Selon le nouveau député Gabriel Nadeau-Dubois, Québec solidaire serait bientôt aux portes du pouvoir. En entrevue avec La Presse canadienne, l’ex-leader étudiant se dit même prêt à occuper le siège de premier ministre. Rien de moins.
Comme le fait remarquer mon collègue Antoine Robitaille, c’est le genre de déclaration dont le but est surtout d’encourager ses troupes à mener le combat électoral dans l’espoir, un jour, d’arriver au sommet du pouvoir.
Bref, c’est essentiellement de l’esbroufe préélectorale.
Pour un député nouvellement élu dont le parti est quatrième à l’Assemblée nationale et dans les intentions de vote, gare néanmoins à en tartiner trop épais dans le département du «pep talk» partisan.
D’autant plus qu’en rejetant toute forme d’alliance électorale avec le Parti québécois, même minimale, comme je l’explique dans ma chronique de ce matin, QS s’est certes fait plaisir en misant sur sa propre progression au lieu de tenter réellement de déloger les libéraux. Mais en même temps, QS s’est privé d’une alliance qui aurait pu lui faciliter une certaine percée à l’extérieur de Montréal.
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La convergence : une erreur?
Sur ce même thème de la convergence maintenant avortée, plusieurs reprochent au chef péquiste de s’y être trop aventuré. Une grave erreur, selon des souverainistes qui y étaient opposés dès le début.
Or, si l’on peut certainement reprocher à Jean-François Lisée ses multiples virages au fil des ans et sa véritable erreur qui est d’avoir procédé à une énième mise en veilleuse de l’option souverainiste, lui reprocher d’avoir tenté cette convergence est proprement injuste.
En fait, cette idée d’une possible convergence PQ-QS remonte à 2011-2012, sous Pauline Marois, alors qu’elle était chef de l’Opposition officielle.
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Il n’y a pas si longtemps...
À l’époque, le sujet se discutait sous d’autres appellations : alliance électorale, rapprochement, coalition souverainiste, etc.
Le hic était la tiédeur de QS face à cette idée. Mais il était aussi connu que ces discussions au PQ n’enthousiasmaient guère Mme Marois, loin s’en fallait. Cette idée était en fait poussée par certains députés inquiets, avec raison, de l’extrême difficulté pour le PQ de remporter une victoire majoritaire face à une CAQ lui disputant une partie de son électorat et dont la prochaine élection générale serait la première.
Et, en effet, arriva ce qui arriva. Le 4 septembre 2012, malgré trois mandats libéraux consécutifs, des scandales à la pochetée, la grève étudiante et la commission Charbonneau, le PQ prenait le pouvoir, mais minoritaire.
La CAQ, elle, raflait déjà 27% des voix – un score impressionnant pour un tout nouveau parti à son premier scrutin
Par pur pragmatisme et réalisme, l’idée d’une alliance électorale PQ-QS fut aussi portée avec raison par le successeur de Mme Marois, Pierre-Karl Péladeau.
Qui plus est, il nomma sa députée Véronique Hivon responsable du dossier. Mme Hivon était en effet la meilleure ambassadrice possible et y a mis des efforts carrément herculéens.
Bref, le fait qu’à leur dernier congrès, les solidaires aient tourné le dos à toute alliance électorale avec le PQ pendant que certains de ses militants accusaient les péquistes d’être des«racistes», n’est ni de la faute de Mme Hivon, ni celle de ses deux derniers chefs successifs.
En mai dernier, le député péquiste Pascal Bérubé l’a d'ailleurs reconnu lui-même avec une honnêteté spectaculaire. Sans pacte électoral avec QS, disait-il, un gouvernement majoritaire du PQ devient très difficile à envisager. Un euphémisme, dans les faits.
Il fut rabroué pour ses propos, mais M. Bérubé avait quand même mis le doigt sur un très gros bobo bien concret.
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Un constat incontournable
L’idée même de la convergence était donc née d’un constat qui, de fait, crève les yeux.
Dans cette nouvelle dynamique multipartite où le vote francophone se divise comme jamais pendant que le vote anglophone et allophone reste acquis aux libéraux, à moins d’un écrasement fort peu probable de la CAQ et d'un recul étonnant de QS, l’élection d’un gouvernement péquiste majoritaire est devenue une impossibilité mathématique.
Et si la tendance se maintient - certes un gros «si», pour le moment -, même l'élection d'un gouvernement péquiste minoritaire pourrait devenir impossible.
Sans oublier aussi que depuis l’élection de 1998, sous l’effet combiné des mises en veilleuse à répétition de son option et de son inconstance sur des enjeux de fond, dont la question linguistique – une inconstance constatée même par le premier rapport du péquiste Paul St-Pierre Plamondon -, à quelques rares exceptions près, dont sous PKP, le PQ ne cesse de voir ses appuis fondre.
Après tout, ses deux nouveaux adversaires, QS et la CAQ -, sont en quelque sorte nés de lui.
La CAQ ayant été co-fondée par François Legault, un ex-ministre péquiste. QS ayant été créé en grande partie en réaction à la chasse au déficit-zéro sous Lucien Bouchard.
Or, dans le dernier sondage Léger, le Parti québécois glisse même à 23%. Ce faisant, il atteint son plancher historique pendant que ces deux partis nés d'une certaine manière de ses propres entrailles, voient leurs appuis grimper.
Donc, une «erreur» cette idée de convergence ou de pacte électoral?
Non. Tout simplement un sursaut de lucidité.
Maintenant, si seulement le PQ appliquait aussi cette même lucidité à l’analyse des vraies raisons derrière ce lent effritement de ses propres appuis dans l’électorat depuis vingt ans - sauf pour de très brèves parenthèses où son option redevenait sa raison d'être -, les chances de sa propre survie en seraient peut-être décuplées.
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