LE PREMIER MINISTRE A DÉCLARÉ VENDREDI QUE LE QUÉBEC AVAIT LES MOYENS DE DEVENIR INDÉPENDANT
Se trouvant sur un terrain terriblement glissant depuis sa déclaration selon laquelle le Québec a les «moyens» de devenir indépendant, et visiblement insatisfait de la manière dont André Boisclair s'est emparé de ses propos, Jean Charest a tenu à rajuster le tir.
Dans une lettre envoyée à La Presse et publiée aujourd'hui dans nos pages éditoriales, le premier ministre du Québec a réaffirmé l'idée que le Québec a les «moyens de choisir son destin».
De plus, a-t-il enchaîné, il est «libre de le faire» mais il n'est pas «dans l'intérêt des Québécois de tourner le dos au Canada pour devenir un État séparé».
Jean Charest n'a manifestement pas apprécié la manière dont le chef du Parti québécois, André Boisclair, a manié ses propos dans les médias, des propos qui ont alimenté bien des discussions hier au Québec. «Devant l'ardeur suspecte du chef du Parti québécois, M. André Boisclair, à déformer mes propos, à les sortir de leur contexte et à n'en retenir que ce qui fait son affaire, je crois qu'il est indispensable d'apporter les précisions et les nuances qui s'imposent», écrit-il dans une longue missive.
Jean Charest invite les Québécois à regarder cet après-midi sur TV5 l'intégrale de l'entrevue qu'il a accordée aux journalistes de l'émission Le Grand Rendez-vous vendredi à Paris. Selon lui, les téléspectateurs pourront prendre connaissance des «motifs qui militent en faveur de notre appartenance au Canada», mais également des «conséquences négatives rattachées au choix de la séparation».
Jean Charest admet qu'une éventuelle séparation du Québec serait «un choix légitime», mais il ne croit pas pour autant qu'elle servirait l'intérêt des Québécois. «La preuve est faite que le Québec, comme société, réussit très bien au sein du Canada. La preuve que le Québec pourrait gagner quoi que ce soit en se séparant du Canada n'a, elle, jamais été faite», écrit-il.
Jean Charest conclut en disant qu'il ne croit pas que les Québécois sont dupes et que la «déformation» de ses propos par André Boisclair, «son empressement pathétique à les travestir et à les récupérer pour servir sa cause sont des signes qui trahissent son désarroi devant l'impasse que représente son obsession pour la séparation et un référendum». Il invite donc André Boisclair à «regarder l'avenir avec lucidité», à «lever le brouillard entourant ses intentions référendaires» et à «réaliser que le peuple québécois forme déjà une des société les plus libres et les plus démocratiques de la planète».
Stéphane Dion prend part au débat
Par ailleurs, le candidat à la direction du Parti libéral du Canada, Stéphane Dion, n'a pas tardé à réagir au brouhaha causé par les propos de Jean Charest. Selon lui, le niveau de vie des Québécois diminuerait si le Québec se séparait du Canada. «Il y aurait des perturbations assez complexes, un affaiblissement de l'économie, une perte de confiance, une crise de plusieurs années, a-t-il déclaré en entrevue au Soleil. On ne voit pas pourquoi on transformerait 25 millions de concitoyens en étrangers.»
En visite en Alberta hier, Stéphane Dion est monté au créneau pour défendre le premier ministre Jean Charest. «Dire qu'on est capable d'être un pays indépendant, ce n'est pas dire grand-chose. Dire qu'on pourrait maintenir ou améliorer notre niveau de vie en se séparant du reste du pays, ça serait une déclaration renversante.»
La mondialisation rend caduque - voire néfaste - l'indépendance du Québec, estime M. Dion. «Pour faire face aux Américains, aux Chinois, aux Japonais, mieux vaut avoir avec nous les Ontariens et les Albertains plutôt que de les transformer en compétiteurs.» En restant dans la fédération canadienne, le Québec met toutes les chances de son côté, poursuit-il. «Même si l'Alberta est l'une des régions les plus riches du monde en ce moment, jamais je ne dirais aux Albertains de se séparer», dit M. Dion.
Pour le candidat, la déclaration de Jean Charest n'a rien de controversé.
C'est davantage la réaction «puérile et artificiellement triomphaliste» d'André Boisclair qui l'est.
Poussant davantage sa réflexion, M. Dion avance que le vote sur une plus grande autonomie de la Catalogne au sein de l'Espagne envoie le même message.
«On ne parle pas de séparation. La Catalogne commence à avoir des droits qui se rapprochent d'une province canadienne.»
Avec la collaboration de Pierre-André Normandin, LeSoleil
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