Lettre ouverte à Pierre Karl Péladeau

Instaurer un mode de scrutin proportionnel au Québec ?

Nein danke !

Tribune libre

Monsieur Péladeau,

Permettez-moi, en guise de préambule, de me rappeler à votre bon souvenir. À la fin du colloque organisé à Longueuil, le 8 novembre dernier, par le Parti québécois de la circonscription de Marie-Victorin, je m'étais en effet présenté à vous en vous disant à la blague que j'étais venu spécialement d'Allemagne pour vous rencontrer. En réalité, comme je vous l'avais par la suite expliqué, ce sont les obsèques de ma mère (une grande admiratrice de René Lévesque, soit dit en passant !), célébrées la veille, qui avaient véritablement justifié ma venue au Québec. Seul le hasard des circonstances avait fait en sorte que j'ai pu assister audit colloque tout en ayant une bonne pensée pour ma défunte maman...

Cela étant dit, revenons si vous le voulez bien en Allemagne (où j'habite depuis bientôt cinq ans avec ma nouvelle épouse) et à la raison qui me pousse aujourd'hui à vous écrire. N'ayez crainte, toutefois, je ne vais pas commenter ici les résultats des élections régionales qui se sont déroulées le dimanche 13 mars dans trois des seize Länder (ou États fédérés) que compte la République fédérale d’Allemagne. (Au besoin, cet article vous en apprendra davantage au sujet de la montée en puissance de la droite populiste anti-immigration observée dans ce pays : http://www.ledevoir.com/international/actualites-internationales/465781/elections-en-allemagne-alternative-fur-deutschland-faut-il-s-inquieter.)

Je veux plutôt profiter de l'occasion pour insister sur la complexité du mode de scrutin (à la proportionnelle mixte) en vigueur en Allemagne. Ce faisant, j'aimerais vous inciter à y songer à deux fois avant d'inviter de nouveau les militants péquistes « à réfléchir sérieusement à l’idée de réviser le mode de scrutin afin d’y introduire une composante de proportionnelle » (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/464171/conseil-national-pierre-karl-peladeau-ouvre-la-porte-a-un-mode-de-scrutin-proportionnel).

Commençons par examiner quels seraient les impacts d'un mode de scrutin proportionnel « intégral » sur notre vie parlementaire. Si de telles élections à la proportionnelle avaient eu lieu en avril 2014, les résultats auraient été les suivants : « 52 sièges au PLQ au lieu de 70, 32 sièges pour le PQ au lieu de 30, 29 à la CAQ plutôt que 22, 9 sièges pour Québec solidaire alors qu’il n’en obtient que 3, puis 1 pour Option nationale qui n’en a reçu aucun. Et la même chose pour le Parti vert (PV). Un dernier siège serait attribué aux autres partis » (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/405021/appel-a-un-mode-de-scrutin-proportionnel). (Je tiens à préciser qu'en Allemagne un parti doit avoir obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés pour aspirer à être représenté tant aux parlements régionaux qu'au parlement fédéral. Le but recherché par cette mesure est clair : éviter la multiplication des petits partis, ceux-ci étant susceptibles de nuire au bon fonctionnement des travaux parlementaires en rendant éventuellement impossible la formation d'un gouvernement stable. Ainsi, si un système similaire avait été en place en 2014, Option nationale, le Parti vert et les tiers partis n'auraient pas davantage de siège à l'Assemblée nationale qu'ils n'en ont actuellement.)

Comme on le voit immédiatement, pareil mode de scrutin rendrait difficile la formation de gouvernements majoritaires stables. Depuis 1960, il est arrivé seulement à 5 reprises (sur un total de 16 élections générales québécoises) que le PLQ obtienne 50 % des voix et plus. JAMAIS le PQ n'a franchi cette barre, obtenant, au mieux, 49 % des voix en 1981 (https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_élections_générales_québécoises). Dans l'exemple qui précède, sachant que l'Assemblée nationale compte jusqu'à nouvel ordre 125 élus et qu'il en faut au minimum la moitié + 1 (soit 63) pour espérer prendre le pouvoir et former un gouvernement majoritaire, les libéraux auraient dû, en 2014, former une coalition avec... la CAQ probablement (52 + 29 = 81 sièges) ! À défaut, le PQ aurait pu tenter de s'allier à la CAQ et à QS (32 + 29 + 9 = 70 sièges)... D'autres combinaisons auraient bien sûr été possibles, mais je vois mal comment le PLQ et le PQ pourraient jamais s'entendre sur un programme commun de gouvernement ! Inutile par ailleurs de préciser que chacun des partis impliqués dans semblable coalition aurait dû mettre passablement d'eau dans son vin dans le but de gouverner le Québec ! L'avantage, c'est que le programme d'austérité du PLQ en aurait probablement pris pour son rhume, au risque toutefois que le projet de souveraineté du PQ en ait été plus dilué que jamais...

Dans de telles conditions, compte tenu que ses gains en terme de sièges (+ 2) auraient été pour le moins modestes si des élections à la proportionnelle avaient eu lieu en 2014, pourquoi le PQ voudrait-il à tout prix s'ériger en chantre d'un système électoral qui, à moins de circonstances exceptionnelles, le priverait à toutes fins pratiques de l'exercice exclusif du pouvoir ? Entretiendriez-vous secrètement l'espoir de séduire les électeurs de QS et de la CAQ (voire d'ON) en vue de remplacer les libéraux en 2018 (en vous alliant si nécessaire avec l'un ou l'autre de ces partis) ? Une telle motivation m'apparaît d'autant plus discutable, pour dire le moins, qu'un tel mode de scrutin ne pourrait entrer en vigueur au plus tôt qu'aux élections de 2022... et encore, à la condition que le PQ l'emporte en 2018 en vertu du mode de scrutin uninominal à un tour qui prévaut actuellement ! (Il ne faudrait pas trop compter sur les libéraux pour modifier d'ici là un système qui les avantage nettement et dont même le PQ a bénéficié par le passé, ce qui explique que les élus péquistes, une fois au pouvoir, ne se soient jamais empressés de procéder à la révision du mode de scrutin qu'eux-mêmes avaient réclamée à cors et à cris – et promise ! – lorsqu'ils étaient dans l'opposition...)

D'aucuns pensent qu'un mode de scrutin mixte semblable à celui en vigueur en Allemagne « permet[rait] aux régions d'élire un représentant tout en réduisant les risques de distorsion électorale » (http://ici.radio-canada.ca/sujet/elections-quebec-2014/2014/04/08/010-scrutin-proportionnel-resultats-quebec-2014.shtml). Comme vous ne l'ignorez sans doute pas, Paul Cliche, membre de Québec solidaire, membre fondateur du Mouvement pour une démocratie nouvelle (MDN) et auteur du livre Pour réduire le déficit démocratique: le scrutin proportionnel, est depuis longtemps l'un des plus ardents défenseurs d'un tel système électoral (http://www.democratie-nouvelle.qc.ca/wp-content/uploads/2013/01/paul-cliche-livre-le-scrutin-proportionnel1999.pdf). C'est son droit le plus strict, mais son entêtement ne suffit pas à lui donner raison. Car je vois mal en quoi ce type de mode de scrutin aurait concrètement permis de « réduire le déficit démocratique » de façon significative en 2014 : toujours d'après l'exemple précédent, le PLQ aurait alors obtenu 63 sièges (soit tout juste la majorité absolue) ; le PQ compterait 31 sièges (soit 1 de plus qu'actuellement, quelle victoire extraordinaire pour la démocratie !), la CAQ 25 (+ 3) et QS 6 (+ 3 également) (http://ici.radio-canada.ca/sujet/elections-quebec-2014/2014/04/08/010-scrutin-proportionnel-resultats-quebec-2014.shtml).

Le problème, c'est qu'un tel système crée deux types de députés : ceux qui représentent leurs électeurs dans la circonscription où ils ont été élus, comme c'est le cas présentement ; et ceux qui sont inscrits sur une liste après avoir été désignés par leur parti respectif. Lesquels, selon vous, seraient plus « ministrables » que les autres ou auraient plus de « poids » au sein du gouvernement ? Je ne voudrais pas être à votre place le jour où il vous faudrait les départager ! Ce système obligerait par ailleurs les électeurs à voter pour un candidat ET pour un parti (donc à faire 2 croix plutôt qu'une). Jusque-là ça va encore, mais je peux vous dire par expérience qu'il est fréquent que les choses soient beaucoup plus compliquées en Allemagne. En voici la preuve : une semaine avant les élections régionales du 13 mars, les électeurs de la ville où j'habite avaient pas moins de 3 bulletins de vote différents à remplir simultanément (dont l'un avait la taille d'un grand napperon) ! Outre qu'ils devaient élire les membres du conseil de quartier et du conseil municipal de ma ville, ainsi que les représentants du département dont nous dépendons, les voteurs avaient chaque fois la possibilité de simplement cocher la liste d'un parti et/ou d'accorder jusqu'à 3 voix à un ou plusieurs candidats de leur choix, indépendamment des listes sur lesquelles lesdits candidats étaient inscrits, et ce jusqu'à un total respectif de 9, 49 et 71 voix !

Je vous épargne les détails, mais sachez néanmoins que ce système alambiqué ne facilite pas le décompte des voix et entraîne parfois des erreurs (ça s'est produit dans une ville voisine, où un recomptage a entraîné une nouvelle répartition des sièges), même si les Allemands sont par nature des gens organisés, efficaces et disciplinés, du moins beaucoup plus que les Espagnols, les Français ou les Italiens, pour citer ces exemples. Or, en Italie justement, le Parlement a dû procéder l'an dernier à une réforme électorale majeure afin de « mettre un terme à l’instabilité politique chronique du pays » (http://www.rfi.fr/europe/20150505-reforme-scrutin-italie-scrutin-majorite-proportionnelle-deputes-renzi-grillo-berlusconi). Pour l'essentiel cette réforme se résume en ces termes : « Pour éviter les coalitions bancales indispensables jusqu’à présent pour gouverner, l’Italie garde un scrutin proportionnel mais à deux tours et avec une prime de majorité au parti qui obtient 40 % des voix. » [C'est moi qui mets en caractères gras.] Vive la démocratie à l'italienne !

Pourquoi pas un système de scrutin uninominal majoritaire à deux tours ?

Est-ce cela que vous souhaitez instaurer au Québec ? Voulez-vous que notre futur pays devienne ingouvernable sous prétexte de réduire les distorsions électorales en permettant une représentation plus équitable des moyens et petits partis ? Ou qu'il se dote d'un mode de scrutin à ce point compliqué que même une chatte n'y retrouverait plus ses petits !? Si, comme j'ose le croire, telle n'est pas votre intention, alors pourquoi ne pas instaurer un système de scrutin uninominal majoritaire à deux tours, comme c'est notamment le cas en France ? Il s'agit là d'un mode de scrutin facile à comprendre et à appliquer, et qui permettait même aux petits partis de conclure des alliances profitables entre deux tours de scrutin. (C'est d'ailleurs à ce moment précis qu'une « convergence » deviendrait possible et même souhaitable...)

Aucun système électoral n'est parfait, j'en conviens. Mais encore faudrait-il en choisir un qui soit adapté à la mentalité des Québécois et qui ait de bonnes chances de fonctionner. Or, un système uninominal à deux tours aurait au moins l'avantage non négligeable d'être beaucoup plus simple à mettre en œuvre qu'un mode de scrutin proportionnel (qu'il soit mixte ou intégral), tout en réglant à la satisfaction (quasi) générale la question du « déficit démocratique » dont souffre notre vieux système.

Ainsi, s'il y avait eu un deuxième tour en septembre 2012, une alliance PQ-ON au niveau local aurait notamment pu permettre de faire réélire Jean-Martin Aussant, l'« enfant chéri des souverainistes » (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/448155/jean-martin-aussant-exclut-un-retour-rapide-en-politique). De même, si le mode de scrutin uninominal à deux tours avait été en vigueur en 2014, les résultats auraient pu être les suivants, d'après mes calculs basés sur les données fournies par le DGEQ (http://www.electionsquebec.qc.ca/francais/provincial/resultats-electoraux/elections-generales.php?e=74&s=1&c=tous#s) : PLQ 42 sièges (dont 36 obtenus avec majorité absolue au premier tour et 5 autres presque assurés au deuxième tour), PQ 48 sièges (dont 4 seulement obtenus avec majorité absolue au premier tour), CAQ 31 sièges (dont 4 au premier tour et 1 autre presque assuré au deuxième tour), QS 4 sièges (dont 1 au premier tour).

Oui, vous avez bien lu, le PLQ aurait 28 sièges de moins qu'à l'heure actuelle... et le PQ serait le principal parti du Québec avec 48 sièges ! En vertu de quel mystère ? En vertu du jeu du report des voix, tout simplement ! À condition, bien entendu, que le PQ, la CAQ et QS aient accepté de jouer le jeu, tous leurs candidats respectifs se désistant au deuxième tour en faveur du candidat (autre que libéral !) arrivé au premier tour en deuxième position derrière le candidat libéral. Le but recherché aurait été de permettre à chacun des partis liés par une telle entente de faire des gains potentiellement substantiels (du moins pour le PQ et la CAQ), tout en empêchant le PLQ de prendre le pouvoir. Aux élections de 2022, un tel mode de scrutin rendrait essentiellement possibles des ententes fructueuses PQ-CAQ, voire accessoirement PQ-QS, CAQ-QS ou même PQ-CAQ-QS, tant à l'échelle nationale qu'au niveau de chaque circonscription. (L'objectif étant toujours de battre les candidats libéraux qui n'auraient pas obtenu plus de 50 % des suffrages exprimés lors du premier tour.) On voit tout de suite que la « convergence » que vous souhaitez tant aurait ici davantage de chances de se réaliser (surtout au bénéfice du PQ !) que dans le cas d'une élection à la proportionnelle. Elle impliquerait toutefois un partage des pouvoirs dans le cadre d'une coalition gouvernementale au sein de laquelle chacun des partis intéressés devrait y trouver son compte (en terme de ministères, notamment !)... ce qui est loin d'être assuré dans la mesure où chacun serait inévitablement obligé de consentir à des compromis, comme je l'ai laissé entendre plus haut. (Ne perdons pas de vue non plus que la CAQ et QS pourraient, au final, se découvrir davantage d'affinités avec le PLQ qu'avec le PQ...)

Mais nous sommes encore loin de 2022 ! Par conséquent, ce petit exercice de politique-fiction a pour seul intérêt de nous ramener à la question suivante : Quelle est l'utilité concrète d'envisager dès à présent, comme vous venez de le faire, la possibilité d'instaurer un mode de scrutin proportionnel au Québec ? Laisser miroiter une réforme du mode de scrutin à des gens qui sont peu susceptibles de se montrer reconnaissants à votre égard ne risque pas de changer grand-chose dans l'immédiat. Après 2018, peut-être, mais ça reste à voir. Dans ce cas, pourquoi vouloir mettre la charrue avant les bœufs ? Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Pourquoi voudriez-vous vous compliquer la vie en cherchant midi à quatorze heures ? N'avons-nous pas d'autres chats à fouetter d'ici là ? N'y a-t-il pas plus urgent à faire en ce moment que de chercher – sous le prétexte fallacieux de vouloir « apaiser les tensions entre le Parti québécois et Québec solidaire » – à mobiliser les troupes péquistes sur une question qui n'est rien de plus qu'une distraction oiseuse, sans rapport direct avec l'objectif principal du PQ et le vôtre : faire du Québec un pays !?

Aussi, au lieu d'inviter les militants à se perdre inutilement dans des détails accessoires tout en espérant naïvement rallier ainsi à la cause souverainiste des opposants politiques excessivement exigeants (http://vigile.quebec/Le-chantage-solidaire), voire carrément hostiles à votre égard, ne serait-il pas plus opportun et plus efficace 1° d'attaquer systématiquement les positions indéfendables de nos adversaires fédéralistes ; 2° de faire sans relâche la promotion des avantages de l'indépendance ; et, si besoin est, 3° de faire un appel du pied à François Legault et aux militants de la CAQ plutôt qu'à QS et à ses porte-parole ?

Pas besoin d'avoir la tête à Papineau pour deviner qu'il y a plus d'atomes crochus entre vous et M. Legault, homme d'affaires prospère comme vous, qu'entre vous et les dogmatiques Amir Khadir et Françoise David. En prime, motivé qu'il est selon toute vraisemblance par le désir de vous damer le pion aux prochaines élections générales, cet ancien ministre péquiste – qui s'est quand même donné la peine, dans une vie antérieure, de démontrer que la souveraineté du Québec est économiquement rentable ! – a récemment jugé opportun de faire prendre un virage nationaliste à sa formation politique. Voilà un chef et un parti qu'il convient d'autant plus de suivre de près et, s'il y a lieu, de courtiser que, comme j'ai pu le constater chiffres à l'appui, un rapprochement PQ-CAQ se révélerait à toutes fins pratiques plus rentable, électoralement parlant, qu'un rapprochement PQ-QS...

À la lumière des faits exposés ici, l'approche que je vous propose dans les deux paragraphes précédents m'apparaît nettement plus judicieuse et plus indispensable que toute autre démarche. En effet, si l'IRAI parvient à démontrer clairement et hors de tout doute que l'indépendance permettrait de faire du Québec un pays riche et prospère, je ne suis pas inquiet pour la suite des choses. (C'est du moins ce que l'ingénieur Jean-Jacques Nantel ne cesse de nous rappeler, preuves à l'appui, dans sa série de vidéos et de capsules radiophoniques dont vous ne devriez pas hésiter à vous inspirer (https://plus.google.com/100610276939020398934).) Quand la majorité des Québécois auront enfin compris que l'indépendance est une nécessité absolue, ils vont tout naturellement vous appuyer majoritairement le moment venu. (La « convergence » et les alliances se feront alors d'elles-mêmes...)

En conclusion, il me semble prématuré, à cette étape-ci de notre histoire, de vouloir instaurer au Québec un mode de scrutin proportionnel (ou tout autre nouveau mode de scrutin). Voilà pourquoi, en tant que membre en règle du Parti québécois, je réponds catégoriquement à votre invitation : Nein danke ! (Non merci !)

Cordialement,

Normand Paiement
Traducteur, auteur d'un ouvrage en préparation sur l'avenir du Québec


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10 commentaires

  • Normand Paiement Répondre

    24 mars 2016

    Monsieur Ricard,
    Votre expérience sur le terrain n'est pas à négliger. Les questions que les gens soulèvent méritent certes une réponse satisfaisante, mais il faut creuser plus loin à mon avis avant d'en arriver là.
    Derrière ces questions se cachent de toute évidence des craintes, des appréhensions, des inquiétudes, des peurs que je qualifierais d'«ancestrales», car nous les avons héritées de notre passé de peuple colonisé. L'ouvrage que je prépare traite de cet aspect des choses. J'aurai l'occasion d'y revenir, mais il est dores et déjà clair dans mon esprit que nous ne pouvons pas continuer de faire semblant d'ignorer ces questions fondamentales.
    Une première démarche pourrait consister, dans votre cas, à écouter les gens en leur demandant ce qui les préoccupe vraiment. Ne vous sentez pas obligé de leur apporter à tout prix une réponse! Posez simplement des questions, vous verrez bien. Et tenez-moi au courant si le coeur vous en dit...
    Au plaisir d'en reparler avant longtemps. Bon courage et bonne continuation entre-temps!
    Normand Paiement
    PS - Je ne cesserai jamais de le répéter, seule une thérapie collective permettrait aux Québécois de vaincre leurs peurs ancestrales. J'ai déjà abordé ce sujet à quelques reprises sur ce site, notamment dans un texte récent (http://vigile.quebec/Le-desir-maladif-de-plaire-aux). J'aurai prochainement l'occasion d'approfondir ma pensée... et de proposer quelques pistes de solution susceptibles de permettre de libérer les esprits encore emprisonnés dans leur passé. À suivre...

  • François Ricard Répondre

    24 mars 2016

    Je souscris totalement au but de déloger le PLQ à la prochaine élection. Je suis aussi partisan d'une approche vraiment indépendantiste. Si le PQ prend le pouvoir, il oeuvra à l'indépendance complète du Québec.
    Mais depuis des années et des années, surtout durant les campagnes électorales, je rencontre les gens chez eux. Souventes fois ces questions nous reviennent:
    ---"C'est qui qui sera chef de ce nouveau pays? Ce sera-t-il encore la reine? Ce sera-t-il Péladeau?"
    "Il aura l'air de quoi ce nouveau pays? Est-ce qu'il va ressembler à la France? À Cuba? aux USA?"
    Et je vous répète, ces questions reviennent sans cesse. À date, il faut répondre que le tout sera réglé après que nous aurons obtenu notre indépendance. On peut lire alors le scepticisme dans leur visage. Ils ont comme l'impression que l'on leur demande un chèque en blanc.
    Pourquoi, sans aller dans les détails, leur donner un bon aperçu de ce que sera le pays Québec? Nous gagnerions beaucoup en crédibilité.

  • Normand Paiement Répondre

    24 mars 2016

    @ J. Binette
    Relisez bien ce que j'ai écrit: «La priorité, selon moi, c’est de déloger les libéraux en 2018 ET d’enclencher aussitôt que possible le processus d’accession du Québec à son indépendance.»
    Nous sommes donc tout à fait d'accord sur ce point: il ne suffit pas de vouloir remplacer les libéraux en proposant de former un «bon gouvernement». Le PQ a déjà essayé cette formule bidon... avec les résultats que l'on sait! Quarante ans plus tard, nous sommes toujours en quête d'un pays...
    Vous conviendrez néanmoins avec moi qu'il est impossible de faire l'indépendance sans prendre tout d'abord le pouvoir à Québec. D'où mon insistance sur ce point crucial pour l'avenir de notre cause...
    Cordialement,
    Normand Paiement

  • Normand Paiement Répondre

    23 mars 2016

    Monsieur Ricard,
    Depuis le temps que je regarde ses vidéos, j'en suis venu à la conclusion que l’ingénieur Jean-Jacques Nantel a trouvé la formule gagnante, comme en témoigne encore une fois sa plus récente: https://www.youtube.com/watch?v=zLjKgaRgB0U&feature=autoshare.
    Vouloir refaire le monde tant et aussi longtemps que le Québec n'aura pas acquis son indépendance m'apparaît comme un exercice d'autant plus futile que chaque indépendantiste a, comme vous, sa propre vision du régime politique que nous devrions adopter. Il en résulte inévitablement que nous nous disputons sur des détails au lieu de nous concentrer sur l'essentiel: démontrer par A + B que l'indépendance sera payante, TRÈS payante, comme ne cesse de le répéter M. Nantel, preuves à l'appui, et comme JAMAIS aucun indépendantiste digne de ce nom, pas même Jacques Parizeau, n'a su le faire jusqu'à présent.
    L'intérêt d'avoir élu PKP à la tête du PQ, c'est qu'il est le premier homme d'affaires prospère, à ma connaissance, à avoir pris ouvertement position en faveur de l'indépendance. (Oublions François Legault, qui, de toutes façons, a changé de camp depuis et n'arrive pas à la cheville de PKP en la matière.) Pour une fois que le PQ a un chef qui a la crédibilité nécessaire pour tenir tête aux libéraux sur la question de l'économie, nous devrions nous en réjouir au lieu de lui faire à tout bout de champ des reproches au sujet de son manque d'expérience en politique!
    Dans ma lettre ouverte, j'ai écrit à PKP: «Quand la majorité des Québécois auront enfin compris que l’indépendance est une nécessité absolue, ils vont tout naturellement vous appuyer majoritairement le moment venu.» J'en suis profondément persuadé, et c'est pourquoi nous devrions tous faire passer ce message à nos compatriotes, immigrants compris.
    J'ajouterai en terminant que les vigiliens devraient être les premiers à défendre cette position bec et ongles au lieu de perdre leur temps à spéculer sur l'avenir et à se chamailler entre eux comme des enfants d'école!
    Cordialement,
    Normand Paiement

  • Archives de Vigile Répondre

    23 mars 2016

    M. Paiement,
    Très intéressante analyse. Mais les débats sur le système proportionnel ont au moins le mérite de vouloir modifier le système actuel, le moins démocratique qui soit, De ces débats pourrait ressortir l'idée d'un système à deux tours, on verra bien, mais sûrement pas un modèle de proportionnel parfait.
    Par contre, je suis en total désaccord avec votre commentaire du 23 mars, 10h42. La priorité des indépendantistes ne doit pas être de déloger les Libéraux. LA priorité, en 1970, comme en 1976, comme en 2016 doit être de faire l'indépendance. La priorité électorale des Péquistes de Pierre-Marc Johnson, puis de ceux de Bouchard ou de Marois d'avoir voulu à tout prix nous débarrasser des Libéraux a conduit à des remplacements de gouvernements provinciaux avec un Parti québécois qui ressemblait de plus en plus aux Libéraux tant honnis. Ceux qui veulent à tout prix se débarrasser des Libéraux, c'est comme ceux qui voulaient à tout prix se débarrasser de Harper: ça a mené à agir comme des Canadians en oubliant trop souvent la cause du pays du Québec. Un appel du pied à la CAQ ne peut fonctionner que si le PQ abandonne l'Idée d'indépendance. Ce n'est pas mon choix. MOn choix est plutôt de tenter de coaliser les différentes tendances indépendantistes avec un programme de libération nationale, pas un programme de remplacement de gouvernement provincial par un autre.

  • François Ricard Répondre

    23 mars 2016

    M. Paiement,
    Il faut parler maintenant du pays que nous aurons, du fonctionnement qu'il aura.
    Nous faisons l'indépendance. Bien. Mais cette indépendance la faisons-nous pour la reine d'Angleterre? Pour nous donner un dictateur? Le généralissime PKP?
    C'est une question qui nous revient constamment en période électorale:"Il aura l'air de quoi, ce pays?" Et jamais nous n'avons répondu à cette question des électeurs.
    On se contente de dire:"Nous serons indépendants."

  • Normand Paiement Répondre

    23 mars 2016

    Messieurs Ricard, Wilkins et Lespérance,
    Merci pour vos commentaires. Permettez-moi de préciser que je ne conteste pas l'idée que notre système parlementaire a besoin d'être réformé en profondeur. J'estime toutefois qu'il est prématuré d'aborder cette question maintenant.
    La priorité, selon moi, c'est de déloger les libéraux en 2018 et d'enclencher aussitôt que possible le processus d'accession du Québec à son indépendance. Il sera toujours temps par la suite de décider notamment quel mode de scrutin nous voulons adopter dans l'avenir...
    Cordialement,
    Normand Paiement

  • Jean Lespérance Répondre

    22 mars 2016

    Je vous remercie pour la finesse de vos explications et pour avoir simplifié habilement les avantages et les inconvénients des deux modes de scrutin. Mais le plus gros problème auquel nous faisons face, ce sont les abus du gouvernement en place et là dessus je partage l'opinion de M. François Ricard. Je me souviens que Mme Angela Merkel s'est permise d'octroyer à la BCE, une somme rondelette de 400 milliards de dollars , prise à même les coffres du pays sans demander la permission à personne. On s'est par la suite interrogé sur la légitimité de l'opération, mais il était trop tard. Or pour empêcher les abus de pouvoir de la part du gouvernement en place, je ne vois pas d'autres solutions que d'instaurer des référendums d'initiatives populaires pour contrer toute décision déraisonnable. Et une loi d'impeachment ou de destitution comme en Californie pour tout gouvernement ou personne qui s'entête à mal agir. Le mode de scrutin n'est pas ce qui est le plus important, c'est le pouvoir que s'accorde le peuple en tout temps.

  • James A. Wilkins Répondre

    22 mars 2016

    Très bonne analyse Monsieur Paiement. Les distorsions du système électoral actuel doivent certainement être corrigées. Un scrutin uninominal majoritaire à 2 tours serait moins compliqué qu'une proportionnelle mixte régionale modérée en ne créant pas deux classes de députés. Votre suggestion a le mérite d'améliorer notre démocratie et d'atteindre l'objectif que chaque vote compte.
    Plusieurs comtés du West Island seront privés de la nécessité du deuxième tour !

  • François Ricard Répondre

    22 mars 2016

    Notre système parlementaire à la britannique est une charrette à boeuf. Adopter la proportionnelle, ou un autre mode de scrutin, équivaudrait à remplacer les roues de la charrette par des ailes ou des skis..
    C'est le système lui-même qui est vicié et vicieux.
    n régime vraiment démocratique fait une nette différence entre les trois pouvoirs : le législatif, l’exécutif et le judiciaire.
    En notre système, le tout se retrouve dans la même personne : le premier ministre. Tous les élus lui doivent entière obéissance. Ils doivent dire comme lui; approuver toutes ses décisions.
    Il nomme et dégomme les ministres. Il nomme et dégomme les hauts fonctionnaires. Il nomme les juges. Ses députés lui doivent totale obéissance.
    Nous élisons des représentants qui diront comme le chef, qui agiront comme le chef, qui approuveront toutes les décisions du chef. De véritables zombies qui sont à l’écoute exclusive du chef et non à l’écoute de leurs électeurs.
    Et ces zombies sont élus par des super-zombies : nous de l’électorat. Parce que nous votons pour l’élection de ces zombies, nous nous croyons en démocratie.
    Si,avec l'indépendance, nous voulons nous débarrasser de cette charrette à boeuf.