LES EX-PREMIERS MINISTRES PÉQUISTES BOUDÉS

L'hommage à Bourassa vire au règlements de comptes

Robert Bourassa - 10e anniversaire


par Denis Lessard

L'hommage à Robert Bourassa - et le dévoilement de sa statue - prévu pour jeudi à l'Assemblée nationale vire au règlement de comptes. De tous les anciens premiers ministres toujours vivants, un seul, le libéral Daniel Johnson, a trouvé grâce aux yeux du comité organisateur de l'événement.
Bernard Landry, Lucien Bouchard, Jacques Parizeau et Pierre Marc Johnson devront se contenter de regarder l'événement à la télévision.
Le premier ministre Jean Charest avait tout de même invité Brian Mulroney, qui a refusé, a précisé hier le président du comité organisateur de cet événement, l'avocat montréalais Jean Masson. Si les travaux del'Assemblée nationale reprennent aujourd'hui même, les hostilités ont manifestement pris de l'avance.
«On va souligner cela entre nous... comme les péquistes l'ont fait pour René Lévesque», a poursuivi M. Masson, longtemps l'un des principaux responsables des campagnes électorales du Parti libéral du Québec.
En juin 1999, sous Lucien Bouchard, 300 personnes avaient été invitées pour le dévoilement de la statue de René Lévesque. Tous les anciens premiers ministres péquistes avaient été conviés, mais le gouvernement n'avait pas cru bon à l'époque de transmettre une invitation à Daniel Johnson, a expliqué Me Masson hier à La Presse.
En juin 2000, à l'inauguration de la statue du libéral Jean Lesage, aussi par Lucien Bouchard, tous les anciens premiers ministres avaient cette fois été invités, y compris Daniel Johnson.
«Si je comprend bien, quand on commémore un péquiste, on n'invite que les péquistes... quand c'est un libéral, on invite tout le monde. J'ai de la misère à vivre avec cette logique...» a lancé M. Masson. «Si Daniel Johnson avait été invité au monument de M. Lévesque, c'est sûr qu'on aurait invité des premiers ministres péquistes... Mais s'ils ne nous invitent pas quand ils font leurs affaires, pourquoi les inviterait-on quand c'est notre fête à nous autres ?» a laissé tomber M. Masson.
Comment pourrait-on dire que l'événement de jeudi est partisan ? «Personne n'avait dit cela quand M. Johnson n'avait pas été invité en 1999», a-t-il poursuivi.
Pour le dévoilement de la statue de M. Bourassa, les responsables du protocole à l'Assemblée nationale avaient demandé au comité si on devait inviter les anciens premiers ministres toujours vivants, une proposition que l'avocat montréalais a repoussée.
Me Masson s'explique : «Daniel Johnson avait été fâché qu'on ne l'ait pas invité à l'époque.» Cette fois, l'ancien premier ministre libéral a bien eu son invitation, il y a deux semaines.
Ni les ex-premiers ministres Parizeau et Bouchard ni les frères Johnson n'ont répondu aux appels de La Presse.
Mais de son domicile, à Verchères, Bernard Landry a souligné hier ne pas avoir été invité à cet événement. «J'ai connu personnellement M. Robert Bourassa, je lui ai parlé à toutes les étapes de sa vie, y compris les dernières. On avait des désaccords profonds, mais des convergences aussi profondes», a souligné M. Landry.
L'économiste Landry avait puissamment appuyé le gouvernement Bourassa à la fin des années 80 pour faire avancer le dossier du libre-échange. Aussi, «quand il avait lancé la question de Bruxelles, cela ressemblait à des choses dont on s'était parlé», a renchéri l'ex-premier ministre.
«Si on m'avait invité, c'est sûr que je serais allé, résume M. Landry. Pour ce genre d'événement, il faut avoir une attitude civique. Et une telle attitude dépasse les allégeances partisanes.»
L'alter ego de Robert Bourassa, le sénateur Jean-Claude Rivest, voulait qu'on invite une amie de longue date, l'ex-ministre péquiste Louise Beaudoin. Elle non plus n'a pas trouvé grâce aux yeux de Me Masson.
«C'était une blague...» se contentait de dire hier M. Rivest, refusant toutefois de commenter la position du comité sur les invitations des anciens premiers ministres. « Robert Bourassa n'aurait pas aimé cela. Dans ce genre de situation, il n'aurait jamais eu une attitude partisane », a confié un autre collaborateur de longue date de M. Bourassa, sous le couvert de l'anonymat.
Chef de cabinet du président de l'Assemblée nationale Michel Bissonnet, Lise Grondin souligne qu'il s'agit «d'un événement conjoint de l'Assemblée nationale et du Comité de commémoration». Le président de l'Assemblée nationale invite systématiquement une liste de personnes à ces événements, tous les députés en fonction notamment. Les autres invitations relèvent du Comité, a expliqué Mme Grondin.


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