Bouchard et Taylor terminent leur commission avec des questions insolubles

Bouchard et Taylor invitent à réfléchir à ce qui nous unit

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Commission Bouchard-Taylor : un bilan et la suite


Patrice Bergeron - Gérard Bouchard et Charles Taylor ont conclu la commission sur les accommodements raisonnables, dimanche, en lançant des questions sans réponse.

Au dernier forum de consultation, après des mois d'audiences et à quelques semaines du dépôt de leur rapport, les deux commissaires ont suggéré aux 200 participants, en préambule, d'«explorer l'autre versant de ce que nous sommes», de réfléchir en atelier à ce qui unit les Québécois, plutôt qu'à ce qui les divise. Mais en fin de journée, M. Bouchard a abordé le difficile enjeu des valeurs communes à partager.
Rappelant que les valeurs sont partagées grâce à l'expérience et l'histoire, comme l'atteste le combat pour la laïcité et l'égalité au Québec, il a demandé «quels sont les récits auxquels on s'identifie spontanément, qui sont porteurs d'une valeur» et qui pourraient être d'une mémoire à partager avec les nouveaux arrivants?
Il a rappelé que ce sont plusieurs histoires particulières de Québécois, de «mémoires de lutte», la pauvreté, le défrichement, la colonisation, qui ont forgé et enraciné ces valeurs ici, de là la difficulté de leur trouver écho dans le bagage de l'immigrant.
Charles Taylor a relancé la question. Pour lui, les valeurs universelles ne causent pas problème, mais il a bien ciblé la difficulté du partage des valeurs, parce qu'elles viennent de «blessures».
«C'est justement la force du Québec qui risque aussi de produire une faiblesse: certaines valeurs importantes sont ressenties de façon très profonde ici, la solidarité, l'égalité, parce que ça vient d'une certaine expérience vécue, très forte. Par exemple, la laïcité. Le problème, c'est partager ce sentiment et cette expérience.»
Selon lui, «le coeur du mot Québécois, c'est ceux qui ont vécu ensemble cette expérience. (...) Comment faire le passage, d'une expérience et d'un sentiment vécu, profond, en incluant les autres?»
Les deux commissaires ont concédé qu'ils posaient des questions difficiles, «probablement sans réponse», à l'assistance, qui a soulevé certaines valeurs, notamment l'environnement, chez les jeunes générations, etc.
Un des participants, sociologue de formation, a fait remarquer que la meilleure façon de susciter l'adhésion et l'intégration demeure l'accès au marché du travail.
«On a parlé de toutes sortes de valeur aujourd'hui (dimanche), mais je peux vous dire que ce qu'on valorise le plus au Québec, en ce moment, c'est le travail», a-t-il lancé.
La rapporteuse des différents ateliers tenus durant la journée, Solange Lefebvre, a fait ressortir les idéaux récurrents des participants, «épris d'égalité, soucieux de solidarité, attachés à la parole échangée».
Cependant, elle a souligné combien la communication et le lien social étaient importants au Québec, ce qui soulevait un autre problème: «Je me suis demandé si la source du débat conflictuel sur les accommodements raisonnables n'était pas le fait que certaines personnes perçoivent qu'à travers certains gestes, ou certaines expressions, il y a, selon leur compréhension des choses, une désolidarisation», une rupture du lien social?
En clôture, Charles Taylor a remercié avec son collègue les participants en se disant heureux d'avoir vécu l'expérience et a ajouté qu'il serait même prêt à demander une autre année supplémentaire de forums au premier ministre.
Avant la tenue des ateliers, le philosophe Georges Leroux avait fait état, dans sa conférence d'ouverture, du «déficit patriotique» et du «manque de mobilisation collective» de la société québécoise.
Devant les participants, M. Leroux a évoqué la Charte québécoise des droits et libertés, qui est censée définir les principes qui unissent les Québécois. Mais il a noté que les droits contenus dans la Charte ne recoupent pas toujours les grandes valeurs souvent invoquées et sont muets sur la solidarité, par exemple.
«Pourquoi ne serions-nous pas heureux de nous satisfaire du texte de la Charte, quand vient, comme aujourd'hui, le moment de discuter du lien social et, en général, des valeurs qui peuvent servir de ciment à la société?», s'est interrogé le professeur dans une présentation concise qui allait de Socrate à Habermas.
«Nous demandons: qu'est-ce qui nous unit? Nous répondons: d'abord les principes, les droits et les libertés recueillis dans nos chartes (canadienne et québécoise). Voulons-nous dire plus, pensons-nous que nous sommes capables de dire plus?»
Selon lui, il faut alors se demander s'il y a un «supplément moral» ou spirituel qui n'est pas prévu dans la Charte, une «identité qui serait l'essence de notre société» et qui contribuerait à nourrir des idéaux autres que ceux de nos droits. En d'autres mots, nos énoncés de droits suffisent-ils à susciter une culture publique commune?
Il a donc invité chaque participant aux ateliers à se positionner par rapport à la Charte.
«Les Chartes sont des conquêtes, des acquis majeurs, mais nous avons une société qui évolue vers des formulations plus parfaites, vers des idéaux, qui sont en quelque sorte des idéaux mobilisateurs, (...) comme l'altruisme, la solidarité, la justice sociale (...)», a-t-il suggéré.
Le forum de dimanche était le dernier d'une série de quatre grandes consultations nationales tenues par la commission, en collaboration avec l'Institut du Nouveau Monde (INM).
La commission a fait savoir qu'elle avait reçu 901 mémoires au total, ce qui est davantage que durant les travaux de la commission Bélanger-Campeau (607 mémoires), en 1990, mais moins que la Commission nationale sur l'avenir du Québec de 1995 (5500 mémoires). Aussi, plus de 3400 personnes ont pris part aux 22 forums régionaux de citoyens.
MM. Bouchard et Taylor doivent déposer leur rapport au premier ministre au plus tard le 31 mars.
(Photo Patrick Sanfaçon, La Presse)
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Bouchard et Taylor invitent à réfléchir à ce qui nous unit

Presse Canadienne 3 février 2008 - Gérard Bouchard et Charles Taylor ont entrepris, dimanche, le dernier forum de consultation de leur commission, en affirmant qu'il faut maintenant réfléchir à ce qui nous unit, plutôt qu'à ce qui nous divise.

Dans leurs remarques préliminaires adressées aux quelque 200 participants, les deux commissaires ont tour à tour suggéré qu'il fallait désormais s'inspirer de ce qui rassemble les Québécois, et non de ce qui les divise, au terme de ce grand exercice de consultation, où parfois des propos «durs» ou «très durs» ont été formulés.
Les participants allaient ensuite délibérer toute la journée et revenir en plénière en fin d'après-midi, devant les commissaires.
En milieu d'après-midi, la commission a fait savoir qu'elle avait reçu 901 mémoires au total, ce qui est davantage que durant les travaux de la commission Bélanger-Campeau (607 mémoires), en 1990, mais moins que la Commission nationale sur l'avenir du Québec de 1995 (5500 mémoires). Aussi, plus de 3400 personnes ont pris part aux 22 forums régionaux de citoyens.
Avant la tenue des ateliers, le philosophe Georges Leroux a fait état, dans sa conférence d'ouverture, du «déficit patriotique» et du «manque de mobilisation collective» de la société québécoise.
Devant les participants, M. Leroux a évoqué la Charte québécoise des droits et libertés, qui est censée définir les principes qui unissent les Québécois. Mais il a noté que les droits contenus dans la Charte ne recoupent pas toujours les grandes valeurs souvent invoquées et sont muets sur la solidarité, par exemple.
«Pourquoi ne serions-nous pas heureux de nous satisfaire du texte de la Charte, quand vient, comme aujourd'hui, le moment de discuter du lien social et, en général, des valeurs qui peuvent servir de ciment à la société?» s'est interrogé le professeur dans une présentation concise qui allait de Socrate à Habermas.
«Nous demandons: qu'est-ce qui nous unit? Nous répondons: d'abord les principea, les droits et les libertés recueillis dans nos chartes (canadienne et québécoise). Voulons-nous dire plus, pensons-nous que nous sommes capables de dire plus?»
Selon lui, il faut alors se demander s'il y a un «supplément moral» ou spirituel qui n'est pas prévu dans la Charte, une «identité qui serait l'essence de notre société» et qui contribuerait à nourrir des idéaux autres que ceux de nos droits. En d'autres mots, nos énoncés de droits suffisent-ils à susciter une culture publique commune?
Il a donc invité chaque participant aux ateliers à se positionner par rapport à la Charte.
«Les Chartes sont des conquêtes, des acquis majeurs, mais nous avons une société qui évolue vers des formulations plus parfaites, vers des idéaux, qui sont en quelque sorte des idéaux mobilisateurs, (...) comme l'altruisme, la solidarité, la justice sociale (...)», a-t-il suggéré.
Le forum de dimanche était le dernier d'une série de quatre grandes consultations nationales tenues par la commission, en collaboration avec l'Institut du Nouveau Monde (INM).
Gérard Bouchard et Charles Taylor doivent déposer leur rapport au premier ministre au plus tard le 31 mars.
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