Assemblée nationale - La voix d'Amir Khadir

Le Québec et la crise

L'Assemblée nationale reprend ses travaux aujourd'hui. La chose est exceptionnelle et a pour cause la récession qui commence à frapper le Québec. Pendant ces trois jours que durera cette brève session, il y aura surtout des discours parmi lesquels se fera entendre une nouvelle voix, celle d'Amir Khadir, premier député de Québec solidaire. Sa voix, a-t-il promis, sera celle des «mal pris».
Ce premier siège gagné sera le tremplin qu'attendait ce jeune parti pour élargir sa base électorale qui, avec seulement 4 % de l'ensemble des suffrages exprimés au dernier scrutin, demeure marginale. Connaissant bien les contraintes de notre système électoral, Québec solidaire avait centré ses efforts dans deux circonscriptions pour tenter de faire élire ses deux porte-parole, Françoise David et Amir Khadir. Mercier s'est révélé un terreau fertile pour ce dernier.
Ce premier pas franchi, Québec solidaire peut entretenir de grands espoirs. Même s'il sera seul parmi 125 députés, Amir Khadir aura l'occasion de prendre la parole à l'Assemblée et en commission parlementaire, pas souvent, mais tout de même régulièrement. Surtout, il pourra, chaque jour de la session, commenter l'actualité auprès des journalistes de la tribune parlementaire. Avec le bagout qui est le sien, les micros se tendront souvent.
De bonnes causes à défendre, Amir Khadir n'en manquera pas. Dans le contexte économique où s'annonce une augmentation du nombre de chômeurs, les «mal pris» seront nombreux. Entendre quelqu'un se porter à leur défense leur plaira d'autant plus que, victimes de l'échec du néolibéralisme, ils entendront quelqu'un dire ce qu'ils ressentent. Québec solidaire ne pouvait espérer contexte plus fertile aux idées de gauche.
Ce qui est une bonne nouvelle pour Québec solidaire en sera une moins bonne pour le Parti québécois vers qui les «mal pris» se tournaient auparavant. Même s'ils votaient parfois à leur corps défendant pour les candidats péquistes, ils n'avaient pas d'autre choix. Perdre à gauche 4 % des voix comme le 8 décembre n'est pas trop dommageable, mais si cela devenait 10 ou 12 %, ce pourrait être assez pour priver le Parti québécois d'une victoire à la prochaine élection. Il aura le choix entre tenter de repousser Québec solidaire dans ses retranchements ou se déplacer vers le centre. Pour sa chef, Pauline Marois, ce sera un dilemme difficile à trancher. Pour sa part, le Parti libéral ne demandera pas mieux que de favoriser la montée de Québec solidaire.
Amir Khadir deviendra, par sa présence à Québec, la voix officielle de Québec solidaire. Françoise David sera repoussée dans l'ombre. De nombreux pièges le guettent. D'abord celui de devenir une vedette instantanée. Puis celui de dire n'importe quoi n'importe quand. Le discours comme le geste peut être extrémiste. Déjà, on le voit participer à de nombreuses manifestations et son lancer du soulier devant le consulat américain à Montréal en a choqué plusieurs. Enfin, il devra éviter le piège des clichés de la pensée magique. Sa capacité à renouveler le discours politique de gauche déterminera s'il pourra être plus qu'une étoile filante dans le ciel politique du Québec.
bdescoteaux@ledevoir.com


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