Gérard Deltell et la vie en bleu

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Les petits calculs de Deltell

Gérard «le bleu» Deltell n’est pas vraiment nostalgique de sa famille politique. C’est un politicien pragmatique et ambitieux, las de siéger éternellement dans l’opposition.
Il a pris une décision tournée vers l’avenir (son avenir) en quittant la CAQ pour faire le saut au fédéral avec les conservateurs du premier ministre, Stephen Harper.
«Je suis un vrai bleu» a dit Deltell pour justifier sa décision de quitter son siège de député de Chauveau, un an après son élection. Traduction pour les non-initiés de la rhétorique politique : «Les sondages ne mentent pas. Le climat se réchauffe pour les conservateurs au Québec, et mes chances d’obtenir un portefeuille au sein d’un gouvernement conservateur sont meilleures qu’elles ne l’ont jamais été.»
Il y a un an, lorsque Gérard Deltell a décidé de solliciter un troisième mandat à l’Assemblée nationale, les conservateurs n’étaient pas en aussi bonne posture qu’ils le sont aujourd’hui.
Honni des environnementalistes, des étudiants et de la gauche en général, le Parti conservateur récolte 13 % des intentions de vote dans tout le Québec, loin derrière le PLQ (37 %) et le NPD (30 %), selon un sondage CROP réalisé à la mi-février. Par contre, dans la région de Québec, les conservateurs sont en tête avec 38 % des intentions de vote. Le NPD suit, avec 33 % des votes, et viennent ensuite les libéraux, avec 16 %. Les conservateurs ont fait le calcul : la division du vote de centre gauche entre Thomas Mulcair et Justin Trudeau leur permet d’entretenir l’espoir d’une percée dans la région de Québec et l’est de la province. Le parti vise une quinzaine de sièges.
C’est à la lumière de ces résultats qu’il faut analyser le «retour aux sources» de Gérard Deltell. Jeune étudiant, en 1981, il est membre du Parti conservateur de… Joe Clark.
À son retour à la maison, il découvre rapidement que le décor a changé. Le Parti conservateur est imprégné de l’idéologie du défunt Reform Party. Le poids économique et politique de l’Alberta porte la formation un peu plus à l’ouest dans ses préoccupations courantes, et un peu plus à droite dans ses politiques qu’à l’époque de Joe Clark.
Nul doute que Gérard Deltell est un bleu, un vrai. Il sera en mesure de s’adapter à la culture du silence et au respect absolu de la ligne de parti imposés par Stephen Harper. Le premier ministre a toujours mis en valeur, parfois même trop, les rares députés conservateurs du Québec dans la formation de ses cabinets ministériels.
Si Harper remporte les élections cet automne, Deltell est en droit d’espérer un rôle enviable dans le futur cabinet.
Et la CAQ ?
Son départ est un dur coup par la CAQ, mais il donne l’occasion à François Legault de renouveler son équipe. Il a su recruter un candidat vedette en l’ex-animateur François Paradis pour combler le siège laissé vacant par la démission de Christian Dubé dans Lévis.
François Legault est condamné à recruter des candidats de prestige s’il veut préserver son capital de sympathie dans les intentions de vote. L’impopularité du premier ministre Philippe Couillard fait maintenant de lui le meilleur chef aux yeux des Québécois, selon un sondage CROP réalisé à la mi-mars. Legault récolte 21 % des appuis, contre 20 % pour Couillard. Le PLQ récolte encore 29 % des suffrages, contre 27 % pour le PQ, 26 % pour la CAQ (en hausse de 4 %) et 16 % pour Québec solidaire (en hausse de 5 %).
Les résultats sont trompeurs, puisque le PQ est encore à la recherche de son PKP. Lorsque Pierre Karl Péladeau sera couronné chef de la formation souverainiste au terme de cette course ennuyante, François Legault trouvera un adversaire de taille.
Péladeau courtisera, comme lui, les électeurs francophones sensibles aux questions d’économie et d’identité.
La CAQ ne peut devenir le parti de François L’ego. Pour combler le siège laissant vacant par le départ de Gérard Deltell, dans Chauveau, il devra se surpasser.
La circonscription de Chauveau est acquise à la CAQ. Lors des deux dernières élections, en 2012 et en 2014, Deltell y a récolté 53 % et 52 % des suffrages. C’était plus que tous les autres candidats réunis. La circonscription est acquise à la CAQ, mais la CAQ ne devrait pas prendre pour acquis ses appuis bien fragiles dans l’électorat.


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