Jean Charest verra donc Pauline Marois et Mario Dumont jeudi à leur demande, mais séparément. Il parlera de culture et de Constitution avec Mme Marois et d'économie avec M. Dumont, mais il apparaît évident que la menace d'une récession économique changera le contenu de ces discussions. Inquiets pour leur emploi et leurs épargnes, les Québécois ne pardonneraient pas à leurs leaders de se quereller sur des amendements constitutionnels pendant qu'un incendie menace la maison.
D'ailleurs, Pauline Marois a déjà corrigé le tir en faveur d'une discussion sur l'économie. Dans la lettre qu'elle a fait parvenir vendredi à Mario Dumont, elle signale que les événements se sont précipités depuis sa demande de rencontre à Jean Charest. Elle se dit donc sensible à la nécessité d'une concertation des partis politiques, et elle annonce qu'elle demandera un débat d'urgence sur l'économie le 22 octobre, dès la reprise des travaux de l'Assemblée nationale.
Mario Dumont a également mis la table pour cette rencontre lors de son point de presse d'hier. La principale critique des libéraux à son endroit est qu'il n'a jamais de solution à proposer. Il a promis de ne pas se présenter à la rencontre chez Jean Charest avec une page blanche entre les mains. Il s'est également engagé à collaborer avec le gouvernement.
L'empressement des deux partis d'opposition à parler d'économie n'a rien de surprenant. Péquistes et adéquistes ne veulent surtout pas voir Jean Charest les accuser de faire de la petite politique sur les enjeux économiques. En difficulté dans les sondages, Mario Dumont ne veut pas donner de prétexte à Jean Charest pour déclencher des élections cet automne. Pauline Marois n'a pas ce problème, puisque les sondages lui garantissent à tout le moins le poste de chef de l'opposition officielle. Mais la récession appréhendée vient de reléguer sur le rond d'en arrière l'urgence de sa démarche en faveur d'une réouverture de la Constitution sur la culture.
Que faut-il attendre du gouvernement face à cette récession? La grande question porte sur la nature des mesures vraiment efficaces à sa disposition. En novembre 2001, la ministre des Finances du temps, Pauline Marois, avait déposé un minibudget pour contrer les dangers du ralentissement économique anticipé après les actes terroristes du 11 septembre. Elle a accéléré des investissements publics de l'ordre de 2,5 milliards $ pour la construction d'infrastructures comme les routes, les écoles et les hôpitaux. Ce "budget de la confiance" a été bien accueilli et fait encore la fierté de Mme Marois.
Jean Charest a déjà annoncé une augmentation considérable des budgets pour les infrastructures dans son dernier budget. Hydro-Québec est également engagée dans des projets énormes qui occupent des milliers de travailleurs. On pourrait toujours prétendre accélérer ces travaux, mais il se passe toujours de nombreux mois entre l'annonce d'un nouveau chantier et le moment où les grues mécaniques et les travailleurs se mettent à l'oeuvre. En 2001, les annonces faites par Mme Marois avaient pris huit mois avant de commencer à se faire sentir sur les chantiers de construction. De plus, il y a des limites à la disponibilité de la main-d'oeuvre et des équipements nécessaires. L'accélération des grands travaux d'infrastructures provoque parfois une hausse des coûts lorsqu'il y a déséquilibre entre l'offre et la demande.
Il y aura donc un débat à l'Assemblée nationale sur la récession, mais de la parole aux actes, il y a un monde. On verra rapidement si nos leaders politiques sont imaginatifs, et s'ils veulent vraiment collaborer pour éviter le pire.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé