Sommeil profond, économies flouées

Face tabou d'une crise floue

Mentalités d'entrée et de sortie de crise

Tribune libre

Tout va bien, tout ira mieux ! Ainsi croit-on ici, par l’habitude. Comment alors malgré cette assurance nos sociétés laisseraient-elles prospérer en leur sein des paradis fiascos et la mafia de la spéculation ? On n’a qu’à se rappeler du cas ENRON aux USA, ou plus près de nous, le cas Norbourg. Ces mafiosi découverts couvrent hélas bien d’autres qui auront le temps de migrer les coffres vers des paradis invisibles. D’autres gens de talents gagnent plutôt bien leur vie, comme cadres des compagnies ou comme experts. Cependant, leurs salaires ne sont souvent pas proportionnels à la richesse/utilité qu’ils servent à créer, ou à sauvegarder. Mais on croit que cela est tout à fait normal !
Dans un cours élémentaire de comptabilité, on apprend que «rien ne se perd et rien ne se crée». Lorsque des millions disparaissent, ils ne s’évaporent pas, ils se déplacent du lieu où ils étaient placés. Ceci est clair. Ce qui est nébuleux, c’est l’absence de volonté ou de capacité de les retracer pour les récupérer sans bousculer les règles du jeu.
Si tout allait bien jusqu’ici, ou en avait l’air, c’est essentiellement à l’effet d’une part, du rôle de la confiance comme pivot à tous les sous-systèmes vitaux de la société, et de la prospérité d’autre part. Il en faut de la confiance pour gouverner, il en faut beaucoup plus pour inspirer et guider. Il faut avoir confiance en soi, mais en société il faut encore savoir et pouvoir faire et inspirer confiance à autrui.
À la base de cette crise financière, se trouve une autre de valeurs. La probité, la lucidité, l’honnêteté et l‘intégrité sont supplantées par l’avidité et la ruse. On peut cependant croire encore que le capital sociétal de confiance n’est pas compromis. Lorsque la confiance ne sera plus de mise, c’est toute notre société qui s’écroulera.
Sans confiance c’est sans serment, sans justice. Sans confiance c’est la méfiance, et c’est la police partout. La méfiance appauvrit et détruit comme la guerre. Celle-ci ne crée aucune richesse, elle les détruit, mais elle crée des emplois. Sans la confiance, on voudra tout reprendre, faire table rase, dompter nos peurs en votant pour des guerres. On voudra tout avoir à l’œil, par caméra et micro interposé. On voudra tout réglementer, jusqu’à la façon de monter dans son lit. Si hier on a sortie la bible des draps, aujourd’hui les codes et lois rentrent à 4 pattes dans la couchette. On ne fait plus confiance à soi, encore moins à qui que ce soit, que ce soit pour se faire soigner, vivre ensemble ou prendre soin des enfants. Touches pas à ma vie privée, laisses-la mourir en paix ! Ainsi de la rue jusqu’aux élus des voix se lèvent comme un seul homme, pour édicter des libertés immorales, envers et contre la morale. Sans la morale, peut-on sauvegarder la confiance ?
Tout va bien, tout est sous contrôle ! Mais rien ne va plus. Manifestement, nos élites sont en panne d’inspirations ! On s’emploie déjà à lire à distance et programmer la pensée, les intentions. On ne croit plus à l’évolution naturelle de l’homme, en sa capacité de savoir et savourer vivre libre. Il aura suffit d’un incident, pour que des murailles à puces soient érigées partout au pourtour des voiries et autres lieux publics, afin de prévenir des accidents. Des murs symboliques de fils barbelés délimitent la cité, à l‘instar des clôtures de pâtures à bœufs. Cela arrive non pas parce que nous le méritons, plutôt à l’effet d’avoir trop de druides sans guide, et d’avoir perdu au passage le sens du devoir de la confiance.
Nous avons aveuglement évacué l’offre de service religieux de toute vie publique ou privée, sans savoir pourvoir à l’entretien des superstructures mentales, vitales au bon fonctionnement de la société. Si les médias pallient à cette défaillance, ils n’ont guère de souci que pour les commerciaux. Et pour cause, l’appât du gain. Maintenant qu’on sait que la morale de l’argent ne fonctionne pas non plus, il ne nous reste qu’à moraliser la politique.

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François Munyabagisha79 articles

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Psycho-pédagogue et économiste, diplômé de l'UQTR
(1990). Au Rwanda en 94, témoin occulaire de la tragédie de «génocides»,

depuis consultant indépendant, observateur avisé et libre penseur.





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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    12 avril 2009

    Bravo François,
    Ton article est un plaisir de lecture et de vérité.
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