En dénonçant hier le caractère suspect de l’acharnement de La Presse contre SNC-Lavalin, j’étais loin de me douter que j’allais trouver dès aujourd’hui la confirmation de mes soupçons.
Déjà, la parution ce matin de nouveaux articles dans La Presse sur les agissements de SNC-Lavalin, en Tunisie cette fois-ci, constituait une indication de plus de la détermination de l’Empire à abattre SNC-Lavalin, presque de la même façon qu’il l’a fait, il y a peu, avec Gilles Duceppe .
Mais c’est en faisant la ronde des sites d’information internationale que je fréquente régulièrement que m’est apparue dans toute sa splendeur l’incommensurable hypocrisie de l’Empire Desmarais. En effet, le 5 avril dernier, le Wall Street Journal publiait une nouvelle qui m’avait échappé lors de sa parution : « SEC Probing Eni, Total Over Libya Operations »
ENI, c’est la pétrolière nationale italienne (Ente Nazionale dei Idrocarburi), et Total, c’est cette grosse multinationale française du pétrole dont Pargesa, la filiale de Power Corporation hors services financiers, détient la bagatelle de 4,5 % des actions. J’emploie le mot « bagatelle » à dessein parce que certains s’imaginent que 4,5 % des actions, c’est si peu que cela ne vaut même pas la peine d’en parler.
Pour mettre les choses correctement en perspective, sachez qu’en date d’aujourd’hui la capitalisation boursière de Total SA s’élève à un peu moins de 115 milliards $, et que 4,5 % de cette somme représentent la « bagatelle » de 5 milliards $. Il ne s’agit pas exactement de cacahuètes.
Et chez Total, on en est si conscient que l’on a offert à Pargesa d’être représentée au conseil d’administration de l’entreprise par quatre personnes : Paul Desmarais fils qui représente le clan Desmarais au sein de Pargesa, Gérard Lamarche qui représente le clan Frère au sein de cette même structure, Michel Pébereau, l’ancien PDG de la banque française BNP-Paribas, devenu administrateur de Pargesa, et Bertrand Collomb, président d’honneur du groupe cimentier Lafarge dans lequel Pargesa est également présente.
Bref, rien de ce que fait Total n’échappe au regard et à l’approbation de l’Empire Desmarais. Or voici quelques manchettes parues au cours des derniers jours en Europe en rapport avec cette enquête entreprise par la SEC, l’autorité américaine des marchés financiers :

Après l’Iran, la Libye : Total à nouveau soupçonné de corruption

Libye : Total à nouveau soupçonné de corruption
Total visée par une enquête en Libye
Le parquet libyen mène l'enquête sur Total
Total et Eni visées par une enquête en Libye, selon le WSJ
Et pour la bonne compréhension de toute l’affaire, la palme revient sans doute au site Russia Today qui présente aujourd’hui un texte intitulé « Libya: So it was all about oil after all! » et qui explique ce que tout le monde savait déjà : la guerre menée par l’OTAN en Libye prétendument au nom de la démocratie contre le « tyran » Kadhafi était en fait une guerre économique qui visait à permettre aux pays de la coalition de mettre la main à bon marché sur les réserves pétrolières de la Libye. Quant à Total et ENI, elles sont soupçonnées d’avoir fonctionné en Libye pendant 42 ans (oui, vous avez bien lu, 42 ans !) à coups d’irrégularités financières et de pots-de-vin.
Voilà donc ce que vous ne lirez pas dans La Presse et que l’Empire Desmarais cherche désespérément à vous cacher. Avec quatre représentants au conseil d’administration de Total, difficile de prétendre que l’Empire n’était au courant de rien. C’est ce qui s’appelle se faire prendre les « culottes à terre ». Et c’est ce qui rendent si odieuses les manoeuvres actuelles de l’Empire pour déstabiliser SNC-Lavalin.
Il y a quelques mois, en m’interrogeant sur les agissements de La Presse dans le dossier de l’enquête sur l’industrie de la construction, j’avais subodoré une magouille semblable pour dissimuler les agissements de Power Corporation dans le dossier du pétrole d’Anticosti, et j'avais lancé l’avertissement suivant « Attention ! Un scandale peut en cacher un autre » en le calquant sur le modèle de celui qu’on retrouve aux abords des voies ferrées sur les petites routes de France, « Un train peut en cacher un autre ».
Mais la manoeuvre est tellement grossière qu’on se demande si l’Empire ne nous prend pas carrément pour des imbéciles. À moins que... il ne soit aux abois ?