Julie Couillard, la tombeuse

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"L'affaire Maxime Bernier"


André Cédilot, Hugo Dumas et André Noël - On a vu et revu Julie Couillard sortir d’une limousine en compagnie de Maxime Bernier. Un sommet de carrière, en quelque sorte, pour cette femme issue d’une famille de la classe moyenne. Car rien ne semblait la destiner à devenir la compagne du ministre des Affaires étrangères du Canada. Au contraire.

Jeune, Julie Couillard fréquente plutôt les bars et se sert de son charme pour attirer les hommes riches et influents. Son cercle d’amis comprend aussi bien des motards et des mafiosi que des hommes d’affaires et des politiciens. Les plus suspicieux se demandent même si elle n’est pas une émule de Gerda Munsinger, au cœur du plus important scandale sexuel à avoir ébranlé le Canada, dans les années 60.
La jeune Lavalloise fêtera ses 39 ans samedi prochain. Quoi qu’on pense d’elle, il faut lui reconnaître au moins un mérite, disent tous ceux qui l’ont connue : attirante et volontaire, elle sait ce qu’elle veut et ne lésine pas sur les moyens pour l’obtenir. L’argent et le pouvoir ne lui semblent pas indifférents. Elle sait s’imposer, comme en témoigne l’influence qu’elle a tenté d’exercer auprès du ministre Bernier dans un projet de transaction immobilière du gouvernement fédéral à Québec.
Coincée entre sa sœur aînée et son frère cadet, Julie Couillard a grandi à Lorraine avant de déménager dans le quartier Ville-Émard, dans le sud-ouest de Montréal. Elle n’a pas vécu dans le luxe et l’aisance, mais elle n’a manqué de rien. Elle a eu une enfance tout ce qu’il y a de plus ordinaire, si ce n’est qu’elle a passé beaucoup de temps chez sa grand-mère. Enfant, elle a fréquenté le mouvement scout. Elle avait tellement besoin d’affection qu’on l’avait surnommée «Pot de colle», a confié un ami de la famille.
À l’adolescence, elle a longtemps fréquenté le même copain. Elle rêvait déjà d’être mannequin, de porter de beaux vêtements et de côtoyer les stars. Elle est sortie dans les discothèques et les bars, a travaillé comme serveuse et changé souvent d’emploi. «Elle a occupé tellement d’emplois qu’on en a perdu le compte», a commenté un ami de la famille Couillard.
Une faune variée
Sa carrière artistique s’est limitée à quelques incursions au Salon de la mariée, à la télé comme figurante – notamment à une émission de Surprise sur prise – et à un remplacement comme hôtesse à La poule aux œufs d’or. Elle a aussi dansé dans un vidéoclip du groupe Gipsy Kings, en 1989.
Julie Couillard a aussi tenu un tout petit rôle, celui d’une maîtresse, dans la série René Lévesque, à TVA, dans les années 90. Elle séduit par son franc-parler, disent ceux qui l’ont fréquentée.
Sa sœur est agente immobilière tandis que son frère travaille comme massothérapeute au Pro Gym de Serge Moreau, dans le quartier Hochelaga. L’endroit a maintes fois été reconnu comme un lieu de rencontre des Hells Angels et de leurs associés.
Dès sa jeune vingtaine, Julie Couillard côtoie une faune variée. Rien ne l’étonne, rien ne l’effraie. Au début des années 90, la jolie brune aux relations multiples enflamme le cœur du caïd Tony Volpato, une des têtes d’affiche de la mafia montréalaise.
C’est le début d’une période faste, et son prestige monte d’un cran dans le milieu interlope. Sa rencontre avec le truand Gilles Giguère sera encore plus déterminante. Il est lui aussi beaucoup plus vieux qu’elle, mais c’est le coup de foudre. À sa demande, il se fait même faire une liposuccion.
Pendant les trois ans que dure leur idylle, ils sont quasi inséparables. Julie Couillard est parfois présente quand Giguère fait pression sur des personnes qui tardent à rembourser des prêts à taux usuraire. Giguère est un fidèle allié de feu Robert Savard, l’un des usuriers les plus prospères de la métropole. Les deux hommes sont souvent avec Maurice Boucher, le chef des Nomads, club d’élite des Hells Angels.
La GRC a une photo la montrant avec les trois hommes, prise par l’escouade Carcajou durant la guerre des motards.
Un mariage malheureux
En 1995, au plus fort de cette guerre, Giguère et sa compagne ont été au cœur d’une histoire d’extorsion à l’endroit d’une agente immobilière de l’ouest de Montréal. Giguère et trois autres hommes ont été accusés, tandis que Julie Couillard et son père, Marcel, ont été relâchés après un long interrogatoire.
Toute l’affaire s’est terminée en cul-de-sac devant le tribunal. Elle a aussi coûté la vie à Giguère, qui, au mépris de toutes les règles du milieu, avait fait pas moins de 25 déclarations à la police. Il a été tué par balle une semaine avant de se marier avec Julie Couillard. Le couple devait aller en voyage de noces en Floride. Bob Savard avait payé les billets d’avion. Depuis, Mme Couillard touche une rente de veuve du gouvernement du Québec.
Pendant ces tragiques événements, Julie Couillard a demandé à son avocat de lui présenter le chroniqueur judiciaire Claude Poirier. «Je lui ai donné des conseils pour les arrangements funéraires, a relaté le reporter vedette cette semaine. On s’est reparlé quelques fois par la suite, mais ça reste une connaissance dans le cadre de mon travail.»
Claude Poirier a également couvert son mariage avec Stéphane Sirois, des Rockers de Montréal. Souvent en brouille, le couple s’est séparé rapidement, en 1999. Sans le sou, Sirois, qui a quitté les motards pour elle, a repris du service, cette fois avec... la police. Il a joué un rôle clé dans l’opération Printemps 2001, qui a permis de démembrer les Nomads et leur filiale des Rockers.
Ruineuse union
C’est dans le tourbillon de sa vie qu’elle rencontre cette fois Robert Pépin, en 2004. Également lié au crime organisé, Pépin est à la tête d’une entreprise de sécurité. Il rêve de faire des millions grâce à l’identification biométrique. Tout en tentant de l’aider à faire croître son entreprise, Julie Couillard ouvre une agence de casting. Par le truchement des petites annonces, elle a notamment recruté des figurants pour les Studios Mel’s, à Montréal.
Son union avec Pépin a duré à peine un an. «En huit mois, il a flambé 160 000$ avec elle», dit un ami de Pépin. Dépressif et endetté jusqu’au cou, Pépin s’est suicidé en mai 2007. Il devait environ un million de dollars, dont quelque 200 000$ à des usuriers.
Julie Couillard s’est recyclée dans l’immobilier et s’est affiliée à Kevlar, une entreprise de courtage et d’investissements qui sollicite des contrats publics. À peine avait-elle obtenu son certificat d’agente immobilière, en avril 2007, qu’un patron de Kevlar l’a présentée au ministre Maxime Bernier lors d’un souper avec d’autres hommes d’affaires dans un restaurant branché du centre-ville. On connaît la suite de cette sulfureuse liaison, dont la fin a été annoncée... à la Chambre des communes.


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