Bouchard s'emporte

Un citoyen est rabroué pour des propos jugés racistes

Racisme politiquement correct...


Valérie Dufour - Le ton a monté pour la première fois hier matin aux audiences publiques sur les accommodements raisonnables alors que Gérard Bouchard a rabroué un participant venu témoigner devant lui avant de lui couper le micro.
«Je dénonce l'aplaventrisme des immigrants devant leurs leaders religieux. Les Québécois ont appris à respecter et à se faire respecter. On ne peut accepter que des immigrants se soumettent à des rites rétrogrades. On a mis le petit catéchisme de côté et on demande aux immigrants d'en faire autant», a fait valoir Régis Simard, originaire de Port-Cartier.
«Vous prononcez des paroles très injurieuses à l'endroit des immigrants. Vous les qualifiez de rétrogrades. Vos propos sont sans nuances. De quel droit osez-vous vous prononcer sur tous les immigrants? Que connaissez-vous d'eux?» a demandé Gérard Bouchard.
«J'ai vécu dans le fondamentalisme religieux catholique et je prône la laïcité», a indiqué cet ingénieur à la retraite. Citant un vieux manuel de bienséance écrit par un membre du clergé, M. Simard a raconté que sa vie de jeune homme avait été marquée par la rigidité de l'Église catholique et des pratiques obligées comme la messe quotidienne et différentes formes de jeûne.
«Propos inacceptables»
C'est quand il a indiqué que les jeunes filles qui se voilaient «faisaient de la politique» que Gérard Bouchard est sorti de ses gonds. «Ce que vous nous servez, ce sont des préjugés. Dans un débat public, vos propos sont inacceptables. Je vais vous demander de céder votre place à quelqu'un d'autre.»
Cette intervention tranche nettement avec le ton adopté jusqu'ici par M. Bouchard. Il semble qu'il ait écouté les critiques qui ont été faites au terme de la première semaine d'audiences, qui lui reprochaient de laisser parler des gens intolérants.
M. Simard n'a pas été le seul hier à tenir des propos similaires. «Il y a des femmes qui sont discriminées dans leurs communautés ethniques et qui sont forcées à faire des demandes d'accommodements raisonnables par un curé, un rabbin ou un imam misogyne et sexiste», a indiqué Paul-Émile Giguère, un retraité du syndicalisme enseignant.
M. Giguère a cité le cas de femmes se baignant habillées à la piscine publique et d'hommes interdits à des cours prénatals. «Ce n'est pas faire preuve de racisme que de se scandaliser d'une telle situation. Il faut s'interroger sur toutes les formes de discrimination», a noté l'homme, qui se demande également pourquoi les femmes catholiques n'ont pas le droit à la prêtrise.
Extrait des mémoires
«Il est temps que le Québec se débarrasse de son nationalisme tribal. On parle encore le français. On a survécu. [...] Quand un immigrant arrive ici, il apporte sa culture et toute la richesse qui vient avec. Mais on a tendance à lui demander de s'assimiler. Je déteste ce terme, car il frôle le totalitarisme. Qu'on s'adapte en apprenant la langue, d'accord, mais on ne peut forcer personne à intégrer notre culture.»

Extrait du mémoire de Paul-Philippe Paquet, enseignant au secondaire en histoire et géographie à Havre-Saint-Pierre.
«Notre région est tombée sous le seuil des 100 00 habitants il y a quelques années. On n'a pas le choix. Il va falloir faire appel à des immigrants. C'est un mouvement qui va s'amplifier et la population risque d'être surprise. C'est arrivé à Ville-Saint-Laurent quand j'y habitais durant les années 1970. En quelques années, le paysage a complètement changé. On va vivre ce choc culturel et il est hors de question d'ériger des barrières pour l'éviter. Économiquement, ce serait suicidaire.»

Extrait des notes de présentation de l'avocat Raymond Nepveu, de Sept-Îles.
«Il faut dénoncer ceux qui essaient de diviser le Québec. Aucune religion n'est supérieure aux autres. Aucun peuple n'est supérieur aux autres. Les accommodements religieux sont des privilèges accordés à une infime minorité. Les immigrants et les minorités culturelles dans leur ensemble ne sont pas en cause.»

Extrait du mémoire déposé par Claude Charest, bibliothécaire à Sept-Îles et trésorier de Québec Solidaire pour la circonscription de Duplessis
«La Côte-Nord a un déficit démographique, mais pas de plan pour accueillir davantage d'immigrants. Il va falloir une volonté régionale d'aller chercher des gens à l'extérieur et d'occuper les emplois disponibles. Chez nous, on est très accueillants et c'est dommage qu'on véhicule l'idée que les gens sont plus racistes en région. J'ai vécu à Montréal et je pense que c'est le contraire.»

Extrait du témoignage présenté par l'avocat Bernard Lefrançois, ex-candidat adéquiste dans Duplessis.
«La culture qui est menacée au Québec, ce n'est pas celle des Italiens, des Grecs ou de Hassidims, c'est la culture française. [...] Au référendum de 1995, ils ont voté à 95 % contre nous. Nous, ce sont les francophones. Nous sommes 80% de la population. Nous avons fondé ce pays. Nous sommes la majorité. Nous sommes le tronc civil de la culture québécoise. C'est aux autres minorités de s'intégrer à notre culture, et non le contraire.»

Extrait de la présentation du mémoire de Viateur Beaupré, ex-enseignant.
Ce qu'ils ont dit
«La laïcité est une valeur de base fondamentale sur laquelle on peut bâtir une société interculturelle. Il y a pas seulement des personnes de religions différentes, il y a aussi des athées. Et le gouvernement doit représenter tout le monde.»

Annalisa D'Orvi, anthropologue italienne qui songe à immigrer au Québec
«Les accommodements raisonnables sont bons quand ils servent à mettre tout le monde sur le même niveau. Si on favorise un groupe d'individus pour des raisons individuelles, je ne suis pas pour ça.»

Ronald Lepage
«Pour moi, l'identité québécoise, c'est beaucoup la langue française. On est dans une mer anglophone. Il y a beaucoup de gens qui arrivent ici et qui apprennent l'anglais comme seconde langue et ça me fait peur.»

Jean-Guy Fortin
«Le droit de pratiquer une religion, qu'elle soit catholique ou autre, ne doit pas placer l'individu au-dessus des lois. Et si les lois sont bien faites, il n'y aura pas de problème d'accommodements raisonnables.»

Diane Huet


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