Drogués du pouvoir

Qu'avons-nous vu ces derniers jours? Des gens de pouvoir devenus si farouchement partisans qu'ils sont incapables de séparer le bien du mal.

Commission Bastarache



La politique n'est pas un jeu pour enfants. Aucun parti n'est immunisé contre la corruption qui fait son lit au cœur du pouvoir, où elle ne s'embarrasse pas de détails. Il n'y a rien de plus proche des structures mafieuses que ce qu'on appelle les grandes familles politiques. Elles attirent toutes sortes de monde, les meilleurs, mais aussi les pires. Une fois dans l'engrenage, tout le monde devient vulnérable.
L'illusion du pouvoir, celui qu'on pense qu'on a, même s'il est fait de miettes, suffit souvent à ceux qui préfèrent l'ombre à la lumière et qui étalent leur petit pouvoir comme on étale la confiture sur une rôtie quand le pot de confiture est pratiquement vide. Ils font comme s'ils en beurraient épais.
Un parti politique qui naît n'attire d'abord que des idéalistes, des citoyens qui veulent changer le monde, qui rêvent de politiques respectueuses des besoins des citoyens, souvent des rêveurs véritables. Du bon monde, quoi! C'est après, quand le parti a grandi, qu'il a trouvé sa raison d'être et qu'il s'approche enfin du pouvoir, où il est sûr de commencer à réaliser ses objectifs, que tout peut se gâter. Quand ça sent le pouvoir, le parti est soumis à des pressions venues de partout et il fait des mariages de raison pour étoffer son équipe et profiter des gros noms qui vont lui fournir un surplus de crédibilité qui va le porter vers la victoire. Les compromis commencent alors à prendre beaucoup de place.
Après quelque temps, tous les partis politiques traînent un passé qui est plus ou moins lourd, c'est selon qu'on aura réussi à le protéger des prédateurs ou non. Son bagage est souvent fait de trahisons, de promesses non tenues, de petites dettes qui créent des obligations envers des individus qu'il faudra bien récompenser un jour, d'une façon ou d'une autre.
Combien de mensonges sont nécessaires avant une victoire? Beaucoup trop. Les citoyens aussi ont pris de mauvaises habitudes. Ils ont de plus en plus tendance à vendre leur vote au plus offrant. Nous voulons un Colisée... sinon, nous ne voterons pas pour toi. Il faut promettre de construire une autoroute ici, un pont là-bas, sans oublier une garderie, car ça marche à tous les coups. On promet de régler les problèmes qui plombent le système d'éducation.
On répète ad nauseam qu'on aura bientôt LA solution pour le monde de la santé qui ressemble de plus en plus à un bateau qui prend l'eau. Les citoyens se vendent à l'enchère. Dites-moi ce que vous m'offrez et je déciderai si je vais voter pour vous. Parce que le citoyen aussi, à ce petit jeu-là, estime qu'il pourrait s'enrichir. Nous en sommes au point où un citoyen ne voterait pas pour un candidat qui lui dirait qu'il sollicite son vote parce qu'il désire accéder au pouvoir pour faire de son mieux chaque fois que ce sera possible. Ça ne suffirait pas.
Qu'avons-nous vu ces derniers jours? Des gens de pouvoir devenus si farouchement partisans qu'ils sont incapables de séparer le bien du mal. Un goût du pouvoir si proche de la folie qu'il a transformé des êtres humains en manipulateurs féroces qui tirent leur plaisir du petit rôle qu'on leur fait jouer. Des personnages de l'ombre qui s'imaginent plus grands que les plus grands et qui valorisent les miettes dont on les nourrit et qui s'en pourlèchent les babines.
Le Parti libéral est profondément touché. L'étalage de ses petitesses ne va pas aider son image. On peut dire que les colonnes du temple ont été ébranlées depuis quelques mois. Ceux et celles qui découvrent maintenant comment on y brasse des affaires mettront du temps à s'en remettre. La situation est triste et c'est tout le Québec qui est trahi et qui pleure le tripotage de sa démocratie.
Le Parti québécois, comme tous les autres partis d'opposition, à la lumière des révélations concernant le Parti libéral, est en danger plus que jamais. Donné comme un possible gagnant à la prochaine élection, il doit déjà constater qu'il est devenu plus attirant pour tout ce qui grouille et grenouille autour de lui en temps normal. Madame Pauline Marois aura l'embarras du choix pour les prochains candidats. Je la sais assez lucide pour avoir bien mesuré ce qu'elle a à faire.
Quand le ménage aura été fait, quand nous pourrons de nouveau respirer librement, je souhaite que le Québec trouve enfin un moyen adéquat de financer les partis politiques. C'est redevenu un problème urgent. Il faut aussi que les citoyens réalisent que le fait de voter est un privilège qui se mérite et qu'il serait stupide d'attendre de le perdre pour le valoriser.
Il faut apprendre à voter avec sa tête et aussi avec son coeur. Et exiger de nos élus qu'ils laissent le volant à quelqu'un d'autre quand ils ont perdu le contrôle et qu'ils menacent de nous jeter dans le précipice faute de savoir conduire.


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