Anatomie d'une mauvaise promesse

Élection Québec 2012 - analyses et sondages


Si elle prend le pouvoir, Pauline Marois abolira la hausse du tarif du bloc patrimonial d'électricité que le gouvernement Charest avait inclus dans son budget de 2010. Cette promesse malheureuse illustre encore une fois l'absence de direction de son parti dans les dossiers économiques et fiscaux.
Depuis l'an 2000, le prix de l'électricité produite dans des installations construites avant cette date, ce qu'on appelle le bloc patrimonial, est gelé à 2,79 cents le kilowattheure. Depuis, les tarifs ne peuvent augmenter que pour refléter des hausses des frais attribuables aux nouvelles installations ou à de nouvelles filières, comme l'éolien.
En mars 2010, le ministre des Finances Raymond Bachand a annoncé une augmentation d'un cent du tarif de cette électricité patrimoniale sur une période de cinq ans. Des hausses de 3,7% par année qui, en 2018, gonfleront la facture annuelle des consommateurs de 317$. Les revenus additionnels, 1,6 milliard par an, seraient totalement affectés à la réduction de la dette.
Un an plus tôt, le PQ avait eu une petite chicane interne sur la question quand un nouveau venu, l'économiste Nicolas Marceau, avait appuyé l'idée d'un dégel, pour se faire rapidement rabrouer par Mme Marois. Mais par la suite, le PQ n'en a plus reparlé et n'a pas mené de bataille contre cette mesure du budget Bachand.
Ce n'est qu'au lendemain du premier débat des chefs, la semaine dernière, que le PQ a rompu le silence, en accusant - à tort - le chef caquiste, qui se disait contre les hausses d'impôts et de taxes, d'avoir caché à la population son appui à ce dégel.
Du même souffle, le PQ promettait de maintenir le gel. Un engagement qui ne figurait même pas dans sa plateforme électorale publiée trois jours plus tôt! Bref, une manoeuvre partisane totalement improvisée pour embarrasser la CAQ. Mais dont les conséquences sont colossales: 1,6 milliard par an de moins en revenus.
L'argument invoqué - épargner des contribuables surtaxés - repose sur une confusion. Même si elle est une société d'État, Hydro-Québec n'est pas le gouvernement. Elle vend un produit, l'électricité. Une hausse de ses tarifs n'est pas une hausse de taxe, mais une augmentation des prix, comme pour le lait ou le téléphone. Or ce prix est anormalement bas, parce que les Québécois paient leur électricité moins cher que presque partout ailleurs. Ils profitent en fait d'une subvention qui, entre autres, encourage la surconsommation.
Le gel est aussi justifié par un argument moral, l'existence d'un contrat social voulant que cette électricité, qui nous appartient, puisse nous profiter. Mais en toute logique, les bénéfices d'un bien collectif devraient eux aussi être collectifs. Il est plus sage d'utiliser le fruit de cette richesse pour réduire la dette que pour subventionner le chauffage des piscines.
Il y a enfin un argument social, le fardeau pour les citoyens à faibles revenus. Il s'agit d'une conception primaire de la justice sociale. Au lieu de faire un cadeau à tout le monde, dont les riches sont les principaux bénéficiaires, il est plus simple et plus logique d'aider les plus pauvres à payer leur facture, comme le proposait le ministre Bachand.
Le maintien du gel des tarifs d'électricité patrimoniale est une mauvaise idée pour l'environnement, pour l'économie, pour la vraie solidarité, pour les finances publiques. Cette promesse improvisée illustre bien la dynamique de la campagne électorale.
Dans ce dossier, comme dans bien d'autres, le gouvernement libéral a mis en oeuvre des politiques parfaitement sensées, souvent appuyées par la CAQ. Mais bien des gens veulent chasser les libéraux, pour de toutes autres raisons. Ils risquent ainsi de se retrouver avec un gouvernement péquiste qui veut jeter le bébé, l'eau du bain, la baignoire et la tuyauterie au grand complet.


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