Voter Bloc québécois

Des calculs électoraux porteurs de désillusions

Élection fédérale 2008 - le BQ en campagne



Pour beaucoup dans la gauche, l’appel à voter pour le Bloc québécois serait porteur d’une protection véritable contre les politiques néolibérales et une défense contre une éventuelle détérioration des rapports de force en défaveur des classes ouvrière et populaires. En fait, il y a beaucoup d’illusions dans les appels à voter pour le Bloc québécois. Et la désillusion suivra.
Quels seront donc ces gains d’un vote pour le Bloc québécois ?
L’improbable victoire du Parti libéral du Canada, découlant d’un vote massif pour le Bloc serait une victoire bien aléatoire. On se rappellera que c’est le Parti libéral du Canada, qui le premier s’est attaqué au consensus keynésien. Ce sont les gouvernements Chrétien puis Martin qui ont imposé des compressions sans précédent dans les transferts aux provinces et qui ont organisé le pillage de l’Assurance-emploi. C’est un gouvernement libéral qui a imposé la loi sur la clarté, déniant plus ouvertement que jamais le droit du Québec à l’autodétermination. C’est un gouvernement libéral qui a entrepris la criminelle aventure de l’armée canadienne en Afghanistan et qui avait relancé l’augmentation des budgets militaires. Le fait de tracer un bilan rigoureux du désastre qu’a constitué la politique du gouvernement conservateur ne doit en rien nous faire oublier le bilan des gouvernements libéraux. Et l’enjeu pour la gauche, n’est pas de trouver les moyens de favoriser la prise du pouvoir par un parti du grand capital plutôt qu’un autre.
Si nous parvenons à bloquer un gouvernement conservateur, souhaitons, du moins, qu’il soit minoritaire, nous dit-on. Et voilà à quelle extrémité parviennent les défenseurs d’un vote pour le Bloc. Ils veulent nous présenter la formation d’un gouvernement conservateur minoritaire comme une victoire découlant d’un vote pour le Bloc. Avec de telles victoires, on se demande ce que serait à leurs yeux une défaite !
N’oublions pas les politiques du gouvernement Harper mais n’oublions pas également pourquoi son statut de minoritaire a peu ralenti l’application de ces politiques néolibérales musclées qui ont remis en question une série d’acquis sociaux et qui ont conduit Ottawa à s’aligner sur les politiques de l’Administration Bush.
Pourquoi cela fut-il possible ? L’opposition, particulièrement celle Parti libéral du Canada, a laissé faire le gouvernement Harper. Elle a soutenu ce gouvernement. En crise de direction, de discrédit, de légitimité et sans base électorale nécessaire pour prendre le pouvoir, le PLC ne s’est pas comporté comme une véritable opposition. Il a soutenu systématiquement ce gouvernement. Dans la perspective d’un nouveau gouvernement conservateur, le PLC sortira de ces élections dans une crise encore plus profonde. Sa politique sera encore une fois d’avaliser la politique conservatrice faisant la preuve, que les Libéraux sont d’abord préoccupés de sauver les meubles de leur parti à la dérive.
Appeler à voter pour le Bloc, et prétendre ainsi protéger les intérêts des classes populaires, c’est jeter la confusion. C’est refuser de comprendre que le personnel actuel de la bourgeoisie est adéquat aux intérêts de la classe qu’il sert et que tous les grands partis politiques doivent s’aligner sur les intérêts de cette classe. Ces partis doivent même adopter les stratégies dominantes avancées par la bourgeoisie réelle à défaut de quoi, ils sont appelés à disparaître ou à être marginalisés. Le Parti libéral du Canada ne vit pas cette redéfinition sans contradictions majeures, mais tel est bien le processus qui le traverse actuellement.
Si l’indépendance est indispensable, elle ne sera pas le fruit de l’alliance PQ-Bloc
Refuser de voter pour le Bloc québécois, c’est refuser de voter pour une alliance nationaliste et néolibérale (PQ-Bloc) qui domine le mouvement souverainiste et qui l’a conduit à un cul-de-sac complet. Et nous croyons que la victoire dans la lutte pour l’indépendance et une société égalitaire nécessite une déconstruction d’une alliance qui place des secteurs néolibéraux à la tête du mouvement souverainiste, car une telle direction a été responsable d’une succession de défaites et constitue un blocage de premier ordre sur la remontée de cette lutte. Le Bloc n’a été qu’une composante de cette alliance sur la scène fédérale.
L’appel à un vote NPD, pour souligner la nécessité de l’unité des mouvements sociaux contre les politiques conservatrices
L’important qu’il faut souligner dans ces élections, c’est que les rapports de force entre classes qui ont permis aux gouvernements fédéraux de faire ce qu’il voulait proviennent essentiellement des divisions au sein des mouvements sociaux. Le discours du NPD dans ces élections, c’est un appui soutenu à la mobilisation sociale contre les politiques identifiées au régime Harper comme l’appel au retrait des troupes d’Afghanistan, la dénonciation de l’iniquité fiscale, la volonté de mettre de l’avant une politique de l’emploi… Le NPD se définit comme un allié des mouvements sur presque toutes ces questions. Et c’est pourquoi il faut le soutenir.
L’appel à un vote NPD ne constitue en rien un relativisme constitutionnel
Cet appui ne saurait être inconditionnel. Son fédéralisme asymétrique timide se contentant d’une politique du cas par cas, son incompréhension des aspirations portées par la lutte indépendantiste, tout cela démontre que la gauche politique devra remplacer un tel parti sur la scène fédérale au Québec pour qu’une véritable alliance politique contre l’État fédéral devienne possible.
Renouer avec le vote stratégique n’apportera que des fruits indésirables
Mais surtout, ne faisons pas un appel pour un vote en faveur du Bloc québécois qui ne changera pas l’essentiel des politiques qui seront mises de l’avant par le pouvoir à Ottawa. Cet appel ne jettera aucune base pour le dépassement de la situation actuelle au niveau de l’expression politique des mouvements sociaux. Enfin, il confortera pour des secteurs entiers de la gauche québécoise la tradition du vote utile (ou stratégique) comme la forme « réaliste » de défense des acquis sociaux face aux ennemis qui risquent de prendre le pouvoir à Ottawa comme à Québec.


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