Crise de l'euro - Le déni

Crise de l'euro



Le président de la Banque centrale européenne (BCE) vient de proposer la création d'un ministère européen des Finances. Jean-Claude Trichet suggère donc la création d'un autre poste important qui serait occupé par une personne non élue. Bref, il milite pour davantage de bureaucratie supranationale et par conséquent pour une autre soustraction dans l'espace démocratique.
L'idée avancée par le patron de la BCE a sa logique. Puisqu'il y a un marché unique, une monnaie unique partagée par 17 nations et une banque centrale unique, un ministère des Finances paneuropéen devrait voir le jour. Selon son souhait, ce dernier devrait être doté «d'un droit de regard plus marqué et qui fasse autorité dans la définition des politiques économiques d'un pays...» De fait, il disposerait «d'un droit de veto pour certaines dépenses budgétaires et des choix essentiels à la compétitivité du pays.»
Dans cette histoire, il faut s'attarder à la naissance ou plus précisément au moment au cours duquel Trichet a formulé sa conviction. Il l'a dévoilé alors que la BCE, l'Union européenne (UE) et le Fonds monétaire international (FMI) négociaient, en fait imposaient un nouveau train de mesures conjuguées avec austérité au gouvernement grec, aux prises avec un défi financier plus profond qu'envisagé jusqu'ici. À la faveur, c'est le cas de le dire, de cette crise, le duo formé de la BCE et de l'UE s'est constitué en un gouvernement supranational composé de gens non élus, donc non imputables devant les citoyens grecs. Que cela se passe là où les fondements de la démocratie furent pensés, conçus, composés relève du cynisme et non de l'ironie.
Car au ras des pâquerettes, on constate que ces non-élus commandent des décisions que les élus grecs doivent ensuite communiquer aux citoyens avant de les administrer. Des décisions qui logent toutes à l'enseigne de la stricte orthodoxie financière, comptable. Autrement dit, des décisions fixées par des individus qui cultivent l'indifférence envers les conséquences sociales. Qui fait donc l'impasse sur l'équilibre entre les droits et les devoirs si nécessaire à la pérennité de la démocratie.
Jusqu'à présent, un pays a bénéficié plus que tout autre de la crise grecque: l'Allemagne. Un, en soutenant les banques grecques, on a aidé les banques allemandes quelque peu exposées sur ce front. Deux, les principaux bénéficiaires de la première vague de privatisations sont Allemands. Par exemple, ils viennent d'acheter le paquet d'actions que le gouvernement grec détenait dans une imposante compagnie de télécommunications.
Aujourd'hui, le duo évoqué sert une médecine de cheval tout en feignant d'ignorer combien dans le passé l'Allemagne a été gâtée par ce même duo. Lors de la modernisation du tissu économique de l'Allemagne de l'Est, Berlin a grandement bénéficié de la stabilité de l'euro comme de la masse des capitaux. Il y a quatre ans, alors que l'Allemagne était aux prises avec la stagnation, la BCE a poursuivi une politique monétaire accommodante et qui allait à l'encontre des intérêts de certains pays, notamment l'Espagne.
Qu'on songe à greffer un ministère ayant un droit de veto sur les budgets des pays membres à une Banque centrale qui veille au bien de l'Allemagne avant celui des autres, ainsi qu'à une Union européenne qui a mis en somme le gouvernement grec entre parenthèses est un déni de démocratie, ou plutôt une apologie de l'oligarchie.


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