Ainsi donc le pape de l’actualité internationale serait tombé de son piédestal. Est-ce que cela me réjouit? Bien sûr que oui. Ça fait au moins deux ans que je casse les oreilles à mes amis à propos de la médiocre qualité des nouvelles internationales au Québec. Deux ans, que je déplore le fait que toutes les nouvelles internationales sont laissées à l’expertise de deux personnes, l’une étant François Bugingo. Vais-je frapper sur quelqu’un déjà au sol? Normalement, je n’aime pas beaucoup ce procédé mais dans ce contexte, je ne me gênerai pas pour attaquer quelqu’un qui pourrit l’esprit de beaucoup de gens depuis des années.
Il y a de cela deux semaines, 10 mai 2015, je lisais un texte de ma composition sur le prix Nobel de la paix à la soirée du Cabaret des auteurs du dimanche. Les gens présents pourront vous le confirmer:
« Et que dire des nouvelles internationales auxquelles nous avons droit ici? Laissez-moi rire, le 4 cinquième des nouvelles internationales des journaux québécois proviennent de l’AFP, sans compter les oiseaux savants que sont François Brousseau et François Bugingo… Tiens, donnez leur donc le Pulitzer pour leur travail minable, ils ne font que radoter ce que dit l’AFP sur toutes les tribunes, l’un dans Le Devoir, toute la journée à la radio de Radio Canada, je dis toute la journée parce qu’il est invité plusieurs fois par jour, et souvent à la télévision, et l’autre chez Québecor. Aucun esprit d’analyse. Rien. Zéro. Les Russes sont méchants, le Venezuela et Cuba sont des dictatures… N’oubliez pas que l’AFP qui les abreuve n’est pas objective, ce n’est qu’un ramassis de gens des plus grands médias français qui, donc, appartiennent au complexe militaro-industriel français: Lagardère, Pinault, Dassault, Bouygue, Bolloré, etc. […] Toutes ces pies jacasseuses nous replongent dans une guerre froide et j’ai l’impression qu’ils ne se rendent même pas compte qu’ils sont bêtement utilisés… »
Alors le fait que M. Bugingo ait menti, qu’il se soit inventé une vie, à mi-chemin entre un agent secret et un correspondant de guerre, le tout depuis son sous-sol… Disons que ça me réjouit que le pot aux roses ait été découvert, puisque je me sens soudain moins seul, mais d’un autre côté, je m’en fous complètement. Ce n’est pas cela que je dénonce. C’est le fait qu’on ait laissé cet homme vomir ses insanités sur toutes les tribunes, sans jamais le contredire. Et dans les émissions qui le recevaient fréquemment, qui pouvait le contredire? Benoît Dutrizac? Marie-France Bazzo? Pierre Bruneau? Voilà, une partie du problème. Pourquoi se tenir au courant sur l’actualité internationale, si nous pouvons laissez ce soin à un jobeur de service. Et j’avoue ce n’était pas nécessairement évident de comprendre toute la merde que disait Bugingo. Par exemple, sur la situation au Myanmar, en Mauritanie ou au Liban; si on ne connaît pas bien ces situations politiques, comment le contredire? Cependant, lorsqu’il parlait de l’Ukraine ou du Venezuela, là je pouvais m’en apercevoir, parce que ce sont des situations politiques que je connais, pour lesquelles j’ai lu et me suis documenté. À partir de ce moment là, le doute est dans mon esprit, alors je mettrai à questionner chacune de ses positions paresseuses d’analyste à deux sous, pie de l’AFP.
L’affaire Bugingo nous remet en pleine figure notre crédulité face aux médias, notre ignorance face aux nouvelles internationales et la paresse générale de beaucoup de journalistes. Là, c’est lui qui est montré du doigt comme un paria de la profession mais dans le fond, il est probablement dans la moyenne. Sans nécessairement s’inventer des vies, beaucoup de journalistes font des erreurs factuelles, tournent les coins rond ou font carrément preuve de malhonnêteté.
Puis pour les autres qui auraient pu l’auréoler à cause qu’il a autrefois été président de Reporter sans frontières Canada. Vous saviez que RSF prend une partie de son financement à travers le National Endowment for Democracy (financé à même le département d’État américain), à travers le Center for a Free Cuba et à travers l’Open Society Foundations de Georges Soros. Le jupon dépasse-t-il M. Bugingo? Ou étiez-vous seulement l’idiot de bonne foi? Un genre de Gérald Tremblay du journalisme international.
Et à tous les journalistes, médias, animateurs et chroniqueurs qui font leurs offusqués parce que Bugingo s’est inventé une vie; je ne me rappelle pas avoir assisté à une telle indignation lorsque nous avons appris que Roger Auque s’était servi de son statut de journaliste au profit du Mossad : « J’ai été rémunéré par les services secrets israéliens pour effectuer des opérations en Syrie, sous couvert de reportage.»
« François Bugingo a pratiquement fait le tour du monde et compte parmi les journalistes qui comprennent le mieux les enjeux géopolitiques de la planète. » -Nathalie Collard, La Presse, 10 mars 2011
« Ils vont le laisser aller au “batte” tout seul, pis le lendemain, ils vont le remplacer par un autre aussi débile que lui » -Benjamin Tessier, cinéaste
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