Pour les politiciens européens en général, le président du Conseil européen (CE), Herman Van Rompuy, a mis les pieds dans le plat. Pour d'autres, essentiellement des économistes et des hauts fonctionnaires européens, Van Rompuy a eu le courage de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Qu'a-t-il donc fait? Affirmer que l'avenir de l'euro se joue là, maintenant.
Alors que la crise irlandaise bat son plein, le président du CE a fait entorse à sa discrétion légendaire pour mieux affirmer publiquement ceci: «Nous devons travailler ensemble à sauver l'euro, parce que, si nous n'y parvenons pas, l'Union européenne ne lui survivra pas.» Rien de moins. De prime abord, on pourrait croire que le calme Van Rompuy a péché par pessimisme, qu'il a formulé une opinion, et non un constat. En réalité, il a repris à son compte le diagnostic posé par une ribambelle d'experts depuis que la marée noire financière a atteint les côtes de la Grèce.
Ces derniers observent, voire calculent, que les gouvernements ont tout fait pour éviter que la crise s'introduise sur le territoire d'autres pays. En vain. Pour aider la Grèce hier et l'Irlande aujourd'hui, des parlements ont voté des amendements contraires à certains engagements. Mieux ou pire, c'est selon, la Banque centrale européenne (BCE) a transgressé un interdit inscrit dans sa charte en achetant des milliards d'obligations gouvernementales pour stabiliser les prix. On fait l'impasse sur d'autres faits pour souligner de nouveau que cela n'a pas écarté le danger mis au jour il y a des mois maintenant.
Résultat des courses, si l'on ose dire, l'Union européenne (UE) se divise aujourd'hui en deux camps. L'un est mené par l'Allemagne. Il regroupe ces pays du nord qui militent pour la rigueur budgétaire qui peut seule garantir la stabilité. Ils rêvent de calquer à toute l'Europe la culture monétaire qui a fait le succès du Deutsche Mark. Pour les opinions publiques de ces nations, aider les pays du sud et l'Irlande revient à aider des pays indisciplinés, des zones qui sont autant de contradictions de la vertu revue et corrigée par le protestantisme.
L'autre camp rassemble d'abord et avant tout ce qu'on appelle, en anglais, le PIIGS pour Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne pour Spain évidemment. Ceux-ci estiment que c'est du devoir du fort de venir au secours du faible. Parmi leurs arguments, ils en ont un qui est aussi fondé que de poids. Lequel? La charte de la BCE a été composée de manière à satisfaire une Allemagne réticente à l'abandon du mark. Depuis lors, depuis la création de la monnaie unique, la BCE fixe son taux en fonction de l'économie allemande. Autrement dit, la BCE a suivi une politique qui parfois allait à l'encontre des intérêts économiques de certains pays du sud.
Pour ajouter à l'aigreur de ces derniers, Angela Merkel vient d'imposer, avec la complicité de Nicolas Sarkozy, de nouvelles obligations. Lors des prochaines crises, les banques grecques, par exemple, devront participer au sauvetage. Quoi d'autre? Reconnaître que des pays n'auront pas d'autre solution que de déclarer faillite. Si on comprend bien, le duo franco-allemand entend imposer, à terme il va sans dire, la recette suivie par l'Argentine il y a une dizaine d'années.
D'une ampleur jamais vue jusqu'ici, la crise de l'euro nous enseigne que sa naissance fut bâclée, l'union monétaire ayant été réalisée sans union politique. De cela, beaucoup conviennent aujourd'hui. C'est le seul, l'unique signe d'encouragement pour la suite.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé