L’impôt sur le revenu, l’ennemi à abattre

La commission Godbout emprunte la voie difficile des hausses de taxes et de tarifs

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Et si c’était une réforme de pickpocket?

La commission Godbout a accouché d’une réforme fiscale qui fait miroiter une baisse de l’impôt sur le revenu de 4,4 milliards, dont l’abolition de la taxe santé, et qui donnerait un coup de pouce de 2 milliards à l’économie, ce qui entraînerait la création de 20 000 emplois.

Mais comme cette réforme, que le ministre des Finances, Carlos Leitão, voit d’un très bon oeil, est à coût nul, le contribuable subirait une hausse de la taxe de vente de 1 % et une augmentation de 13 % des tarifs d’électricité. Au net, le revenu disponible des Québécois progresserait de près de 600 millions, avance la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise, qui a rendu public son rapport jeudi après huit mois de travaux.

En outre, le contribuable passerait à la caisse avec des hausses des taxes sur l’essence, le tabac et l’alcool réparties sur cinq ans.

« C’est une réforme qui est quand même ambitieuse mais qui est faisable à court, moyen et long termes », a déclaré en conférence de presse le président de la Commission, Luc Godbout. Elle est même politiquement réalisable, a avancé le fiscaliste. « J’ai bon espoir que notre rapport va être appliqué. »

Or, tant le Parti québécois, la Coalition avenir Québec que Québec solidaire ont accueilli froidement le rapport. Même l’économiste Nicolas Marceau, le porte-parole péquiste en matière de finances, y a trouvé des poux. « Nous sommes prêts à faire ce débat », a-t-il dit, mais il rejette d’emblée toute hausse de la TVQ, des tarifs d’électricité et de la taxe sur l’essence.

Les commissaires auraient voulu réduire les impôts de façon encore plus importante et augmenter davantage la taxe de vente mais comme tant les impôts que la taxe de vente sont déjà plus élevés que chez nos voisins, « ça limite le remodelage qu’on peut faire », a souligné Luc Godbout. En passant de 15 % à 16 %, le taux combiné de la taxe de vente au Québec ne serait que de 3 points de pourcentage de plus qu’en Ontario, un écart acceptable, estime le fiscaliste.

« On est parmi les plus grands utilisateurs au monde de l’impôt sur le revenu », a-t-il souligné. Or il s’agit de la forme d’imposition la plus dommageable : chaque dollar en impôt sur le revenu des particuliers retranche 72 cents à la croissance économique, alors que pour la taxe de vente et les tarifs, cette ponction est 43 et 41 cents respectivement, a signalé la Commission.

La réforme s’accompagne d’un grand ménage dans les déductions fiscales visant les particuliers, les familles, notamment. Ainsi, il est proposé d’abolir 34 mesures fiscales, un coup de sabre de 1,2 milliard. Parce que le gouvernement fédéral se montre déjà généreux, la Commission recommande d’abolir le crédit d’impôt pour les activités des jeunes et l’incitatif à l’épargne-études.

La taxe de vente étant une mesure régressive qui affecte les moins bien nantis, il est recommandé de hausser de 300 millions le crédit d’impôt pour la solidarité, de bonifier la prime au travail et de majorer de 14 000 $ à 18 000 $ le revenu exempt d’impôt, ce qui remet 225 millions dans les poches des gagne-petit. La mise en place d’un « bouclier fiscal » permettrait aux familles qui, en voyant leur revenu de travail s’élever, perdent une bonne part de leurs avantages fiscaux, d’en conserver la majeure partie. En outre, la commission propose d’accorder une prime aux travailleurs âgés pour les inciter à rester sur le marché du travail.

La hausse des tarifs d’électricité, qui procurerait à Hydro-Québec 1,1 milliard de plus (623 millions de la part des individus et 500 millions pour les entreprises) correspond à une hausse annuelle de 103 $ par an pour un logement de cinq pièces et demie et de 257 $ pour une maison de taille moyenne. Les grands consommateurs résidentiels seraient touchés par une surtaxe de 10 %.

Les entreprises aussi visées

La réforme fiscale qui vise les entreprises est tout aussi ambitieuse. Ainsi, on préconise une diminution des charges imposées aux entreprises de 1,6 milliard, soit plus 1,1 milliard de moins en impôt sur les bénéfices, dont le taux passerait de 11,9 % à 10 %, et une réduction de 400 millions de la taxe sur la masse salariale. On réviserait les déductions fiscales pour économiser 1,1 milliard. Pour les PME, on remplacerait le taux réduit dont elles bénéficient (550 millions) par une « prime à la croissance » qui s’appliquerait pour leurs profits de 100 000 $ à 500 000 $, un débours de 470 millions pour l’État. En outre, la Commission recommande d’abaisser de 2,7 % à 1,6 % leur taux de la taxe sur la masse salariale, un allégement de 430 millions. Les grandes entreprises ne se verraient plus rembourser leurs crédits d’impôt.

Poursuivant sur la lancée amorcée par le gouvernement Couillard, certains crédits d’impôt aux entreprises seraient abolis ou resserrés. En revanche, d’autres mesures fiscales seraient maintenues, notamment les crédits d’impôt en recherche et développement, le congé fiscal pour les grands projets d’investissement, et plusieurs crédits d’impôt destinés aux entreprises culturelles.


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