Francophonie en Ontario : « La situation projetée est alarmante »

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Demain, la disparition des Franco-Ontariens : l'immigration n'y changera rien

Le poids démographique des francophones en Ontario est en baisse significative et le Commissariat aux services en français de l'Ontario lance un appel à l'aide aux politiciens de Queen's Park.


Le commissaire aux services en français, François Boileau, a remis son rapport annuel au Parlement provincial, mercredi.


Dans celui-ci, il rend compte des changements démographiques dans la province. Il souligne que le nombre de francophones en Ontario est en hausse, mais que leur poids démographique est en baisse importante, au point où les priorités des francophones risquent de sombrer dans l’indifférence d’ici quelques années à peine.


La situation projetée est alarmante, peut-on y lire.


Puis, en conférence de presse à Queen's Park mercredi, M. Boileau est revenu à la charge.



Notre équipe et moi avons bien pris le temps de rechercher les mots que nous voulions utiliser pour exprimer ce que nous voulons dire. Nous tirons la sonnette d’alarme. Je crois que ce sont des mots très forts.


François Boileau, commissaire aux services en français de l'Ontario



Selon le recensement de 2016, le poids démographique des francophones dans la province est passé de 5,2 % en 1996 à 4,7 % en 2016. À moins d’un renversement spectaculaire de la situation, ces chiffres continueront de chuter de manière exponentielle dans les années à venir.


Dans son rapport, M. Boileau s’efforce d’offrir des recommandations en lien avec l’immigration francophone et exhorte les politiciens provinciaux à permettre à un maximum de francophones de s’y installer.


Ironiquement, Doug Ford, le premier ministre nouvellement élu, a aboli le ministère des Affaires francophones ainsi que le ministère de l’Immigration lors de son entrée au Parlement.


Le mot d’ordre : « immigration »


Des 14 recommandations du rapport, 9 sont en lien avec l’immigration.


Par exemple, M. Boileau suggère de retirer l’exigence de la maîtrise de la langue anglaise du volet Travailleurs qualifiés francophones du programme ontarien Entrée express.


Le vieillissement de la population francophone en Ontario fait également partie des préoccupations de M. Boileau et de son équipe. Selon les projections comprises dans le rapport, la population francophone âgée de 65 ans et plus atteindra 165 831 personnes, soit une proportion de 25,6 %. Encore une fois, la solution offerte par M. Boileau réside dans l’immigration.


Les médias au coeur du rapport


La situation financière des médias en général, mais surtout de ceux de langue française dans la province inquiète le Commissariat. Tous les médias sont affectés par des baisses de revenus publicitaires, et les médias de langue française en Ontario font face à des tendances lourdes qui affectent l’ensemble de l’industrie médiatique, peut-on lire dans le rapport.



Il est illusoire de penser que seules les lois du marché leur permettront de redresser leur situation financière, de se moderniser, d’innover et de demeurer des producteurs de contenus pertinents en français.


Rapport annuel du Commissariat aux services en français de l'Ontario


M. Boileau recommande donc au gouvernement provincial de développer, prioriser et recommander des mesures concrètes pour assurer la viabilité des médias francophones.


Réactions vives


Caroline Mulroney est la ministre déléguée aux Affaires francophones, des responsabilités qu'elle partage avec celles de son poste de Procureure générale. Elle affirme que l'immigration francophone est une priorité pour elle. « On veut attirer autant de personnes en Ontario que possible et il y a beaucoup d'occasions pour les francophones pour venir en Ontario, donc c'est certainement une priorité pour moi en tant que ministre déléguée aux Affaires francophones », a-t-elle déclaré à Queen's Park mercredi.


Le portrait d'une femme au ParlementCaroline Mulroney, à Queen's Park mercredi Photo : Radio-Canada/Cedric Lizotte


Même si elle ne se dit pas surprise des conclusions alarmantes du rapport de M. Boileau, France Gélinas, du Nouveau Parti démocratique, use de qualificatifs forts pour parler de la situation des Franco-Ontariens.


Une femme parle aux membres des médiasFrance Gélinas, du Nouveau Parti démocratique Photo : Radio-Canada/Cedric Lizotte



Chaque page (du rapport) crie la même chose : le besoin immédiat d'agir si on veut que la francophonie continue d'exister en Ontario


France Gélinas, du Nouveau Parti démocratique ontarien


De son côté, Marie-France Lalonde, la dernière ministre aux Affaires francophones et députée du Parti libéral, offre une réaction plus équilibrée. Au sujet du poids démographique, elle affirme que « c’est une situation qu’on se doit de surveiller dans les années à suivre ». Mme Lalonde rappelle aussi que l’immigration est une responsabilité fédérale.



De plus, elle identifie dans le rapport de M. Boileau quelques éléments sur lesquels son bureau ont travaillé lors des années passées et avant les dernières élections. « L’Université de l’Ontario français est un élément important et structurant pour la population francophone de l’Ontario et on est très fiers de voir que le rapport de M. Boileau comprend une recommandation en ce sens. »