Camil Bouchard abandonne

Actualité québécoise - vers une « insurrection électorale »?



(Québec) Après François Legault le printemps dernier, c'est au tour de Camil Bouchard de quitter la politique. Les circonstances et le discours diffèrent un peu, mais il y a beaucoup de similitude entre ces deux départs. Deux mois avant sa démission, Legault confiait ouvertement à quel point il trouvait frustrant et peu valorisant le métier de député dans l'opposition. Cofondateur d'Air Transat, il se voyait mal passer quatre ans à jouer son rôle de critique dans l'espoir, peut-être un jour, de redevenir ministre et de pouvoir influencer le cours des choses.
La démarche de Camil Bouchard est à peu près similaire. À 64 ans, l'homme a fait le constat qu'il a joué un rôle plus important dans sa vie antérieure de chercheur et de professeur que sur les banquettes de l'opposition. Il signale à quel point le temps devient de plus en plus précieux quand on avance en âge, et il conclut qu'il n'a plus la motivation nécessaire pour être député jusqu'aux prochaines élections.
M. Bouchard n'est pas le seul député à se poser ce genre de questions. Au cours des dernières semaines, un autre membre du caucus péquiste me confiait à quel point il s'interrogeait sur ce qu'il aura accompli de significatif à la fin de ce mandat. Et pire encore : qu'en sera-t-il si le PQ ne parvient pas à prendre le pouvoir la prochaine fois?
Les députés de l'opposition sont tenus de critiquer les décisions gouvernementales. Or les plus intelligents savent que dans certaines circonstances, ils seraient tenus aux mêmes décisions s'ils étaient au pouvoir. La triste réalité des finances publiques confronte souvent les élus aux mêmes constats, tous partis confondus.
Mais ce ne sont pas tous les élus qui peuvent se permettre de démissionner. Pour certains d'entre eux, le poste de député est également un emploi dont ils ont besoin. D'autres ont encore suffisamment de temps devant eux pour attendre le retour au pouvoir.
Ce n'est pas le cas de Camil Bouchard. Docteur en psychologie de McGill et en congé sans solde de l'Université du Québec, il pourra sans doute reprendre du service ou obtenir des mandats de recherche intéressants. Mais plus encore, il aurait eu 67 ans aux prochaines élections. Il y a beaucoup de jeunes recrues talentueuses au sein du caucus péquiste. Il n'est pas dit qu'il aurait eu sa place au sein du Conseil des ministres.
M. Bouchard avait déjà trouvé difficile de laisser son poste de critique à la famille, en janvier 2006. Il s'y était fait
remarquer, notamment dans le dossier des garderies. Muté à l'éducation, il était revenu à la famille pour quelques mois, en 2007, pour être envoyé ensuite à l'environnement, et finalement à l'immigration et aux Premières Nations, en janvier dernier. Il était loin de ses anciennes amours. Ce jeu de chaises musicales à répétition n'était pas de nature à le rassurer.
Il quitte néanmoins avec beaucoup de classe, en réitérant son respect pour Pauline Marois, en réaffirmant son engagement souverainiste, et en énonçant quelques causes auxquelles il aimerait se consacrer, dont celles de l'endettement des familles et du sort des enfants autochtones.
Voilà l'exemple d'un homme qui aurait pu contribuer davantage à la vie publique s'il avait eu la chance d'être élu au sein d'une équipe gouvernementale. La vie d'un député au sein d'un parti d'opposition est une pénible traversée du désert pour ceux qui ont l'habitude de faire bouger les choses. «Vous êtes très près du pouvoir, mais vous n'êtes pas au pouvoir», a-t-il déclaré hier, en tentant d'expliquer les frustrations de l'opposition. Il ne pouvait pas mieux dire.


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