Crise de l'euro - Énorme dilemme

Crise de l'euro



C'est bien simple, la zone euro, voire l'Union européenne, est confrontée au classique dilemme cornélien. En effet, dans la foulée de la crise grecque, sans oublier les crises portugaise et irlandaise, elle doit choisir entre plus de fédéralisme ou périr.
Le ministre allemand des Finances évoque une restructuration de la dette grecque et crève de fait un abcès. Que fait Jean-Claude Trichet, patron de la Banque centrale européenne (BCE), réputé calme et courtois? Il pique une sainte colère à laquelle de hauts responsables de la Commission européenne font écho avant que Paris dévoile à son tour son opposition à cette satanée restructuration. Pour ce groupe, tout remodelage du passif en lieu et place de prêts accordés par la BCE, l'UE et le FMI signifierait à leurs yeux l'échec de la monnaie unique.
Car il est vrai qu'un tel geste, jugé inévitable par la majorité des économistes européens, aurait pour conséquence des gestes possiblement similaires en Irlande et au Portugal avant que la Belgique et l'Italie deviennent les cibles privilégiées des marchés. Dans le cas des deux premiers pays, la détérioration des finances publiques observée depuis le début de l'année, malgré les plans d'aide alloués par la BCE et consorts, est si prononcée qu'on prédit qu'au terme du présent exercice financier, la dette dépassera... les 100 % du PIB! À l'instar de ce qui a été constaté dans le dossier grec, il faut s'attendre à une valse de décotations de ces nations de la part des agences de notation.
Aux oppositions qui existent entre politiciens et personnalités en charge de fonctions économiques s'est greffée une opposition entre citoyens des pays du Nord et du Sud. Rien n'illustre mieux le fossé entre ces deux sphères que ce récent sondage révélant que près de la moitié des Allemands étaient et restent hostiles à tout sauvetage des finances grecques, 20 % seulement y étant favorables. CQFD: Merkel et ses collègues des Pays-Bas, du Danemark et autres vertueux doivent composer avec des opinions publiques qui jugent le Sud trop cigale et qui feignent...
Et qui feignent d'ignorer, on ne le répétera jamais assez, que la BCE articule l'évolution de son taux directeur en fonction d'abord et avant tout de l'économie allemande, qui avantage l'Allemagne. À preuve, il y a peu, la BCE a haussé les taux d'intérêt et annoncé qu'une autre hausse serait commandée cet été afin d'étouffer les poussées inflationnistes sur le territoire allemand. On augmente pour satisfaire une zone du continent qui alimente l'aigreur de la zone qui a besoin du contraire.
Cette histoire et les divisions qu'elle a mises en lumière confirment comme jamais combien la création de l'euro a été bâclée. Comment peut-on partager une monnaie unique, un marché unique, sans avoir conçu une union budgétaire, une harmonisation fiscale pour laquelle Jacques Delors s'est battu alors qu'il était patron de la Commission européenne, il y a... vingt ans de cela!
En ignorant les conséquences inhérentes et prévisibles sur les fronts budgétaire et fiscal, les «inventeurs» des traités de Maastricht et de Lisbonne ont transformé le rêve européen, l'union du continent, en une auberge espagnole. Espérer que les 17 pays qui partagent la monnaie unique vont muer en 17 Allemagnes revient à nier les réalités géographiques, les différences qu'il y a entre les ressources naturelles du Nord et celles du Sud et d'autres différences. Soit on prend conscience de cela et on s'ajuste, ce qu'il faut espérer, soit on déchire l'euro et on fait alors le lit des nationalismes sur un continent qui se distingue par la promiscuité de ces derniers.


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