Des députés remettent en cause la raison d'être du Bloc

Le Bloc ne parvient plus à vendre son message / Le Bloc n'est pas «en crise existentielle»

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Sondage CROP-La Presse - Mars 2008



La Presse Canadienne - Une crise sans précédent secoue le Bloc québécois (BQ). Des députés influents du parti s'interrogent sur la raison d'être du BQ à Ottawa, voire s'il ne contribue pas à améliorer le fédéralisme.

Le Journal de Montréal rapporte, ce lundi, qu'une rencontre privée du caucus bloquiste avant le congé de Pâques a donné lieu à des débats déchirants. Sans remettre en cause l'existence du Bloc, des élus se sont interrogés à voix haute sur l'avenir du parti au moment où un référendum sur la souveraineté du Québec paraît plus lointain que jamais.
Certains se demandent à quoi sert le Bloc, maintenant que le Parti québécois a mis de côté l'obligation de tenir un référendum.
Lors de cette rencontre houleuse des 50 députés bloquistes à Ottawa, celui de Rosemont, Bernard Bigras, a fait une sortie en règle sur le rôle du parti. Il a affirmé que le BQ doit remettre la souveraineté à l'avant-plan ou retourner chez lui. Il a d'ailleurs vivement été rappelé à l'ordre par son chef, Gilles Duceppe, écrit le quotidien.
Pour sa part, la députée de Québec, Christiane Gagnon, a affirmé que le Bloc «améliore le fédéralisme». Elle estime que le parti est encore nécessaire à Ottawa, mais pense que les bloquistes doivent réviser leur stratégie.
Toutes ces inquiétudes se retrouveraient dans le plan d'action qui sera débattu lors du prochain congrès du Bloc québécois, début octobre.
Bernard Bigras et Gilles Duceppe. (Archives La Presse)
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Le Bloc ne parvient plus à vendre son message
Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe (Photo Alain Roberge, La Presse)

Martin Ouellet - Presse Canadienne La mise en veilleuse du référendum sur la souveraineté par la chef péquiste Pauline Marois précipite le déclin du Bloc québécois, pensent des experts en politique de l'Université Laval.

«Parler de souveraineté à Ottawa quand le PQ reporte la souveraineté à plus tard, ce n'est pas tellement vendeur», a analysé le politologue François Gélineau, en entrevue lundi à La Presse Canadienne.
Son collègue Réjean Pelletier acquiesce. «À partir de l'instant où le Parti québécois veut gérer une province canadienne, les électeurs n'ont pas de raison de favoriser plus un parti qu'un autre à Ottawa», est-il d'avis.
Lors d'un conseil national à la mi-mars, le Parti québécois a officiellement jeté au panier son engagement de tenir un référendum sur la souveraineté le plus tôt possible à l'intérieur d'un premier mandat de gouvernement. L'idée de mettre en veilleuse le référendum circulait toutefois depuis des semaines. L'abandon de la mécanique référendaire «a certainement eu un effet démobilisateur», estime M. Pelletier, convaincu que le Bloc québécois en ressent présentement les effets.
«Quand la souveraineté n'apparaît réalisable que dans un horizon lointain, les gens se désintéressent de la question. Ils cessent d'y croire», précise-t-il.
Profitant de la chute vertigineuse de l'Action démocratique du Québec (ADQ), le PQ n'a pas trop souffert de la mise au rancart du référendum, demeurant en deuxième position des intentions de vote à quelques points des libéraux. Mais au Bloc, le recul est considérable.
Selon un sondage CROP-La Presse, effectué du 13 au 26 mars auprès de 1004 personnes, les conservateurs recueillent 29 pour cent d'appuis au Québec, contre 30 pour cent aux bloquistes. Depuis l'élection fédérale de janvier 2006, le Bloc a chuté de 12 points et se retrouve nez-à-nez avec les troupes de Stephen Harper.
La souveraineté n'étant plus considérée comme urgente au sein même du PQ, le Bloc a du mal à se placer au diapason des préoccupations des Québécois, considère le professeur Gélineau.
«Avec le ralentissement de l'économie américaine qui pointe, les enjeux portent surtout sur l'économie. Or, un parti politique qui n'a aucune chance de former le gouvernement n'est peut-être pas l'interlocuteur le plus crédible en ce domaine», croit-il.
Aussi, il serait réducteur selon le professeur Pelletier d'attribuer le déclin du Bloc au seul recul de la ferveur souverainiste tant au PQ que dans la population en général.
À son avis, le Bloc peine à «faire passer son message» depuis l'élection du gouvernement minoritaire de Stephen Harper en janvier 2006.
«Il a de la difficulté à trouver les failles de la politique conservatrice. Avec la reconnaissance de la nation québécoise, le fédéralisme soi-disant d'ouverture et le pseudo-règlement du déséquilibre fiscal, Stephen Harper a joué avec habileté. Et le Bloc semble incapable de contrer le message conservateur», estime M. Pelletier.
Si le Bloc ne parvient pas à rajuster le tir rapidement, les conservateurs pourront espérer prendre encore plus de terrain au Québec à la prochaine élection, conclut-il.
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Le Bloc n'est pas «en crise existentielle»
(Photo La Presse)

Karine Fortin - Presse Canadienne - Les bloquistes reconnaissent qu'ils ont déjà connu des jours meilleurs, mais ils insistent pour dire que leur parti n'est pas «en crise existentielle» même si la tenue d'un référendum a été repoussée aux calendes grecques et que les conservateurs les talonnent dans les sondages.

Les députés interrogés lundi ont tous assuré à La Presse Canadienne que leur dernière réunion, avant le congé de Pâques, n'avait donné lieu à aucun débat mémorable sur l'avenir du parti créé en 1990, contrairement à ce que rapportait Le Journal de Montréal.
«Vous l'auriez su ça n'aurait pas pris de temps s'il y avait eu un caucus houleux. J'ai jamais vu un caucus houleux du Bloc il y a deux semaines», a insisté le chef Gilles Duceppe, à l'issue de la période des questions.
D'après lui, la réunion n'a donné lieu qu'à quelques questions sur un document circulant au sein du parti et qui présente différentes manières d'aborder l'enjeu de la souveraineté, maintenant que l'idée d'un référendum à court terme est écartée.
Le président du caucus, Louis Plamondon, a même été jusqu'à dire que la rencontre d'équipe du mercredi saint avait été «plate».
«Ça a été tranquille. Toute le monde était content de partir pour les semaines de Pâques. Ça a été un climat d'entente», a-t-il insisté.
D'après lui, tout va comme sur des roulettes au Bloc, tant pour les finances que pour l'organisation ou les grandes orientations du parti. «Le Bloc est uni, solide et en forme.»
À l'instar de son chef, M. Plamondon a minimisé l'importance des sondages qui placent la formation souverainiste à égalité avec le Parti conservateur de Stephen Harper au Québec.
Les enquêtes mensuelles internes du parti le placent en effet à 36,7 pour cent dans les intentions de vote. C'est 7 points de plus que ce que les résultats d'un sondage CROP-La Presse mené pendant le congé pascal et publié samedi, a-t-il fait valoir.
Le député Bernard Bigras, dont les propos seraient à l'origine des rumeurs de crise, dit qu'il a bel et bien insisté pour que le Bloc s'assure que la promotion de la souveraineté demeure l'une de ses priorités, avec la défense des intérêts du Québec.
Mais selon lui, cette idée a été très bien accueillie par le caucus. «C'est clair qu'il n'y a pas de crise au Bloc québécois. Il n'y a pas eu de débat déchirant au sein du caucus. Ce n'est pas vrai», a-t-il martelé.
D'autres députés, comme Serge Ménard et Michel Guimond, se sont dits «très étonnés» de lire que leur formation était déchirée. «Je n'ai vu personne qui remettait en cause l'importance du Bloc à Ottawa maintenant et dans un avenir rapproché», a confié M. Ménard.
«Mais nous avons des discussions vous savez. Nous ne sommes pas un parti communiste. Nous avons des gens qui ont des opinions différentes, qui envisagent l'actualité de façon différente parfois et nous devons discuter entre nous pour se faire une idée», a-t-il ajouté.


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