J’ai mal à mon français

Mais je me pose une question : pourquoi êtes-vous si nombreux à plier l’échine et à accepter de vous faire servir in English sans dire un mot?

Le français — la dynamique du déclin



Ça fait une semaine que je ne décolère pas. Et je vous en parle parce que je sais que ça va me faire du bien de me défouler….
Dimanche après-midi, boulevard Saint-Laurent. Un nouveau commerce vient d’ouvrir sur cette rue branchée. Un concept sympa : un bar à ongles où on peut s’offrir une manucure ou une pédicure en regardant un épisode de Sexe à New York sur une télé à écran plat. Intriguée, alléchée (et les ongles en très piteux état) je rentre dans la boutique, malgré le fait que les affiches en vitrine soient uniquement en anglais.
La propriétaire me reçoit par un joyeux « Hi, may I help you? ». Chouette, elle me prend pour une touriste américaine en visite (peut-être même qu’à force de boire des Cosmo toute la journée elle me prendra pour Carrie Bradshaw en personne). C’est pas grave, je continue : « Je voudrais une manucure et une pédicure». « Oh, I’m sorry I don’t speak french. » Tu parles qu’elle était désolée. Mais pas autant que moi. Je lui ai expliquée calmement qu’elle venait de perdre une très lucrative clientèle (ben oui, j’y aurais amené toutes mes copines) parce qu’il était hors de question que je donne un sous à un commerce où on ne peut pas me servir en français, dans une ville francophone, dans une province francophone!
Une fois rentrée à la maison, je suis allée faire un petit tour sur Internet. Et voici ce que j’ai trouvé sur le site de la boutique, dans la bio de la propriétaire, qui vient de Vancouver : « C’est lors d’un voyage à Montréal (…) en 2008 que xxx est tombée follement amoureuse de Montréal. (…) Je me suis dit : Je sais que je ne parle pas un mot de français, mais j’ai trouvé mon chez-moi. »
C’est bien là tout le problème : si Pauline Marois qui baragouine l’anglais décidait d’ouvrir une boutique de foulards en soie à Vancouver, elle ne tiendrait pas 24 heures. Mais une unilingue anglophone peut, sans aucun problème, avoir pignon sur rue à Montréal sans être même capable de dire tout simplement bonjour à ses clientes.
Vous trouvez que j’exagère? Que j’aurais dû me la fermer, rentrer mes griffes (euh, enfin, mes ongles) et faire la gentille fifille en me disant : « elle apprendra, il faut lui laisser le temps »? Pas question.
Des exemples comme celui-ci je peux vous en donner des douzaines. Un restaurant grec, rue Bernard, où le serveur ne connaît pas un mot de français. Je lui demande depuis combien de temps il est à Montréal : « It’s been two years, but I’m Learning ». Ben coudonc, il me semble qu’il n’apprend pas vite si au bout de deux ans il ne sait pas encore dire : « salade grecque ». Un autre exemple : un restaurant indien boulevard Saint-Laurent : le père du propriétaire ne parle pas un mot de français, le serveur ne parle pas un mot de français. Le propriétaire parle français comme Paul Piché. Je lui demande pourquoi il engage des unilingues anglais : « c’est difficile vous savez de trouver des serveurs compétents. » Peut-être, mais je suis sûre qu’en faisant un petit effort, vous trouveriez la perle rare : un francophone compétent, par exemple.
Chaque jour à Montréal, je me fais apostropher en anglais dans des commerces. Chaque jour je me bats pour me faire servir en français. Et chaque jour je vote avec mon porte-feuille : je REFUSE de faire affaire avec des gens qui REFUSENT de me parler dans ma langue. C’est raide mais c’est la seule façon de me faire respecter.
Mais je me pose une question : pourquoi êtes-vous si nombreux à plier l’échine et à accepter de vous faire servir in English sans dire un mot?
Ze feet in the air
Parlant de langue, une petite question en passant à la jeune réalisatrice Mariloup Wolfe dont le film Les pieds dans le vide prend l’affiche cette semaine : est-ce que ça aurait été trop demander qu’il y ait ne serait-ce qu’UNE chanson en français dans la trame sonore hyper chargée de ce premier long-métrage? Quand on fait un film qui s’adresse à un jeune public qui est déjà réticent face à la culture québécoise, il me semble qu’on fait un petit effort et qu’on ne tapisse pas son film de chansons en anglais du début à la fin. C’est genre full pas nice.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé