Conserver sa culture laïque

Laïcité — débat québécois



«Les citoyens seront invités à présenter un mémoire et à exprimer leur opinion sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles lors d'audiences qui se tiendront de septembre à décembre 2007 à Montréal, Québec et dans les régions», peut-on lire dans un communiqué de la commission Bouchard-Taylor.
Mais le terme «différences culturelles» traduit-il rigoureusement la réalité? Certainement pas! Certes, la définition de l'adjectif «culturel» englobe-t-elle les structures et les manifestations religieuses qui définissent une société, mais ne soyons pas craintifs d'être plus précis en mentionnant que la totalité des accommodements litigieux qui nous sont présentés est imputable au fanatisme religieux.
Ma position par rapport aux accommodements «raisonnables», comme d'autres citoyens, est hostile à tout consentement au nom d'une quelconque croyance dogmatique.
Je déplore et m'insurge avec véhémence (et pour cause!) contre les décisions qui ont donné gain de cause à des groupes religieux qui profitent à outrance de la Charte des droits et libertés.
La technologie -- vérité de La Palice -- évolue à un rythme effréné, et avec la société de consommation que l'on connaît, celle-ci nous entoure. Mais faut-il préciser que l'ensemble de cette technologie de pointe découle de découvertes et percées scientifiques majeures? Qui aurait cru que l'antimatière trouverait une application en imagerie médicale (la tomographie par émission de positrons), que la théorie de la relativité générale serait fondamentale en ce qui a trait au positionnement par GPS, que la fission nucléaire permettrait à Hydro-Québec de produire 3 % de son électricité, que la transformée de Fourier allait un jour révolutionner le monde des télécommunications, etc.?
À cet égard, un constat est flagrant: la science progresse, mais la population ne suit plus depuis belle lurette. Nombreuses ont été les révolutions scientifiques au cours du dernier siècle qui ont apporté de grands changements dans des domaines comme la physique, la biologie ou la chimie. Aux yeux du commun des mortels, ces périodes d'effervescence sont toutefois passées quasi inaperçues. Il en résulte que la population se retrouve avec un bagage de connaissances en sciences pures assez restreint, ce qui est désolant.
Appréhension intuitive
Pour bien des gens, la conception qu'ils ont du monde se limite à une perception innée combinée à l'expérience quotidienne, plutôt banale. Cette appréhension intuitive du monde ne saurait de toute évidence rendre justice aux siècles de cumul scientifique, lequel ne peut être acquis autrement que par la voie de l'enseignement. Force est d'admettre, en toute humilité, que la population est un tantinet crédule et, par conséquent, en proie au prosélytisme religieux (c'est sans parler des centaines de sectes qui prospèrent au Québec en vertu de la misérable Loi sur les corporations religieuses du Québec).
L'éducation, c'est ce qui permet de s'instruire et d'acquérir un esprit critique -- une faculté plus qu'indispensable. Plus jeunes, nous avons tous cru au père Noël. Or, au fur et à mesure que notre rationalisme se développait, nous nous sommes résignés à son inexistence.
Étrangement, peu se sont affranchis du carcan religieux... bien qu'ici, il faille concéder que les religions possèdent de robustes leviers; la solitude, l'ignorance et la peur sont des pivots communs à toute religion.
Les plus aberrants accommodements sont sans conteste ceux qui ont été consentis dans des établissements scolaires. Qu'il s'agisse du port du kirpan, de classes aménagées pour la prière, de l'exemption de jouer de la flûte à bec, ces accommodements irréfléchis créent des précédents tout en donnant raison à des courants profondément intégristes et renforcent leur légitimité. Comment voulez-vous favoriser l'épanouissement de l'esprit critique chez ces personnes en concédant le prétendument bien-fondé de leurs requêtes?
Les religions sont sans pitié: elles exploitent les faiblesses humaines et, armées de leur tissu de mensonges, aspirent les poissons dans un gouffre d'illusions. Elles nous éloignent de la vérité; nous privent du savoir.
Nous parlons sans cesse au Québec de l'importance de protéger notre culture. C'est une cause tout à fait justifiée à laquelle je dis: «Oui, protégeons également notre culture laïque».
Ne perdons pas ce merveilleux acquis au profit de courants fondamentalistes. Le Québec est bien sûr un îlot francophone, mais d'autres dangers aux conséquences bien plus délétères le guettent: la montée du créationnisme (ou design intelligent) par exemple.
Cette approche doctrinaire ultrafondamentaliste gagne même en popularité dans les milieux universitaires états-uniens et la percée affecte d'ores et déjà les provinces canadiennes plus conservatrices. Le design intelligent considère stricto sensu le récit de la Genèse.
Ainsi, selon les créationnistes, les restes fossilisés de dinosaures seraient des artefacts que Dieu a créés pour mettre à l'épreuve notre foi (quelle joie d'apprendre que ce dieu s'amuse avec ses pions!). Franchement, moi, j'appelle ça de la démence. De telles absurdités, de telles conneries, il en existe une pléthore, et chaque religion en véhicule.
Qu'il soit question du port de la burqa, du turban ou de la kippa, de l'excision et de l'infibulation, de l'érouv, de la souccah, du refus de la transfusion sanguine et tutti quanti, ces pratiques sont essentiellement motivées par des pseudo-vérités transhistoriques étiquetées comme irréfutables. Par respect de l'intelligence et de la dignité humaine, je vous conjure, messieurs Bouchard et Taylor, d'émettre des recommandations moins insanes que certaines décisions de la Cour suprême en matière d'accommodements religieux.
Refusez toutes les demandes d'accommodement reposant sur des dogmes, lesquelles proviennent, de toute façon, d'une minorité fanatique. Il en va de la pérennité de la collectivité -- qui prime sur les avenirs individuels!
***
Mathieu Saindon, Étudiant admis au B. Sc. en physique à l'université McGill

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Étudiant admis au B. Sc. en physique à l'université McGill





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