Le programme électoral conservateur

De la suite dans les idées

2 mai 2011 - Harper majoritaire



Le gouvernement Harper s'était empressé au lendemain de sa réélection à l'automne 2008 de s'attaquer au déficit qui menaçait de nouveau l'équilibre des finances publiques. Forcé par la récession et par l'opposition de mettre ce plan entre parenthèses, il y revient aujourd'hui. Le programme conservateur dévoilé hier nous ramène à ce mois de novembre 2008. L'intervalle ne fut qu'une pause.
Ressort du document présenté par le premier ministre Harper le caractère presque objectif qu'est pour lui l'atteinte du déficit zéro. Il veut y arriver en un temps record. Alors qu'il y a deux jours il se donnait quatre ans, il vise désormais trois ans. Un choix discutable dans la mesure où ceux qui en feront les frais seront les contribuables ordinaires, la classe moyenne, qui porteront la plus grande partie de l'effort. Les entreprises, pas du tout.
Le caractère inéquitable de ce choix est on ne peut plus évident. Aux électeurs ordinaires, Stephen Harper promet une série d'allégements fiscaux virtuels qui se réaliseront dans les années suivant l'atteinte du déficit zéro, soit pas avant quatre, cinq ou six ans. Il se garde toute sa marge de manoeuvre pour donner aux entreprises une réduction immédiate de leur taux d'imposition de 18 à 16 %, sous prétexte de création d'emplois.
Cette précipitation n'est en rien nécessaire. Prendre quatre ou cinq ans pour arriver au déficit zéro plutôt que trois soulagerait réellement les contribuables ordinaires, qui ont droit tout autant que les entreprises de recevoir des avantages. Un atterrissage plus en douceur donnerait par ailleurs au gouvernement la marge pour réagir à de possibles sursauts économiques.
Pour étonnante qu'elle soit, cette attitude s'explique. D'abord sur le plan électoral. Il s'agit de marquer la différence avec le programme «dépensier» des libéraux, une explication qui ne dit pas tout. Il s'agit aussi de montrer que les conservateurs sont des gens vrais, animés de convictions profondes. Ils disent ce qu'ils veulent faire et font ce qu'ils disent. Le danger est évidemment que l'idéologie conduise à des choix politiques contestables. L'illustre bien la certitude qu'ils ont que la réduction des impôts des entreprises stimulera la création d'emplois, même si la démonstration du contraire a été faite. Que plus de prisons fera diminuer la criminalité, même si plein d'études montrent le peu d'effet.
La conception que se font de la gouvernance les conservateurs n'exclut pas pour autant le calcul politique lorsque cela est nécessaire. Ce n'est pas sans raison que Stephen Harper a écarté formellement ces derniers jours tout retour du débat sur l'avortement et sur le mariage entre personnes de même sexe. C'est pour la même raison qu'il a écrit en toutes lettres dans le programme divulgué hier qu'il allait assurer aux provinces la poursuite du financement des programmes de santé et finaliser l'entente avec le Québec sur l'harmonisation de la TPS et de la TVQ.
On ne trouve pas fondamentalement de surprises dans ce programme, car il est la suite logique des précédents. S'il y a une chose qu'on ne peut reprocher à Stephen Harper, c'est d'avoir de la suite dans les idées. Il est animé par des convictions desquelles il ne déroge pas, sauf par nécessité. Le problème avec ce programme est qu'il est à prendre ou à laisser et qu'une fois élus, les conservateurs voudront, s'ils sont majoritaires, le réaliser intégralement.


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