FN: tout ça... pour ça! La très étonnante évolution du Front dit "National"

Élection présidentielle française



FN: tout ça... pour ça! La très étonnante évolution du Front dit "National"
Anne Kling* - "Le 16 janvier 2011, la fille du chef du Front national, Marine Le Pen, accédait officiellement à la présidence du mouvement. Son élection ne fut guère une surprise, tant les médias avaient déjà fait leur choix. Certes, à proprement parler, ce ne furent pas eux qui votèrent, mais les adhérents. Des adhérents qui avaient été au préalable soigneusement conditionnés par un matraquage médiatique intense au bénéfice de la seule candidate souhaitée. Et ce, durant des années. Au détriment de son challenger à qui l’on fit jouer le rôle de muet du sérail.
Loin d’être inopinée, cette apothéose avait été préparée de très longue date, tant à l’intérieur du FN qu’à l’extérieur. Il fallait à tout prix que la fille du président prît la succession. Et le système fit le nécessaire à cet égard. Ce terme de système, qui reviendra très régulièrement par la suite, mérite d’être explicité dès maintenant pour éviter d’avoir à y revenir plus tard. Par système sont entendus l’ensemble des pouvoirs politique, médiatique et associatif qui, essentiellement depuis l’avènement de la gauche au pouvoir en 1981, marchent main dans la main pour défendre et promouvoir de toutes les façons possibles une certaine idée de la société et de la France. Une certaine idée de gauche naturellement car ce n’est pas faire injure aux médias que de constater globalement leur forte adhésion à ses objectifs: promotion du mondialisme et du métissage généralisé, immigration systématiquement présentée comme une « chance pour la France », valeurs traditionnelles bafouées et quasi criminalisées, au profit de la seule idéologie libérale-libertaire, dite « progressiste ».
S’il pouvait exister avant 1981 une presse considérée comme plutôt à droite, elle a vite subi la contagion de la pensée unique et s’est mise elle aussi à développer les mêmes thèmes, quasiment sur le même mode. Le système a agi comme un rouleau compresseur pour niveler toutes les pensées, rendues obligatoirement conformes, et les restituer un peu partout de la même façon. Inutile d’aller chercher plus loin la désaffection réelle des lecteurs à l’égard de la presse-Pravda.
Le système a toujours manipulé le FN selon sa convenance et il continue à le faire aujourd’hui. Tout l’objet de ce livre est d’en apporter la démonstration. Pendant des décennies, en fait depuis son arrivée au pouvoir politique, la gauche a jugé nécessaire de diaboliser le mouvement pour interdire toute entente des droites. Le FN fut donc diabolisé à mort, avec la complicité des médias, largement de gauche aussi, qui se prêtèrent au jeu à outrance. Et celle, plus trouble, de Jean-Marie Le Pen lui-même qui versait une louche de provocation à intervalles réguliers pour bien entretenir la mécanique. Un véritable jeu de rôles s’est ainsi instauré, du type « toi méchant, moi gentil », auquel chacun des partenaires a trouvé avantage.
Car le système avait également besoin du FN qui remplissait plusieurs fonctions des plus utiles. Celle de bouc-émissaire, la fameuse « lepénisation des esprits » étant naturellement de sa faute et non de celle des irresponsables politiques incapables de résoudre les problèmes qu’ils avaient eux-mêmes créés. Celle de soupape de sécurité car enfin, il fallait bien que le bon peuple pût exhaler sa rancœur à intervalles réguliers avant de rentrer sagement dans le rang. Et bien sûr, il a servi, c’était même sa fonction principale, à maintenir la gauche au pouvoir puisque la droite a toujours eu interdiction formelle, pour des raisons de moralité, de s’allier au diable.
Or, à partir du début des années 2000, ce scénario si bien huilé a commencé à connaître quelques couacs. Les choses ne se passaient plus exactement comme elles auraient dû. Des éléments importants commençaient à échapper aux apprentis sorciers.
C’est à partir de ce moment-là, marqué par davantage d’agitation dans les banlieues « sensibles », accompagnée d’une nette recrudescence d’actes avérés d’antisémitisme, qu’une nette évolution est intervenue.
Tout à coup, avec un bel ensemble, les médias du système se sont mis à ouvrir toutes grandes leurs colonnes, leurs radios, leurs télés, à la fille du président du parti maudit. Pour quelles raisons ? Parce qu’elle était télégénique et avait la langue bien pendue ? Allons donc ! Son père lui aussi était télégénique et n’avait pas sa langue dans sa poche. Parce qu’elle faisait vendre du papier ? Et alors ? Son père en faisait vendre tout autant.
L’explication est trop courte et il faut chercher ailleurs en creusant un peu plus profond. Il faut chercher du côté des raisons politiques d’une dédiabolisation du parti qui est actuellement orchestrée comme l’avait été en son temps son exact contraire. A quelles fins ?
C’est ce que nous aurons l’occasion d’examiner. Mais dès à présent, constatons, s’agissant de l’ « apothéose mariniste », une convergence de vues certaine entre la présidence du mouvement et le système. Les deux faux « ennemis » avaient des intérêts communs à sauvegarder : le président du FN avait le souci primordial de conserver dans le giron familial un patrimoine qu’il considérait comme sa chose personnelle et le système, celui de choisir un futur interlocuteur à sa convenance. Marine Le Pen ayant pris soin de distiller les messages destinés à rassurer quant à sa compatibilité idéologique, si l’on peut oser ce terme, elle était la carte à jouer, sans contestation possible.
Il est clair que, ni pour l’un ni pour les autres, Bruno Gollnisch ne pouvait faire l’affaire. C’était un étranger au clan et en outre il se proposait de rassembler à nouveau tout le camp national. C’est-à-dire tous ceux dont les Le Pen avaient eu tant de mal à se débarrasser au fil des années, et Dieu sait s’ils étaient nombreux ! On voit immédiatement le danger, réel cette fois, pour le système, d’un camp national réunifié et fermement rassemblé sur ses fondamentaux. Dans le contexte économique et social du pays, l’explosion n’était pas loin.
Dans la recherche du moindre mal, mieux valait miser sur l’image plus soft et plus compatible qu’offrait l’héritière. Et lâcher un peu de lest sous forme de pseudo dédiabolisation afin de donner du grain à moudre aux militants et offrir aux braves Français exaspérés l’illusion qu’il était possible de changer les choses. En somme, de quoi les faire patienter encore un peu en rêvant à des jours meilleurs.
Nous allons faire un petit voyage à l’intérieur du FN qui nous démontrera que cette convergence de vues et d’intérêts n’en était pas à sa première manifestation. Alors que les électeurs frontistes croyaient dur comme fer durant toutes ces années voter pour un mouvement antisystème – puisque le système le diabolisait, c’était forcément qu’il était antisystème, non ? - jusqu’à quel point cela était-il vrai ? Et cela a-t-il jamais été vrai dans l’esprit du numéro un du FN?
A-t-il jamais eu la volonté de bâtir une alternative crédible ? N’a-t-il pas plutôt eu le souci d’occuper à lui seul et à son profit exclusif un espace politique qui lui avait été attribué et à l’intérieur duquel il avait les coudées franches ? A condition, naturellement, de demeurer dans un certain périmètre électoral. Dont effectivement il ne sortit jamais.
Si l’on discerne facilement à cet égard les mobiles de l’oligarchie qui nous gouverne, on comprend moins bien de prime abord comment et pourquoi ce mouvement perçu par l’opinion publique comme résistant et contestataire s’est laissé enfermer dans la nasse où il se trouve à l’heure actuelle. Une nasse éventuellement dorée puisque certains dirigeants ont accès à quelques babioles lucratives (mandats européens essentiellement), mais espace réduit cependant. Celui de l’apparente nuisance, sans possibilité réelle d’action.
Or, les circonstances étaient extraordinairement favorables. Historiquement favorables. Pourquoi donc le FN ou plutôt le seul et unique homme qui l’incarnait, Jean-Marie Le Pen, a-t-il si piteusement échoué à faire de son mouvement la grande force populaire de résistance que le système aurait véritablement pu craindre ? Pourquoi est-il resté si étroitement parqué dans son périmètre bien assigné ? Pourquoi ce qui fut quand même à l’origine un authentique mouvement d’opposition nationale dans l’esprit de ses initiateurs, s’est-il réduit à la peau de chagrin actuelle ?
A l’heure où la fille du chef a pris le relais, dans un matraquage médiatique dont le système a le secret – il suffit de se rappeler celui de l’entre-deux tours de la présidentielle de 2002 - mais en sens inverse cette fois, nous devons nous demander ce que cache cette stupéfiante promotion. Car ce virage à 180° est éminemment suspect. Après avoir diabolisé, ou fait mine de le faire, le père durant trente ans, voilà que tout à coup on dédiabolise la fille à tour de bras. Et que les intellectuels de gauche (puisqu’il n’en existe pas d’autres, paraît-il) publient à la chaîne des livres sur le sujet qui sont tout sauf trop sévères. Ils sont même étonnamment complaisants envers celle qu’ils appellent simplement « Marine ».Dans quel but?
Serait-ce parce que chacune des deux faces du système – on n’ose plus vraiment dire gauche, encore moins droite – souhaite ardemment se retrouver au deuxième tour de la prochaine présidentielle face à elle ? Assurée en ce cas d’une victoire à la Chirac. Soyons sûrs que dans cette perspective, la nouvelle présidente du FN newlook montera encore dans les sondages. Suffisamment pour entretenir les espérances de ceux qui veulent y croire et remplir les colonnes des journaux. Mais pas trop quand même. Parce qu’évidemment, tout ce yoyo n’est qu’un jeu électoral. Et le système compte bien avoir le dernier mot, cette fois comme toujours.
L’important étant que ces braves électeurs du FN continuent à s’imaginer faire la nique aux puissants !"
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256 pages, 18 €
_ Editions Mithra – BP 60 291 – 67008 Strasbourg Cedex
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*akling67@hotmail.com


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