Tout le Canada français s’entend : la décision du gouvernement Ford d’annuler le projet d’université francophone et de supprimer le Commissariat aux services en français constitue une attaque frontale contre la nation canadienne-française. Le Québec, seule province majoritairement francophone, ne peut se contenter de critiquer publiquement le gouvernement ontarien. Nous avons le devoir moral de soutenir les francophones hors Québec, et des mesures concrètes s’imposent.
Notre proposition est donc simple : le Québec devrait financer l’installation d’un campus d’une université à charte québécoise à Toronto, afin de remplacer le projet d’Université de l’Ontario français, et financer en partie la mesure en haussant les droits de scolarité des étudiants ontariens au Québec.
Cette mesure pourrait s’inscrire dans les compétences provinciales québécoises, dans la mesure où ce nouveau campus d’une université québécoise permettrait de raffermir les échanges entre les deux provinces, en plus de fournir une formation compatible avec le marché du travail du Québec. D’ailleurs, avant de déménager son école à Gatineau, le Barreau du Québec a longtemps maintenu une école à Ottawa, preuve qu’il y a déjà eu un précédent d’institution scolaire québécoise en Ontario.
Il est dans l’intérêt du Québec de promouvoir la francophonie à l’échelle canadienne. D’ailleurs, la province offre déjà aux Canadiens hors Québec de payer les mêmes frais scolaires que les Québécois lorsqu’ils s’inscrivent dans un programme universitaire de littérature française ou d’études québécoises, subventionnant ainsi indirectement la francophonie à l’échelle canadienne.
Défendre nos compatriotes
Une intervention financière du Québec forcerait le gouvernement Ford à se positionner sur la véritable question. S’il s’oppose à un projet entièrement financé par le Québec, il démontrera que sa mesure vise à nuire aux Canadiens français et qu’elle n’a aucune logique budgétaire. Si, au contraire, il plie et accepte de financer l’université ou même d’accepter un projet québécois, nous aurons atteint notre objectif de défense de nos compatriotes.
Certains Québécois s’opposeraient sans doute à une telle velléité de financer les études en français en Ontario, en arguant que les impôts des Québécois doivent servir à améliorer l’éducation au Québec et non dans la province voisine. Nous leur répondons que le meilleur moyen de défendre le français au Québec est précisément de le promouvoir partout dans le monde, et particulièrement dans une province contiguë avec laquelle nous sommes particulièrement intégrés économiquement.
Une telle mesure pourrait également être financée en partie par une augmentation des droits de scolarité des étudiants ontariens dans les universités québécoises anglophones. En effet, nombreux sont les Ontariens qui viennent étudier dans le réseau universitaire anglophone du Québec pour bénéficier des droits de scolarité moins élevés qu’en Ontario. Par exemple, les frais scolaires annuels pour un baccalauréat en génie en Ontario représentent en moyenne plus de 12 500 $, alors que, pour un Ontarien, ils représentent environ 7600$ au Québec. Il en est de même pour la grande majorité des programmes, y compris la gestion, les sciences pures, l’informatique, la médecine et le droit.
En somme, ces deux mesures permettraient de favoriser l’épanouissement de la francophonie canadienne et de développer davantage de liens économiques et culturels entre les communautés francophones du pays. Elles auraient aussi le mérite d’envoyer un message politique clair au gouvernement ontarien : nous n’abandonnerons pas les francophones hors Québec.