L'engagement en politique, essentiel à la démocratie, est donc un choix noble. C'est un mystère qu'il soit aujourd'hui aussi déconsidéré. Si l'on perçoit si mal les gens de politique comment expliquer qu'on les a élus? Cela confirme la célèbre phrase de Churchill: "La démocratie est le pire des systèmes, mais il n'y en a pas de meilleur!"
Le métier est donc noble, mais on ne peut nier que si certaines conditions de sa pratique ne sont pas respectées, il peut devenir ignoble. C'est parfois le cas, hélas.
D'abord la motivation fondamentale d'un élu doit être l'attachement au bien commun. Le pouvoir pour le pouvoir ou l'intérêt personnel ne peuvent conduire qu'à la catastrophe.
Pour les indépendantistes du Québec, comme ceux des États-Unis en 1776, de l'Irlande au début du vingtième siècle ou du Monténégro au vingt-et-unième, il est clair que l'idéal est à la base de tout. Est-il un devoir plus noble que de vouloir libérer sa nation? Je n'insinue pas que ceux qui ne partagent pas cet idéal n'ont pas de motivations respectables. Je dis que dans une lutte d'indépendance, la question est sans équivoque.
Pour faire honnêtement de la politique, il faut aussi aimer profondément les gens. Cela est essentiel pour les bien servir. Aimer tout le monde autant que possible, mais surtout les plus démunis, les plus angoissés, ceux qui ont le plus besoin d'estime. Il faut se préparer à être abordé dans la rue jusqu'à la fin de ses jours, et s'en réjouir, par des gens qui critiquent, posent des questions et, plus souvent qu'on ne le croit, félicitent et remercient.
En politique on ne doit pas être motivé par l'argent. Il n'est pratiquement aucun métier moins payé à l'heure : on y travaille douze à quatorze heures par jour, à Québec sur semaine, et dans le comté le reste du temps. Même en vacances, on doit rentrer pour un décès de notable, crise du verglas, inondation ou exposition agricole.
On dit que choisir le service public c'est "renoncer à devenir riche contre l'assurance de n'être jamais pauvre". C'est largement vrai. Sans compter qu'il n'y a aucune sécurité d'emploi: les électeurs peuvent virer les élus à chaque fin de mandat, et heureusement.
Dans ce métier, il faut aussi dire la vérité. Pas forcément toute la vérité, car certaines choses doivent rester secrètes. Les détails du prochain budget, par exemple, pour éviter la spéculation. Pour le reste, il ne faut jamais mentir. On est observé par des milliers de personnes et épié par une presse plus que vigilante.
Enfin, il est malhonnête de faire passer les intérêt du parti avant ceux de la patrie. Les anglophones et les allophones de Montréal, ce qui est leur droit le plus strict, votent massivement libéral. Ce qui a amené Jean Charest à défaire des fusions, réclamées depuis Jean Drapeau et réalisées par le courage de Lucien Bouchard. Cela a fini par une situation catastrophique et des défusions sur bases etho-linguistiques! C'est le contraire de ce que doit faire un politicien honnête.
Bernard Landry
L’opinion de Bernard Landry #101
Honnêteté et politique
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Ancien premier ministre du Québec, professeur à l'UQAM et professeur associé à l'École polytechnique
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