FINANCES PUBLIQUES

Déséquilibre ou disparité?

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La déconstruction de l'État afin de le priver de toute capacité d'intervention

Avec le dernier « Rapport sur la viabilité financière » des gouvernements au pays, le directeur parlementaire du budget (DPB) à Ottawa vient d’introduire un nouveau mot pour qualifier le déséquilibre entre le fédéral et les provinces : disparité. Déséquilibre fiscal ou disparité fiscale, who cares ?
Selon le DPB, si la tendance se maintient, la dette accumulée par les provinces sera passée de 31 % à 338 % du PIB dans 75 ans, alors que de son côté, Ottawa pourrait augmenter chaque année ses dépenses de 26 milliards sans affecter son niveau d’endettement actuel.

À la demande des provinces, un exercice semblable a aussi été fait récemment par le Conference Board qui conclut que si rien n’est fait pour corriger la trajectoire, les provinces accumuleront des déficits de 172 milliards au cours des 20 prochaines années pendant que les excédents fédéraux totaliseront 110 milliards.

Comme il fallait s’y attendre, ce sont les coûts des soins de santé, notamment ceux liés au vieillissement, qui expliquent une telle « disparité » puisque leur augmentation moyenne atteindra 4,8 % pour les 50 prochaines années, soit beaucoup plus que la croissance du PIB qui ne devrait pas dépasser 3,6 %.

Bien sûr, ces résultats peuvent ne pas se concrétiser si les gouvernements prennent les choses en main.

Or, selon une troisième étude publiée jeudi par l’Institut C. D. Howe, il y a peu de chance que cela se produise si le passé est garant de l’avenir. En effet, à lui seul l’écart entre les prévisions de dépenses présentées chaque année par les gouvernements en santé et la réalité observée après-coup a totalisé 19 milliards depuis 14 ans au Canada. Et cela devrait se poursuivre, conclut l’auteur de l’étude, l’économiste William Robson, à moins que des changements très profonds ne soient apportés au système de santé.

C’est ce que le gouvernement Couillard tente de faire présentement en réduisant la bureaucratie, en centralisant la prise de décision et en reportant la fraction des augmentations salariales des médecins qui ne leur a pas encore été versée.

Mais ne soyons pas dupes de ces réformes d’organigrammes et de ces jeux politiques essentiellement destinés à équilibrer les livres en 2016. Malgré les efforts de compressions qui menacent même la qualité des services, cela ne changera rien au fait que la population vieillit, que la science ajoute chaque année de nouvelles interventions au panier de services, que la technologie et les médicaments coûtent de plus en plus cher et que le report de milliards en dépenses de rémunération ne constitue, comme le nom l’indique, qu’un report du problème à plus tard.

Pour l’instant, le premier ministre Couillard tient pour acquis qu’Ottawa ne bougera jamais malgré l’évidence de la « disparité fiscale » qui sépare les deux ordres de gouvernement. Il suffirait pourtant qu’un prochain gouvernement fédéral préoccupé par le dysfonctionnement de la fédération indexe la participation fédérale d’un taux de croissance des dépenses en santé bien contrôlées pour corriger la situation sans nuire aux finances fédérales. Même le DPB croit cela possible, c’est dire !

Sans un tel rétablissement de la participation fédérale, ou sans un nouveau partage des revenus fiscaux négocié avec les provinces, la situation continuera de se détériorer. Pendant ce temps, à Ottawa, le premier ministre Harper s’amusera à distribuer des bonbons coûteux aux électeurs susceptibles de réélire un gouvernement conservateur.


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