Bouchard-Taylor : une manoeuvre de diversion?

Accommodements - Commission Bouchard-Taylor

J'ai envisagé un temps de présenter un mémoire à la commission Bouchard-Taylor sur les «accommodements raisonnables». J'y ai finalement renoncé parce que je ne vois pas de raison participer à ce cirque sinistre.
«Cirque» car ce débat sur les accommodements raisonnables a complètement dérapé. La commission est devenue un «défouloir» à peu près aussi riche en information que n'importe quelle émission de ligne ouverte de radio-poubelle. On mélange «accommodements» et «intégration des immigrants» alors que le groupe religieux qui, dans la vraie vie, demande le plus souvent des accommodements est celui des protestants qui sont à peu près tous nés ici. Comme les Juifs sont immigrants au Canada, aussi, leurs ancêtres étant arrivés ici avant la Seconde Guerre mondiale, pour la plupart.
«Sinistre» parce qu'on n'est plus dans le débat, on est dans un phénomène de chasse aux sorcières comme on n'en a pas vu depuis le mcarthysme des années cinquante. On est dans une crise provoquée artificiellement par nos «médiocres de désinformation». La plupart des histoires qui font la une des médias (surtout grâce à certaines stations privées qui en hurlent une nouvelle à chaque soir ou presque) n'ont rien à voir avec la notion d'accommodement raisonnable, qui concerne des décisions rendues devant les tribunaux.
Ainsi, dans l'affaire du YMCA et des vitres givrées, les Juifs pouvaient demander de givrer les vitres, mais rien n'obligeait la direction à dire «oui». Les tourtières sans porc dans les cabanes à sucre? Ça s'appelle un commerce qui développe un nouveau produit pour une nouvelle clientèle! Ça relève de la gestion interne de l'entreprise et de son marketing. Les Hassidims qui demandent qu'on ferme les lumières du stade de baseball? C'est baveux, mais encore là, en quoi la municipalité a-t-elle besoin d'une intervention gouvernementale pour dire «non»?
Je pourrais continuer longtemps. Chaque soir, on tape sur le même clou, montant en épingle des incidents en eux-mêmes insignifiants.
Et les commissaires Bouchard et Taylor écoutent sans broncher les mononc' et matantes qui viennent devant eux déblatérer des inepties tout juste bonnes à distraire Infoman. Sans oublier les intégristes catho comme le maire «lâ-lâ» Tremblay de Saguenay qui voient là l'occasion de nous ramener à la Grande Noirceur dont ils s'ennuient, car c'était le paradis pour les petits chefs fachos dans leur genre. «Lâ-lâ ô Akbar ! »
On se demande bien quel genre de rapport, quelles recommandations utiles, les deux commissaires pourront tirer de ce ramassis de bêtises haineuses. Bref : à quoi cette commission pourra bien servir. Surtout que pendant que les médias sont englués comme des mouches autour de la commission Bouchard-Taylor, une autre commission se déroule dans une discrétion remarquable : la commission Castonguay sur la «réforme du système de santé». Vous en avez entendu parler beaucoup de celle-là? Pourtant, elle devra faire des recommandations au gouvernement sur une question qui va nous affecter tous. On demande à M. Castonguay, un ex-pdg de compagnie d'assurance et actionnaire de pharmaceutique, de nous dire si, selon lui, il faut faire une place aux compagnies privées dans notre système.
Que va-t-il répondre ? Ô suspense… Et tout ça se passe presque totalement hors du regard des médias, et donc du public. Pour ainsi dire, entre chums. Quand quelqu'un qui aura besoin d'une opération mineure se fera présenter une facture de 60 000 $, ce ne sera plus le temps de réagir.
Je me demandais à quoi servait la commission Bouchard-Taylor. Je viens peut-être de le trouver, justement : pendant que les médias y sont, ils ne sont pas à la commission Castonguay.
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André Pelchat
L'Avenir
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