Course à la mairie de Montréal

Harel place sa confiance en Côté

La chef de Vision Montréal s’allie à un fédéraliste notoire issu du milieu des affaires

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Quand le pragmatisme verse dans le cynisme

Faute d’appuis suffisants chez les anglophones, Louise Harel renonce à la mairie de Montréal pour s’allier à Marcel Côté, fondateur de la firme Secor. M. Côté donnera le coup d’envoi à sa campagne électorale mercredi matin et tentera de se faire élire à la mairie le 3 novembre prochain à la tête d’une coalition. Mme Harel demeurera chef de Vision Montréal et briguera un poste de conseillère de ville dans le district de Sainte-Marie, au centre-ville.
Louise Harel menait depuis plusieurs semaines des discussions avec Marcel Côté afin de conclure une alliance stratégique en prévision du scrutin de l’automne. Lors d’une conférence de presse mardi matin en compagnie des élus de son parti, Mme Harel a reconnu qu’elle n’était pas parvenue à attirer l’électorat anglophone. « C’est un secret de polichinelle que j’avais de la difficulté à percer dans l’ouest de l’île », a-t-elle admis.
Mme Harel retirera donc sa candidature à la mairie, et son parti formera une coalition avec Marcel Côté, candidat à la mairie indépendant. Cette alliance réunira deux personnalités aux antipodes : souverainiste et sociale-démocrate, Louise Harel conclut un pacte avec un fédéraliste notoire issu du milieu des affaires.
Louise Harel soutient qu’une telle coalition servira mieux les intérêts de Montréal. « Marcel Côté va certainement rallier l’Est et l’Ouest. C’est déjà un bon point en sa faveur, a-t-elle expliqué. Il aime Montréal, se préoccupe de Montréal et s’inquiète de Montréal depuis longtemps », a-t-elle ajouté en soulignant la contribution de M. Côté dans la réflexion sur la gouvernance de Montréal avec la publication, en 2010, du rapport Côté-Séguin.
Marcel Côté lancera sa campagne mercredi matin. Louise Harel et lui feront une « déclaration commune » pour officialiser la création de la coalition. Ils seront accompagnés d’élus de Vision Montréal, mais également de conseillers indépendants provenant des rangs de l’ancien parti de Gérald Tremblay, Union Montréal. On peut s’attendre à ce que Marvin Rotrand fasse partie de ces élus, lui qui a récemment vanté la candidature de Marcel Côté. Dans l’entourage de M. Côté, on indique que quelque 200 personnes devraient assister à cette annonce, parmi lesquelles des personnalités du monde des affaires et du milieu artistique.
Marcel Côté a déposé son dossier de candidature au président d’élection à la Ville de Montréal. Comme il briguera la mairie à titre d’indépendant, il n’avait pas à obtenir l’autorisation du Directeur général des élections (DGE) avant de lancer sa campagne, a-t-on indiqué au bureau du DGE. Son cas est donc différent de celui de la candidate à la mairie Mélanie Joly, qui s’est récemment fait rappeler à l’ordre par le DGE et qui entendait former un parti politique.

Candidate dans Ville-Marie
Mme Harel, qui dirige Vision Montréal depuis juin 2009, n’entend pas quitter l’arène politique. Elle sollicitera un poste de conseillère de ville dans Sainte-Marie, un district de l’arrondissement de Ville-Marie détenu par Pierre Mainville. Elle délaisse donc son fief, celui de Mercier -Hochelaga-Maisonneuve, où elle siège depuis quatre ans comme conseillère. Le district de Sainte-Marie est toutefois situé dans son ancienne circonscription d’Hochelaga-Maisonneuve, qu’elle a représentée pendant 27 ans à l’Assemblée nationale comme députée du Parti québécois.
Louise Harel affirme ne pas avoir réclamé pour elle un poste précis au sein d’une administration de coalition si Marcel Côté l’emporte le 3 novembre : « Je ne me suis rien négocié personnellement. Je sais cependant que je jouerai un rôle de premier plan au sein de la coalition. J’ai plus d’ambition pour la ville que pour moi-même. »
Après des semaines de discussions, les élus de Vision Montréal ont accepté ce mariage stratégique. « Je pense que Marcel Côté pourra faire un lien plus efficacement et plus facilement entre l’Est et l’Ouest », a expliqué le maire de Mercier -Hochelaga-Maisonneuve, Réal Ménard. « Et M. Côté croit à la coalition. Une coalition, c’est une façon de gouverner très prometteuse pour Montréal parce que ça met fin à toute la réalité du vote géolinguistique. […] Il va amener avec lui autant les libéraux que les péquistes. Les grandes familles politiques peuvent s’allier à cette coalition-là. »
La conseillère Caroline Bourgeois reconnaît que cette alliance avec Marcel Côté a donné lieu à de « bonnes discussions » au sein de caucus de Vision Montréal. « On en est tous venus à la même conclusion : qu’il fallait se rallier dans un principe de coalition », a-t-elle dit.

«Improvisation»
Les adversaires de Louise Harel n’ont pas manqué de critiquer cette manoeuvre. Le chef de Projet Montréal et candidat à la mairie, Richard Bergeron, a reproché à Mme Harel d’utiliser le terme « coalition » alors qu’il s’agit d’une « alliance électoraliste » marquée par l’improvisation. Selon lui, ce n’est pas d’une coalition dont Montréal aura besoin au lendemain des élections du 3 novembre. « Les gens savent ce qu’est Projet Montréal : c’est un parti politique, pas une boîte à surprises. On ne sait pas ce que donneront ces alliances électorales des uns et des autres », a-t-il dit en écorchant au passage la « coalition » de Denis Coderre.
Dans le camp de Denis Coderre, la mairesse de Rivière-des-Prairies -Pointe-aux-Trembles, Chantal Rouleau, parle d’un « troisième mariage » pour Louise Harel après ses unions avec Benoit Labonté et Michael Applebaum. « Je me demande si elle agit par opportunisme et électoralisme. C’est ce qu’elle avait dit que j’avais fait, moi », lance l’ancienne élue de Vision Montréal qui a grossi les rangs de l’équipe de Denis Coderre en mai dernier.
Pour la candidate Mélanie Joly, la décision de Louise Harel est un aveu de son incapacité à rallier l’ensemble des Montréalais. « Clairement, c’est une réponse à l’impopularité de Louise Harel dans les villes qui ont fusionnée et auprès de la communauté anglophone. On essaie de faire du neuf avec du vieux », soutient-elle.
Rappelons que le parti de Louise Harel compte 12 élus au conseil de ville de Montréal et qu’il traîne une dette de quelque 550 000 $ héritée de la campagne électorale de 2009.
Quant à Marcel Côté, il détient une longue feuille de route, ayant notamment oeuvré dans le cabinet de Brian Mulroney et de Robert Bourassa et développé une importante expertise en matière de conseil stratégique au sein de la firme Secor. Mais il compte plusieurs déclarations intempestives à son actif. L’an dernier, il a qualifié de « crime contre l’humanité » le fait de subventionner les abonnés d’Hydro-Québec. Il a également soutenu que « la mafia est plus démocratique que les organisations étudiantes ».


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