justification morale du sionisme n'est pas remise en cause par ma réévaluation critique du leadership sioniste. L'histoire du sionisme démontre à quel point l'urgence à créer une nouvelle société incarnant les valeurs universelles de démocratie et de justice sociale fut inhérente au mouvement sioniste et responsable de ses progrès dans des conditions défavorables. Aujourd'hui le problème d'Israël tient dans la désintégration de ces valeurs, due en grande partie à l'ivresse des succès militaires et à la croyance dans le fait que la supériorité militaire est un substitut à la paix. A moins que les valeurs libérales et progressistes du sionisme soient restaurées et les droits des Palestiniens à l'auto-détermination au sein d'un cadre de coexistence pacifique reconnus, la quête de paix d'Israël est vouée à l'échec. Je crois fermement que ces tendances deviendront ultimement la force décisive en Israël.» (sur wikipédia, je ne connais manifestement pas la question aussi bien que vous)
    Pouvons-nous dire la même chose au Québec et analyser l'actualité à l'aune de cette perspective? «La plupart» des nouveaux historiens permet d'affirmer qu'il y a une différence entre défendre un état légitime, parfois en attaquant, certes, et l'autre attitude, celle de considérer que si vous n'êtes pas résolument en train de préparer la guerre, «pour vous défendre», vous allez vous faire détruire.
    Attaquer pour se défendre, s'avancer dans le territoire ennemi pour prendre l'initiative dans le cadre d'un conflit, c'est différent que de bâtir des colonies dans ce même territoire, lequel devra alors de nouveau être défendu avec la même agressivité. Voilà le cercle vicieux. Le «postsionisme» prétend que cette vision est caduque, d'autant plus qu'Israël détient la bombe nucléaire.

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2011

    @M. Déry : vous êtes très insultant envers les haredim et vos amalgames sur eux sont inacceptables. Le mot Sheketz ne se trouve d'ailleurs nulle part dans Encyclopaedia Judaica (une encyclopédie en 22 volumes), ni dans son index de plus de 600 pages !
    Je vous laisse avec une pensée Haredim plus pertinente : "Aime ton prochain comme toi-même" (Lévitique 19,18)
    Anecdote: ma fille faisait de l'exercice dans un gymnase où se trouvait un haredi. Une personne a perdu connaissance. Une seule personne est venue à sa rescousse: le haredim. les autres sont demeurées figées. Ma fille a ensuite demandé à la personne secourue si elle était juive: "non", a-t-elle répondu.
    @M. Meloche: ce n'est pas moi qui mets des guillemets à réfugié, mais le nouvel historien Benny Morris!

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2011

    Monsieur Drouin,
    Vous écrivez « Je mets le mot "réfugié" entre guillemets parce que deux tiers d’entre eux furent déplacés d’une partie de la Palestine à une autre, et non de leur pays (ce qui est la définition habituelle d’un réfugié). (...) »…
    Il serait important d’ajouter que le résultat demeure le même, des populations « déplacées » ou « expulsées ». Que ce soit les leaders palestiniens ou israéliens qui en soient la cause ne change rien à l’affaire. Cette guerre est une guerre idéologique et prend des allures génocidaires. Nous sommes à l’ère du totalitarisme d’état. Hannah Arendt a longuement écrit sur le totalitarisme. Les repères identitaires étant sans arrêt stigmatisés, il devient difficile d’y voir clair ou de se faire une idée juste de la situation. On pourra également, dans un contexte mondial, parler de terrorisme d’état (retournement des forces policières ou militaires contre les citoyens qu’elles sont censées défendre). Dans l’Anti-Œdipe (en sous titre Capitalisme et schizophrénie) de Gilles Deleuze et Félix Guattari, le « corps sans organes » (l’État) devient un « lieu » où la pensée est orientée de façon telle qu’il devient impossible de penser sous peine de marginalisation voire de schizophrénie (qui n’est pas ici clinique mais une façon d’échapper, Deleuze et Guattari insistent beaucoup là-dessus, à la « pensée d’État »).
    Imaginez qu’on vous expulse de votre domicile, de votre quartier, de votre ville ou de votre pays. Ou encore qu’un groupe révolutionnaire, prétextant votre protection, vous ordonne de quitter votre domicile, votre quartier, votre ville ou votre pays. Dans les deux cas, vous devez partir. Vous n’êtes donc pas libre de vos mouvements, de vos idées et de votre destin.
    À force d’insister sur le caractère identitaire d’un peuple, d’en faire une caractéristique « essentielle » (ce qui n’est absolument pas le cas), on détruit toute réflexion. Nous sommes encore à la préhistoire de la pensée et, malheureusement, ceux qui sont élus pour réfléchir sur le devenir d’une Terre en danger sont les moins capables de le faire, trop occupés (au sens guerrier du terme) qu’ils sont à défendre leur fief, leur caste, leur pouvoir. Je renverrais ici tout lecteur intéressé aux travaux de Michel Foucault. Il a longuement étudié les mécanismes de pouvoir (et non pas les institutions) pour en montrer les opérations et les dysfonctionnements.
    Afin que le débat progresse (simplement pour qu’il y ait débat, pour que les idées s’entrechoquent, s’interpénètrent, s’influencent mutuellement), il faut suivre la piste que vous proposez (la lecture, la réflexion personnelle) pour ensuite apporter sa compréhension de la chose.
    Il est intéressant de vous lire, Messieurs. Et de partager avec vous des réflexions (et non pas des opinions) qui peuvent nous faire cheminer vers autre chose que l’affrontement.
    Cordialement…
    André Meloche
    P.S. Sur la question juive, je vous renvoie à l’entretien qu’a eu Alain Finkielkraut avec la philosophe juive Élisabeth de Fontenay. Il est éclairant de constater que la terreur de la Shoah a fortement marqué le peuple juif au point où Israël est devenu le rempart mondial contre la cruauté, le meurtre et l’extermination. Il est un peu plus clair, en ce qui me concerne, que le peuple israélien défende de manière si agressive son identité. Cela dit, les dérapages peuvent facilement survenir dans ces situations. Ce qui est refoulé par le peuple Juif me semble, parfois, tourner à la psychose, le terrorisme d’état dont je parlais plus haut. La référence à l’entretien avec Élisabeth de Fontenay :
    http://www.franceculture.com/emission-repliques-enfance-et-philosophie-2011-03-26.html

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2011

    @ l'engagé:
    Le réputé nouvel historien Benny Morris, auteur de "1948" (Yale University Press, 2008; 524 pages), contredit vos affirmations. Il montre que la plupart des réfugiés palestiniens ont effectivement fui Israel (sans en être expulsés), et que nombre d'entre eux l'ont fait sur ordre de leurs dirigeants et dans l'attente d'un retour triomphal. Je cite une lettre de celui-ci publiée dans le Irish Times ( Les "NDLR" sont de moi).
    " Ceux qui haïssent Israël raffolent de citer, et plus souvent de mal citer, mes travaux, à l'appui de leurs arguments. Permettez-moi d'apporter quelques corrections. (...) Dans des dizaines de localités de Palestine, des dirigeants arabes conseillèrent, ou ordonnèrent l'évacuation de femmes et d'enfants, ou de communautés entières, comme cela se produisit à Haïfa, fin avril 1948. Le 22 avril, le maire de Haïfa, Shabtai Lévy, parlementa avec d'eux pour qu'ils restent, sans résultat. (NDLR: ceci contredit votre hyperlien "lacroix.com")
    La plupart des 700 000 "réfugiés" ont fui leurs maisons à cause du fléau de la guerre (et dans l'espoir de revenir promptement dans leurs foyers sur les talons des envahisseurs arabes victorieux). Mais il est également vrai qu'il y eut plusieurs dizaines de sites, dont Lydda et Ramla, dont des communautés arabes furent expulsées par des troupes juives.
    Je mets le mot "réfugié" entre guillements parce que deux tiers d'entre eux furent déplacés d'une partie de la Palestine à une autre, et non de leur pays (ce qui est la définition habituelle d'un réfugié). (...)
    Il n'y eut pas de "plan" sioniste ou de politique globale d'expulsion de la population arabe, ni d'"épuration ethnique".
    "Il est exact que le Plan Dalet (NDLR: plan du 10 mars 1948 pour contrer l'assaut panarabe contre l'Etat juif naissant, assaut qui eut lieu le 15 mai 1949) donnait carte blanche aux commandants régionaux pour occuper, installer des garnisons, ou expulser, ou détruire les villages arabes situés à côté des lignes de front et derrière elles, ainsi que les routes prévues comme devant être empruntées par les armées arabes d'invasion. Il est également vrai qu'au milieu de la guerre de 1948, les dirigeants israéliens décidèrent d'empêcher le retour des "réfugiés" (ces "réfugiés" qui venaient juste d'attaquer la communauté juive), parce qu'ils les considéraient comme une cinquième colonne et une menace pour l'existence de l'Etat juif. Pour ma part, je ne peux incriminer leurs craintes ou leur logique. (...)
    Je recommande à ces gens de lire quelques livres d'histoire et de prendre connaissance des faits, et non de remettre en circulation une propagande arabe éculée. "
    (lettre de Benny Morris publiée le 21 février 2008 dans le Irish Times)
    Pour vous épargner de payer pour lire l'original, qui est payant, je vous donne une source secondaire:
    http://www.zionism-israel.com/israel_news/2008/02/israel-and-palestinians-according-to.html

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2011

    Je dois ajouter une précision.
    Quand j'écris que je m'associe à l'antisémitisme de Vigile, je définis l'antisémite comme celui antagonisé par la communauté juive.
    Vigile dérange certains intérêts. Alors félicitations à Vigile.
    Bien sûr, la marque infâme fait que tout les Juifs doivent vous haïr et craindre, sinon ils se feraient exclure de leur propre communauté.
    Hormis les Barbara Kay et Jacob Tierney, je crois qu'il y a assez de Juifs laïcisés pour vous apprécier. Ils ont juste peur de s'aliéner leurs familles.
    Quant aux haredim (craignant Dieu), ils sont déjà élevé à vous considérer comme שקץ, שכץ sheketz (abominables ou impurs).

  • L'engagé Répondre

    26 mars 2011

    Merci pour le commentaire Monsieur Meloche et j'entends tout à fait votre mise en garde : « Soyons plus intelligents et surtout plus grands intellectuellement en ne tombant pas dans la bassesse démagogique en acceptant le conflit des castes ou des races.»
    Je vais d'ailleurs chercher le texte de Blanchot dont vous nous parlez. Cette distinction de genre entre «la» polémique et «le» polémique est effectivement capitale.
    C'est pour ce genre de distinction que j'ai écrit ce texte. Si nous avions connu le terme postsionisme un peu plus tôt, nous aurions justement pu nous élever au dessus de «la» polémique. Il est nécessaire de condamner les manoeuvres qui nous font du tort, mais il faut également éviter de se fourrer nous-mêmes le nez dans un piège.

    Salutations amicales

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mars 2011

    Tout d’abord, j’aimerais vous remercier de cet excellent article qui éclaire un pan des réalités israélienne et juive. Il est clair qu’un esprit libre sera sans cesse attaqué par quelque obscurantisme que ce soit. Nietzsche a fait les frais d’une Allemagne Nazie, ne l’oublions pas.
    En ce qui me concerne, je sens qu’il est important de nous concentrer sur le débat politique intelligent tout en excluant certaines polémiques. Car il y a le polémique et la polémique. La différence tient en ce que la polémique est vide de sens et particulièrement haineuse tandis que le polémique incite au débat en excluant l’opinion publique (haïssable et haineuse. L’opinion publique est aveugle et se veut le contrepoids des régimes totalitaires. On peut retrouver ce thème dans le merveilleux texte de Maurice Blanchot, L’entretien infini) qui tend à gommer l’énoncé. Il en résulte une cacophonie crédule de laquelle est exclue la pensée. En ce qui concerne le nationalisme (et c’est à croire que les Israéliens ont oublié la Shoah. Mais il est également vrai de dire que les Juifs, en se dotant d’un pays, d’une armée et de frontières, se sont dits : « Plus jamais on tentera d’exterminer le peuple Juif. »), vous avez raison de dire que « les fanatiques israéliens du Canada ont instrumentalisé cette question avant nous. »
    Soyons plus intelligents et surtout plus grands intellectuellement en ne tombant pas dans la bassesse démagogique en acceptant le conflit des castes ou des races.
    Un peu plus tard, sur le chemin de la beauté, nous devrons également réfléchir sur les atrocités que nous perpétrons au nom de quoi, puis-je me permettre. Notamment ce que nous faisons subir à cette planète, à ses habitants, tant animaux qu'humains. Il faudra bien en finir un jour avec la hiérarchie qui tue au nom du progrès. Le progrès mortifère, quel bel oxymore!
    Notre pensée est naissante et nos interrogations multiples. À nous de les poser correctement, formellement et sans haine.
    André Meloche
    P.S. Le nationalisme n'est pas une fin mais un moyen. Il faut passer par la construction d'une identité pour reconnaître une différence, même si on a appris, avec Nietzsche, qu'une identité, ça n'est toujours qu'une idée qui devra évoluer avec le temps...