Le Premier ministre d'Ecosse Alex Salmond a déclaré à Edimbourg garder dans sa poche l'indépendance de l'Ecosse si Londres continue de persévérer dans son attitude envers l'Union européenne. Selon lui, les partisans de la séparation n'auront même pas à consentir à faire des efforts d'ici le 18 septembre prochain : le Premier ministre du gouvernement conservateur David Cameron le fait parfaitement à leur place.
Cependant, jusqu'à présent, le séparatisme ne figurait pas sur la liste de ses pêchés. Alex Salmond l'a détecté après avoir décortiqué toutes les dernières attaques et prises à partie du Premier ministre britannique contre Bruxelles. M. Salmond affirme dans les colonnes de The Independent que David Cameron a perdu sans gloire la bataille contre la désignation de Jean-Claude Juncker au poste de président de la Commission européenne. David Cameron a promis que la Grande-Bretagne quitterait l'UE si le Luxembourgeois dogmatique était nommé à ce poste. « Toute cette histoire place la Grande-Bretagne sur la voie de la sortie de l'UE et il y a le danger que l'Ecosse soit également tirée vers la sortie, si elle ne prend pas son sort en main en septembre... Cameron joue avec l'Ecosse à la roulette européenne ». Soit dit en passant, les Ecossais soutiennent l'UE dans une plus grande mesure que les Anglais.
Il va de soi que l'analyse d'Alex Salmond repose davantage sur des rêves nationalistes et non pas sur le bon sens. Pourtant ses conclusions sont confirmées par le dernier sondage d'opinion publié aujourd'hui par tous les journaux écossais. Selon le sondage, si la Grande-Bretagne avait été au bord de la sortie de l'UE, 44 % des Ecossais auraient voté pour l'indépendance et 44 autres pourcents, contre. Les 12 % restant n'ont pas encore de réponse toute faite. Bref, tout indique que la tension et l'anxiété au sujet des résultats du référendum s'accentuent au fur et à mesure que ce dernier approche.
Cette situation est suivie avec intérêt en Europe continentale. La crise économique violente de 2008 a éveillé des fantômes d'auto-détermination, de séparatisme et de liberté. Le résultat du plébiscite pourrait servir d'exemple et de précédent pour de nombreuses autres régions européennes, qui considérent l'indépendance comme gage de leur réussite économique. Le séparatisme européen de nos jours a perdu presqu'entièrement ses caractéristiques linguistiques nationales et revêt plutôt un caractère économique. Les régions riches ne veulent plus entretenir les régions pauvres.
En Catalogne, où près de 70 % de la population se prononce en faveur de la rupture avec Madrid, le référendum aura lieu en novembre. L'Ecosse et la Catalogne ne sont que « deux sirènes de l'indépendance européenne », estime l'analyste de l'Institut de l'économie mondiale et des relations internationales IMEMO Konstantin Voronov :
« La liste doit être complétée par tout un groupe de territoires se dirigeant vers la séparation de la métropole. Il faut y ajouter le Groenland, la plus grande île du monde, et les îles Féroé (les deux territoires danois). En plus, les tendances séparatistes n'ont pas encore pris des formes juridiques en Padanie (Nord de l'Italie) et dans la Vénétie, dans le Pays basque en Espagne, en Corse et en Bretagne en France, en Irlande du Nord et dans le Pays de Galles au Royaume-Uni. »
Les Catalans et les Ecossais pourraient être les pionniers du « défilé des souverainetés » européen, note le politologue Léonide Savine :
« En attendant, il s'agit de l'Espagne et de l'Ecosse. Mais elles peuvent servir d'exemple pour d'autres mouvements. La question n'est pas seulement dans le morcellement des Etats : la carte même de l'Europe peut changer. Parce que les frontières ne sont pas tracées d'après des principes ethniques. Ainsi un territoire immense en Roumanie est peuplé de Hongrois. Et le syndrome du +rattachement à la patrie historique+ met régulièrement en effervescence les +Hongrois roumains+.
Les Hongrois d'Ukraine commencent à parler sérieusement de séparation de l'Ukraine après le coup d'Etat à Kiev. Les minorités de l'Ouest ukrainien sont également mécontents du néo-nazisme de Kiev. La liste peut être complétée par les Wallons et les Flamands en Belgique, l'Alsace en France, Chypre, la minorité serbe du Kosovo ».
Les partisans de la +navigation indépendante+ de l'Ecosse disent que sans le parrainage de Londres, leur pays vivrait comme un Koweït européen. Près de 85 % des gisements en mer du Nord sont situés dans les eaux écossaises. L'extraction du pétrole en mer du Nord au cours de ces 40 dernières années est supérieure à 40 milliards de barils. Les experts ont calculé que de 15 à 24 milliards de barils peuvent être extraits sur le plateau continental. Une quantité qui suffirait pour 30 ans environ.
Si les résultats du plébiscite du 18 septembre 2014 sont positifs, l'Ecosse se séparera de la Grande-Bretagne le 24 mars 2016. La date n'est pas retenue au hasard. Le 24 mars 1603, Jacques VI d'Ecosse est devenu Jacques Ier d'Angleterre. L'Ecosse, l'Irlande et l'Angleterre ont formé une union personnelle. Pour les nationalistes écossais, c'est le début du joug de la couronne britannique. Cette année, ils espèrent en finir avec ce déshonneur.
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