L’immigration est certainement stimulante pour l’économie, mais il est difficile de déterminer ce que devrait être le niveau optimal, estime l’Institut du Québec (IdQ), en insistant plutôt sur l’importance de travailler sur la capacité d’accueil et la vitesse d’intégration.
Disant vouloir alimenter le débat public, l’IdQ a conçu quatre scénarios d’immigration sur 20 ans — dont le statu quo — afin d’évaluer l’impact qu’a le nombre d’immigrants sur la croissance économique. Conclusion principale : l’immigration permettra d’amoindrir les effets du vieillissement démographique, mais pas au point de les annuler.
« L’immigration n’est pas “la” réponse magique du tout, comme plusieurs le disent, au vieillissement de la population, mais en même temps, la contribution économique de l’immigration va être importante », a dit la directrice de l’IdQ, Mia Homsy. L’Institut est un partenariat du Conference Board du Canada et de HEC Montréal.
Les quatre scénarios retenus, dans une étude devant être publiée mercredi, comprennent le statu quo de même que des changements de cap radicaux. Dans l’ordre : une immigration zéro, une cible visant 12 % de l’objectif canadien (40 000 immigrants cette année, soit la proposition de la CAQ), 16 % (environ 53 000, c’est-à-dire le statu quo) et 23 % (le poids démographique du Québec à l’intérieur du Canada).
En se basant sur la méthodologie du Conference Board, l’IdQ a calculé qu’une cible de 12 % contribuerait au tiers de la croissance en 2040. Dans 21 ans, une telle cible représenterait l’arrivée de 53 600 immigrants par année.
En faisant passer la cible à 23 % (102 000 immigrants en 2040), la contribution monte à la moitié du PIB. Cependant, un tel rythme d’immigration pourrait faire baisser le PIB réel par habitant, car la rémunération des immigrants est souvent plus faible que celle des « natifs » dans les premières années, tout comme le taux d’emploi, a mentionné l’IdQ.
Engagement de campagne
Le gouvernement Legault s’est fixé comme objectif de ramener le niveau d’immigration à 40 000 personnes en 2019. Cependant, il n’a pas fermé la porte à un ajustement de ce nombre en fonction de la capacité du Québec à bien intégrer les nouveaux arrivants. Le milieu des affaires, notamment, craint qu’une diminution des niveaux d’immigration vienne aggraver la rareté de la main-d’oeuvre que vivent plusieurs régions et plusieurs industries.
Puisque l’intégration a montré des signes d’amélioration depuis quelques années, il serait très pertinent que Québec ajuste les niveaux plus fréquemment qu’il le fait à l’heure actuelle, selon Mme Homsy.
« Depuis 2017, la situation des immigrants sur le marché du travail s’est sans conteste améliorée au Québec. Les taux d’emploi et d’activité connaissent une hausse, alors que le taux de chômage est en baisse. Si cette tendance se poursuit, l’immigration aura des incidences économiques encore plus grandes dans les décennies à venir », ont écrit les auteurs du rapport.
Le ministre de l’Immigration, Simon Jolin-Barrette, a déjà indiqué que Québec envisagerait d’augmenter le niveau d’immigration dans le cadre de sa Planification pluriannuelle 2020-2022. Lors du plus récent budget, la CAQ a annoncé un « parcours d’accompagnement personnalisé » pour les nouveaux arrivants et une enveloppe additionnelle de 146 millions par année pour le ministère.
Au moment des consultations sur le projet de loi 9, déposé en février, le Conseil du patronat du Québec avait fait valoir qu’« au-delà des considérations sociales et humaines, l’immigration au Québec est un enjeu de taille dans le contexte de la rareté de la main-d’oeuvre ». La sélection et l’intégration sont des éléments intimement liés à la croissance économique et « nous devons absolument nous donner les moyens d’avoir un système efficace », avait plaidé son président, Yves-Thomas Dorval.
Le Conference Board a estimé l’an dernier qu’une économie canadienne qui fermerait ses frontières à l’immigration verrait son potentiel de croissance passer de 1,9 % à 1,3 %.