Diviser pour ne pas régner

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Tandis que les Canadiens français s'entre-déchirent, les anglo-allophones font bloc

Nous, Québécois de souche, sommes inexorablement condamnés à nous déchirer sur le terrain politique. La tragicomédie que nous impose le Bloc québécois, dirigé par une sorte de Cruella d’Enfer prête à tout, non pas pour obtenir des fourrures, mais pour avoir la peau de ses opposants, est un exemple caricatural de la façon dont nous nous entretuons symboliquement.


Nous aimons nous diviser, bien que nous affirmions ne pas aimer la chicane. Le consensus nous donne la nausée et nous rationalisons nos divisions en suggérant que nos multiples choix politiques témoignent de notre santé démocratique. Comme si la multiplication des partis politiques confirmait avant tout notre subtilité collective face au pouvoir.


Le dernier référendum de 1995 a été l’ultime tentative de nous regrouper. À 54 288 voix près, nous avons frôlé l’indépendance, et Jacques Parizeau n’aurait pas basculé dans un trou noir le soir du 30 octobre 1995.


Gauche et droite


Depuis ce temps, sauf au PLQ, les affrontements entre gauche et droite, radicaux et modérés ont secoué le PQ. Avec comme résultat la création de Québec solidaire, de la CAC et de petits partis disparus aussi rapidement qu’ils ont été créés.


Si bien qu’aujourd’hui, nous sommes plus divisés que jamais. Les divergences dans les partis d’opposition, à l’exception de QS composé de gauchistes au discours populiste et autoritaire, sont davantage le fait de conflits de personnalités que de divisions irréversibles.


Face à nous, le front uni des anglophones et des allophones ne bronche guère. À plus de 90 %, ils votent pour le parti libéral. Au dernier sondage, l’appui francophone au PLQ n’est que de 17 %. Au point qu’entre PQ, CAQ et QS nous nous éparpillons. Avec la satisfaction de nous exprimer selon nos convictions, mais sans possibilité de compromis qui permettrait d’envisager une coalition susceptible de mettre un terme au règne des libéraux, si honnis parmi les francophones.


Manque de jugement


Prenons exemple du dernier sondage au sujet de Justin Trudeau, retour de l’Inde. À travers le Canada, l’on enregistre une baisse très notable d’appui au PLC, à tel point que, selon ce sondage, le parti conservateur aurait été élu la semaine dernière. Seul le Québec aurait voté pour lui à hauteur de 43 %. Eh oui ! C’est à se demander si les Québécois de souche manquent de jugement.


Devant pareille aberration, le PLQ pourrait être réélu. Il faudra s’attendre alors à une augmentation sensible de candidats anglophones et allophones de plus en plus nombreux à obtenir l’investiture dans leur circonscription sur l’île de Montréal et à Laval, dont plusieurs deviendront ministrables.


Pendant ce temps, nous continuerons de nous disputer, préférant l’idéologie au pragmatisme. Nous multiplierons les partis dont nous n’avons pas compris qu’ils détruisent ce qui nous reste d’aspirations qui pourraient nous rallier.


Quel triste effilochage de notre force de frappe collective. Sommes-nous condamnés à nous atomiser face à une majorité qui nous regardera, nous les derniers survivants du nationalisme du Québec, comme des artefacts d’un musée des arts anciens ?